Trois vaccins sont déjà en route vers les autorités de contrôle. Le vaccin de Moderna protègerait à 94,5% contre le coronavirus, Pfizer a annoncé une efficacité de 90%. Tous deux ont déclenché un vif enthousiasme et provoqué une poussée boursière impressionnante. Enfin, celui d’AstraZeneca et de l’Université d’Oxford serait ‘presque prêt’. Quels sont leurs points forts et points faibles ?
Les entreprises pharmaceutiques semblent avoir remporté le pari. En quelques mois, elles sont parvenues à développer des vaccins prometteurs. Moins d’une semaine après le vaccin de Pfizer et BioNTech, Bruno Holthof, le patron de l’Université d’Oxford, a déclaré dimanche dans ‘The Seventh Day’ que son vaccin en collaboration avec AstraZeneca va bientôt franchir l’étape de la demande d’approbation. Holthof promet des résultats ‘avant Noël’ pour un vaccin qui, rappelons-le, a dû un certain moment interrompre ses essais. Et puis ce lundi, Moderna annonce que son vaccin offre une protection de 94,5% contre Covid-19.
Les trois vaccins entrent en phase de test finale et ne sont donc pas loin de débarquer sur le marché. Mais, Holthof avertit : ‘Il n’y aura pas de vaccin avant que les autorités ne lui donnent l’autorisation’. Les entreprises pharmaceutiques sont au fait que leur vaccin suscite la méfiance.
ARN
Pour expliquer la différence entre les trois vaccins, il nous faut aborder un côté plus technique. Moderna et Pfizer/BioNtech utilisent ce qu’on appelle l’ARN messager. Une bribe du matériel génétique du coronavirus est injectée dans notre corps via une cellule. Cette cellule se comportera alors comme le coronavirus, doté de certaines clés qui seront identifiées comme dangereuses par notre corps. Notre système immunitaire produira alors immédiatement des anticorps. Et le virus ne pourra plus pénétrer en profondeur dans notre corps.
L’Université d’Oxford et AstraZeneca font différemment. Ils injectent un virus inoffensif – dans leur cas, un virus du rhume chez les chimpanzés – dans notre corps, qui emporte avec lui un petit morceau du SARS-Cov-2. Les autres cellules le reconnaissent immédiatement et déclenchent une réponse immunitaire.
Les trois vaccins ciblent la même protéine qui infecte les cellules avec le virus. ‘Les résultats de Pfizer montrent que nous sommes sur la bonne voie’, a déclaré Holthof dimanche à l’unisson avec de nombreux autres experts. L’allemand CureVac se concentre également sur cette protéine épineuse, mais n’est que dans la première phase de ses tests, dont une partie est réalisée à l’UZ Gent.
Cauchemar logistique
Il existe une grande différence entre le vaccin Pfizer et les deux autres: sa conservation. Le vaccin Pfizer est un cauchemar logistique. Il doit être maintenu constamment entre -70 et -80 degrés, y compris durant le transport.
Ce n’est toutefois pas trop un problème en Belgique, car le vaccin est en partie développé à Puurs. Mais on imagine mal le vaccin accéder aux pays du tiers monde. De plus, tous les médecins ou même les hôpitaux ne disposent pas de congélateurs à -80 degrés. Même ici en Belgique, la plupart des hôpitaux viennent tout juste de démarrer le processus d’achat.
Les deux autres vaccins ont un gros avantage. Le vaccin de Moderna ne doit être conservé qu’à -20 degrés pendant le transport, soit la température d’un congélateur normal et même à 2 à 8 degrés par la suite. Un simple frigo suffit donc largement.
Normalement, l’ARN messager est très instable à des températures élevées, mais Moderna affirme qu’en investissant dans sa technologie, le laboratoire a trouvé un moyen de le maintenir à des températures moins froides. La société établit des recherches sur l’ARN messager depuis dix ans. La petite entreprise (en comparaison aux géants pharmaceutiques) en tire d’ailleurs son nom: mRNA (ARN en français).
Celui d’AstraZeneca est beaucoup moins lié à la température. Mais cela entraîne d’autres difficultés. AstraZeneca doit par exemple développer le virus lui-même pour l’introduire dans le corps. Mais le vaccin peut simplement être conservé au réfrigérateur tout au long du processus. Cela ouvre donc grand les portes de sa distribution.
Moins cher
Le vaccin AstraZeneca est le meilleur marché. Il ne coûterait que 3 euros par dose, tandis que celui de Pfizer serait de 30 euros et, selon les derniers rapports, Moderna facturerait le sien jusqu’à 40-50 euros. Les trois vaccins doivent être administrés en deux doses, mais l’intervalle entre les deux diffère. Chez Pfizer, il y a trois semaines, chez AstraZeneca et Moderna quatre semaines.
En résumé, Moderna a donc l’avantage de l’efficacité et de la logistique, AstraZeneca de la logistique et du prix, et avec le vaccin Pfizer, les gens seraient plus rapidement immunisés. Les gouvernements devront voir à qui ils donnent la priorité. Ou peut-être un savant mélange des trois, et des autres candidats vaccins prometteurs (l’un des deux de Sanofi par exemple).
La Commission européenne a déjà commandé 300 millions de doses à Pfizer et 400 millions à AstraZeneca. Les discussions sont à un stade avancé avec Moderna. La Belgique a déjà souscrit au contrat d’AstraZeneca pour 7,7 millions de doses. Le gouvernement décidera pour Pfizer cette semaine.