Pourquoi la visite de Macron aux USA est la dernière chance d’éviter une guerre commerciale entre l’Ancien et le Nouveau Monde

Après une visite d’État chez Trump en 2018, voilà que Macron se rend chez Biden, avec tout le faste diplomatique en surface. Car en dessous, il y a un contexte économique tendu dans lequel l’UE, à la traine, perçoit de plus en plus les USA comme un grand rival potentiel. Alors que la guerre en Ukraine et la crise énergétique rendent l’Europe fort dépendante de la bonne volonté de Washington à son égard.

Pourquoi est-ce important ?

Si les États-Unis et l'Union européenne restent des alliés, en particulier face à la Russie, c'est moins vrai économiquement : ce sont de plus en plus des rivaux plutôt que des partenaires, d'autant que cette dernière subit les conséquences directes de la guerre en Ukraine.

L’actualité : le président français Emmanuel Macron est parti en visite d’État aux USA – sa seconde en cinq ans, une fréquence exceptionnelle pour un dirigeant français. Mais il ne s’agit pas d’une simple visite de courtoisie : Macron doit tenter de raffermir les liens économiques entre les États-Unis et l’Union européenne.

« Une plus grande unité transatlantique »

  • Sous les fastes, la realpolitik : Macron est surtout là pour rappeler à Biden que les Européens ont besoin de gaz à bas prix pour faire tourner leurs économies, mais aussi de subventions américaines de plusieurs milliards de dollars pour renforcer les industries vertes.
  • L’UE estime que, étant en première ligne face aux conséquences de la guerre en Ukraine, elle doit obtenir la solidarité financière des États-Unis. Et ce, sans devoir subir la concurrence, estimée déloyale, des subsides américains qui attirent les entreprises sur le Nouveau Monde plutôt que sur l’Ancien.
  • Du côté américain, on estime plutôt que les Européens n’ont qu’à bâtir leur propre système de subsides à la transition verte des entreprises, plutôt que de compter sur le portefeuille de l’oncle Sam. Au risque de provoquer une course à la surenchère des subsides, ce qui ne serait bénéfique à aucun des joueurs.
  • L’Élysée a déclaré que Macron fera pression pour « une plus grande unité transatlantique » sur les politiques d’investissement et l’impact de la guerre en Ukraine. 
  • Le principal objectif de Macron : obtenir que l’UE puisse bénéficier des mêmes droits que les entreprises américaines, canadiennes et mexicaines dans les accords de subvention dans le cadre de l’Inflation Reduction Act (IRA).

« Biden doit prendre en compte ce qui se passe après la guerre. L’UE supporte le poids des sanctions, et l’impact de cet effort contre la Russie est assez clair. Il y a un risque que les déséquilibres s’aggravent, car l’UE paie des prix de l’énergie plus élevés et les États-Unis prennent des mesures pour stimuler les investissements dans l’industrie. »

Un représentant de l’Élysée cité par Politico

La grande réconciliation se fait attendre

Le contexte : l’arrivée à la présidence de Joe Biden devait marquer la grande réconciliation entre l’Europe – et donc la France – et les États-Unis après l’air Trump. On l’attend toujours.

  • L’année dernière, l’affaire AUKUS a gravement secoué les relations entre la France d’un côté, et les États-Unis, l’Australie, et le Royaume-Uni de l’autre. Washington s’est révélée capable de faire annuler en secret un accord franco-australien de vente de sous-marins pour favoriser ses propres intérêts.
  • L’affaire a tourné à la tempête diplomatique, avec le rappel par la France de son ambassadeur aux États-Unis.
  • Mais depuis, la situation mondiale a changé, et les deux pôles du monde occidental ont grand besoin l’un de l’autre. John Kirby, porte-parole du Conseil national de sécurité de la Maison Blanche, a souligné la longue histoire des relations étroites entre les États-Unis et leur plus ancien allié qu’est la France. « C’est l’occasion de mettre en lumière un élément fondamental de l’approche de cette administration en matière de politique étrangère, à savoir les alliances », a-t-il déclaré.
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