Selon l’ancien commissaire européen chargé du climat et un groupe de militants écologistes, l’aide financière des contribuables aux compagnies aériennes touchées par la crise doit être assortie de conditions strictes concernant leur futur impact sur le climat.
‘Ce doit être conditionnel, sinon, lorsque nous nous rétablirons, nous verrons les mêmes niveaux de dioxyde de carbone ou des niveaux plus élevés [provenant des vols]’, a déclaré à The Guardian Miguel Arias Cañete, le commissaire européen chargé du climat qui a conduit l’Union à l’accord de Paris.
La crise du coronavirus cause de nombreux dommages aux compagnies aériennes européennes. La liste des compagnies annulant leurs vols s’allonge presque de jour en jour, tandis que d’autres doivent déposer le bilan. Sauf que pour augmenter ses chances de survie, le secteur aérien demande de réduire les taxes environnementales. De l’opportunisme pur et dur?
Priorités environnementales
Au Royaume-Uni, un ensemble de 26 groupes, dont Greenpeace, a décidé de prendre les devants. Ils ont écrit au Chancelier de l’Echiquier (le ministre du gouvernement chargé des finances et du trésor), Rishi Sunak, exigeant des ‘conditions strictes’ pour tout sauvetage financier. Dans leurs doléances: des objectifs tout aussi stricts sur les émissions de gaz à effet de serre conformément à l’accord de Paris. ‘L’argent public doit être utilisé pour répondre aux priorités sociales et environnementales, ainsi qu’aux besoins économiques’, ont-ils écrit.
Ils proposent ainsi un nouveau régime fiscal comprenant une taxe sur les grands voyageurs, en remplacement de la taxe sur les passagers aériens. Cela déplacerait donc la charge fiscale vers les voyageurs prenant très souvent l’avion. A savoir qu’environ la moitié des habitants du Royaume-Uni ne prennent pas ce moyen de transport au cours d’une année donnée.
Ces conditions ‘strictes’ à toute aide financière peuvent cependant revêtir plusieurs formes. Cañete souhaite lui la mise en place d’un système de taxe sur le carbone ou d’échange de droits d’émission… Tel que celui qui existe dans l’UE. ‘Les mécanismes du marché sont nécessaires’, a-t-il déclaré. Des alternatives au kérosène polluant sont également envisagées, mais les biocarburants restent encore trop chers. Quant aux avions 100% électriques, on ne les verra pas de sitôt dans le ciel. ‘Nous devons stimuler la recherche et le développement dans des domaines tels que l’hydrogène’, déclare Barbara Buchner, directrice générale du think tank Climate Policy Initiative.
Briser les mauvaises habitudes
Certains experts ont toutefois bon espoir que la crise actuelle puisse entraîner des changements permanents dans les habitudes des voyageurs. Remplacer les voyages d’affaires en avion par des vidéoconférences à long terme, par exemple. Y a-t-il vraiment besoin de faire des milliers de kilomètres pour débattre autour d’une table alors que les technologies actuelles le garantissent tout autant?
Les citoyens pourraient également être tentés de faire davantage fonctionner leur économie nationale et locale (qui devra se relever de la crise) plutôt que de prendre l’avion et d’aller voir ailleurs lors de leurs vacances. ‘Nous ne prenons pas autant l’avion – pourquoi ne pas continuer à ne pas le faire?’, relève Kevin Anderson, professeur d’énergie et de changement climatique à l’université de Manchester. ‘Pourquoi ne pas renforcer les bonnes choses qui sortent du Covid-19?’ Alors, qui est prêt à passer ses vacances d’été en Ardenne? D’ici-là, on n’aura peut-être plus d’autre choix.
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