UE: les oppositions Nord-Sud empêchent une réponse commune au choc économique

Les chefs des 27 États membres n’ont pas su tomber d’accord sur la réponse à apporter à l’impact économique de la crise du coronavirus. Le pays le plus touché, l’Italie, a accusé les autres nations de réagir trop timidement au choc économique sans précédent.

Les 27 dirigeants de l’Union européenne se réunissaient jeudi, par liaison vidéo, coronavirus oblige, afin de trouver une solution commune à la crise économique historique causée par l’épidémie. Une crise qui révèle, semble-t-il, des désaccords entre les pays membres de l’UE. Le clivage est particulièrement marqué entre les États du Nord et ceux du Sud, reflet de la répartition inégale de l’épidémie.

‘Corona bonds’

Le groupe des 27 a tout d’abord tenu un débat (houleux) sur les ‘corona bonds’: il s’agirait d’emprunter en commun auprès des institutions à un taux probablement très bas, du jamais vu.

Mais alors même que le sommet virtuel était toujours en cours, le Premier ministre italien, Giuseppe Conte, a publié une déclaration rejetant le projet de texte final. Ces mesures sont bien trop faibles face à l’ampleur de la crise, selon le dirigeant du pays le plus touché par l’épidémie. Il donne à l’Europe dix jours pour ‘trouver une solution adéquate à la grave urgence dans laquelle tous les pays se trouvent’, affirment des sources à son cabinet.

L’opposition italo-espagnole

Conte indique que ‘personne n’envisage’ vraiment la piste d’une mutualisation de dette publique. Il plaide plutôt pour des ‘instruments novateurs et vraiment adéquats’ pour aider les économies européennes à faire face à un ralentissement brutal et à la hausse attendue du chômage.

Soutenu par l’Espagne (qui a dépassé la Chine en nombre de morts), le Premier ministre italien avance la création d’un groupe de travail constitué des ‘cinq présidents’ des principales institutions de l’UE concernées, à savoir la Commission, le Conseil, le Parlement, la Banque centrale et l’Eurogroupe.

Les Pays-Bas et l’Allemagne contre la dette partagée

Autre opposition Nord-Sud: celle des Pays-Bas et de l’Allemagne aux corona bonds. Le Premier ministre néerlandais, Mark Rutte, a dit ‘ne pas voir de circonstances dans lesquelles il pourrait [les] accepter’. Une réticence appuyée par l’Allemagne: ‘le MES est l’instrument préféré’, indique aussi la chancelière allemande, Angela Merkel, en référence au Mécanisme européen de stabilité. L’Autriche fuit également ce concept de dette partagée.

Les ministres des Finances de l’eurozone avait déjà reporté en début de semaine ce désaccord concernant les ‘corona bonds’ à la réunion d’hier. Une piste envisagée était de créer une ligne de crédit spécifique pour la pandémie, canalisée via le MES et sa capacité de prêt de 410 milliards d’euros. Il pourrait ainsi accorder aux pays qui le demanderaient des fonds jusqu’à 2% de leur PIB.

Une piste que craignait l’Italie, notamment concernant des conditions et une surveillance semblables que celles vécues par la Grèce dans son programme de redressement après la crise de l’euro. Le projet de texte final a repoussé cette voie du MES, mais sans réponse assez rapide aux yeux de Conte. ‘Les conséquences du Covid-19 ne doivent pas être traitées dans les prochains mois mais dès demain matin’, a-t-il martelé.

Des accords timides

A l’issue de la vidéoconférence (qui a duré six heures), les 27 ont toutefois réussi à s’unir autour de l’idée d’un filtrage plus minutieux des investissements étrangers afin de protéger les ‘atouts stratégiques’ de l’Europe. Une décision qui fait suite à une offre il y a quelques jours de l’administration Trump pour acheter une société médicale allemande travaillant sur un vaccin contre coronavirus. Offre qu’a rejetée le gouvernement allemand.

Les dirigeants européens ont également convenu de mettre en place ‘un système de gestion des crises plus ambitieux et de plus grande envergure au sein de l’UE’.

Enfin, ils ont pu s’entendre sur une prolongation d’une quinzaine de jours nécessaires pour que les dirigeants financiers puissent présenter des propositions. Quand il s’agit de délais supplémentaires, tout le monde est d’accord…

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