Avec leur nouvel abonnement payant, Facebook et Twitter se comportent-ils comme des mafieux ?

S’il suit une logique comptable parfaitement compréhensible, le nouvel abonnement des deux réseaux sociaux n’en demeure pas moins une pratique douteuse : obliger les utilisateurs à payer en échange de leur sécurité. Alors qu’il a toujours été entendu que c’était aux plateformes de faire en sorte que les hackers ne puissent y pénétrer ou y usurper une identité.

Dans l’actu : après Twitter, c’est au tour de Meta de proposer un abonnement payant – Meta Verified – principalement pour renforcer la sécurité des utilisateurs.

  • Contrairement à ce beaucoup ont compris au départ, non, Facebook et Instagram ne vont pas devenir payants pour tous les utilisateurs.
  • Meta propose toutefois un abonnement à 12 dollars pour ceux qui désirent avoir une petite coche bleue à côté de leur compte et qui veulent renforcer la sécurité de celui-ci contre les pirates. Notamment via une identification par carte d’identité.
  • Le tout est testé en Nouvelle-Zélande et en Australie avant une arrivée massive aux États-Unis et puis sans aucun doute en Europe.
  • Twitter avait déjà pris les devants sous l’impulsion d’Elon Musk. Un abonnement à 8 dollars par mois, qui promettait un peu plus qu’une simple sécurité, comme le fait de pouvoir éditer un tweet même après son envoi, en plus de nombreuses autres personnalisations. Mais Elon Musk a récemment fait savoir que l’authentification à double facteur, via un SMS, ne serait disponible que pour les abonnés payants.

La question : la sécurité des utilisateurs, quels qu’ils soient, ne devrait-elle pas être un prérequis ?

  • Pour l’éditorialiste du Washington Post Geoffrey A. Fowler, Facebook et Twitter se comportent comme des mafieux, en nous proposant « une offre qu’on ne peut pas refuser : payez, ou bonne chance pour récupérer vos comptes Facebook et Instagram des mains des pirates. »
  • Et ce n’est pas un problème marginal : le piratage de compte sur les réseaux sociaux est fréquent, et touche aussi des personnalités. En Belgique, demandez à Jean-Marc Nollet (Ecolo), co-président des Verts, dont le compte Twitter a été piraté depuis des mois. Il n’a, à ce jour, toujours pas récupéré son compte alors qu’il s’agit pourtant d’un homme politique de premier plan.
  • « Les actions des deux entreprises me rappellent les rackets menés par les mafieux : obliger les gens à effectuer des paiements réguliers en échange de la « sécurité ». Nous devons tracer une ligne dans le sable. La sécurité, la confidentialité et le service de base du compte doivent être inclus pour tout le monde, pas seulement pour ceux qui paient plus cher », met en garde l’éditorialiste. Et il est difficile de lui donner tort : les plateformes ne sont-elles pas responsables des problèmes de sécurité en leur sein ? Facebook, surtout, se nourrit allègrement de nos données pour satisfaire les publicitaires, ce qui a fait sa fortune. Un juste retour serait d’accorder, à tous, une sécurité et une confidentialité maximales.

L’essentiel : l’argent, le nerf de la guerre.

  • Parlons-en des revenus, justement. Les géants de la Sillicon Valley font toujours d’énormes bénéfices, rassurez-vous, mais disons que l’âge d’or de la croissance des revenus sans limites est sans doute derrière eux.
  • L’année 2022 aura été particulièrement dure pour les géants de la tech, à la suite de la montée des taux d’intérêt. Les résultats du 4e trimestre 2022 ont montré un clair ralentissement dans les bilans comptables de Meta, Google, Apple et autres Twitter.
  • Le marché publicitaire, qui était largement dominé par le duo Facebook – Google est en train de se modifier, s’ouvrant d’autres acteurs comme Amazon ou TikTok. Sans oublier que dans le cas de Facebook, Apple lui a fait un mauvais coup estimé à 10 milliards de dollars l’année dernière.
  • Facebook est désormais dans une logique de diminution des coûts et est toujours à la recherche de nouveaux revenus. Twitter est, lui, dans une logique de rentabilité, que le réseau social n’est jusqu’ici jamais parvenu à obtenir.
  • Lors de l’annonce de Meta Verified par Zuckerberg, un commentaire d’un internaute estimait que la sécurité « devrait vraiment faire partie du produit de base, l’utilisateur ne devrait pas avoir à payer pour cela. » Le fondateur de Facebook a expliqué que le coût serait trop important : « Vérifier les cartes d’identité et fournir un accès direct au support client pour des millions ou des milliards de personnes coûte une somme d’argent importante. Les frais d’abonnement permettront de couvrir ces coûts et de suivre le nombre de personnes qui s’inscrivent, ce qui nous permettra de garantir la qualité à mesure que nous nous développerons », a-t-il écrit.

Ou alors, Facebook pourrait faire en sorte que sa plateforme soit plus difficile à tromper, en obligeant par exemple tous les utilisateurs à opter pour l’authentification à deux facteurs, une option totalement sous-utilisée, que vous devriez activer. Ce serait un bon début.

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