Depuis début octobre déjà, la Suède connait une recrudescence de l’épidémie de Covid-19. Jusque-là rien d’anormal au regard de la situation en Europe. Mais le pays scandinave fait beaucoup moins bien que ses plus proches voisins. Et forcément, ça se voit. Le gouvernement impose dorénavant des mesures obligatoires. La bonne discipline des Suédois ne suffit plus.
Depuis le déclenchement de la pandémie de Covid-19, la Suède a adopté une position marginale. Une position qui a suscité de nombreuses réactions et qui a opposé deux camps: les rigoristes et les adeptes du laisser-faire.
La Suède n’a jamais imposé le masque, n’a pas pratiqué de confinement, et n’avait jamais fermé ses bars et restaurants. Pas plus tard que le mois dernier, les Suédois ont encore eu droit à des événements sportifs et culturels de masse. Mais quelques semaines plus tard, la Suède ne peut que constater son échec avec pas moins de 700 infections par million d’habitants. Le nombre de décès, même s’il reste maîtrisé, est aussi plus important.
Le 22 novembre, le Premier ministre Stefan Löfven est contraint d’annoncer un revirement dans la stratégie suédoise. Toutes les réunions non essentielles sont désormais interdites et les rassemblements de plus de 8 personnes ne sont plus possibles, ce qui a provoqué notamment la fermeture des cinémas et des lieux de divertissement. À partir de ce lundi, les écoles du secondaire sont également fermées.
‘Les autorités ont choisi une stratégie totalement différente du reste de l’Europe, et à cause d’elle le pays a beaucoup souffert lors de la première vague’, a déclaré au Wall Street Journal Piotr Nowak, un médecin directement confronté au Covid-19 dans l’hôpital universitaire de Karolinska à Stockholm. Dans les faits, le pays a subi de plein fouet l’épidémie car le virus a pénétré dans les maisons de repos, à l’instar de la Belgique. Ce qui ne fait pas de débat : l’épidémie de groupe, un temps évoquée comme possible stratégie, n’a jamais été rencontrée dans les faits. Les autorités sanitaires de la Suède le reconnaissent désormais volontiers.
L’heure du constat
Aujourd’hui, en Suède, le nombre de décès a passé la barre des 7.000. Le Danemark, la Finlande et la Norvège sont à 878, 415 et 354 décès. Pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, les voisins de la Suède ont été contraints de fermer leurs frontières. ‘Nous n’aimons pas dire que la Suède a été le mouton noir de cette épidémie, mais elle a certainement été un mouton différent’, a récemment déclaré Vivikka Richt, porte-parole du ministère finlandais de la Santé.
L’épidémiologiste en chef du gouvernement, Anders Tegnell, d’habitude plutôt loquace, a refusé de répondre aux journalistes. Lors de l’une de ses dernières sorties, il maintenait que les confinements n’étaient ni durables ni nécessaires. Il expliquait aussi que les masques buccaux faisaient peu de différence.
L’un des grands arguments de la Suède en faveur du laisser-faire, sur base de mesures volontaires (distance sociale, hygiène…), était économique. Or, le PIB de la Suède a chuté de 8,5% et pourrait atteindre les -10% début 2021 selon les dernières prévisions, c’est au-dessus de la moyenne européenne.
En fait, en Suède, les mesures vont dans l’autre sens que celles qui ont été mises en place sur le continent ces derniers jours. Alors que la France, le Royaume-Uni, la Belgique et l’Espagne déconfinent, la Suède reconfine.
Rien n’est gagné
Mais le tableau n’est pas tout rose non plus dans l’autre sens. Qu’importe la stratégie, le virus ne fait pas de cadeau. Le Danemark, jusque-là relativement épargné par une deuxième vague, met en place de nouvelles restrictions, dont la fermeture des écoles. Angela Merkel a prévenu de son côté que les mesures en place ne permettraient pas de passer l’hiver sereinement. Comprendre: il faudra de nouvelles mesures pour patienter jusqu’aux vaccins.
En Belgique, alors que les chiffres allaient dans le bon sens, on fait maintenant face à une certaine stagnation. Le MR plaidait ce week-end pour discuter de l’assouplissement des mesures lors d’un prochain Comité de concertation le 18 décembre. Mais pour l’heure, les chiffres donnent plutôt raison à l’approche plus stricte du ministre de la Santé, Frank Vandenbroucke (sp.a).