Sur fond de crise du coronavirus, les tensions entre la Chine et Taïwan s’embrasent

La présidente de Taïwan a rejeté ce mercredi l’offre chinoise ‘un pays, deux systèmes’ visant à ramener l’île dans le giron de Pékin. Ce à quoi la Chine a rétorqué que la réunification était inévitable. Cet échange annonce un probable regain des tensions entre les deux gouvernements, alors que la situation particulière de Taïwan a été remise en lumière par la crise du coronavirus.

Taïwan ne peut accepter de faire partie de la Chine dans le cadre de son offre d’autonomie ‘un pays, deux systèmes’, a déclaré en substance la présidente Tsai Ing-wen, dans un discours prononcé après la prestation de serment de son deuxième et dernier mandat, rapporte l’agence Reuters. Ce faisant, la présidente taïwanaise rejette formellement les revendications de souveraineté de la Chine sur l’île et ouvre probablement la voie à une dégradation encore plus profonde des relations entre les deux gouvernements.

‘Les deux parties ont le devoir de trouver un moyen de coexister à long terme’

‘Je tiens à réitérer ici les mots ‘paix, parité, démocratie et dialogue’. Nous n’accepterons pas que les autorités de Pékin utilisent le principe ‘un pays, deux systèmes’ pour rétrograder Taïwan et saper le statu quo entre les deux rives du détroit. Nous restons fidèles à ce principe’, a poursuivi Mme Tsai, dont le Parti démocrate progressiste a été élu en janvier, à une très forte majorité, en promettant de tenir tête à la Chine.

Pour rappel, le principe ‘un pays, deux systèmes’ est celui qui prévaut à Hong Kong depuis la réunification en 1997. À ce titre, les habitants cette ancienne colonie britannique jouissent de libertés inconnues en Chine continentale. Des libertés que les autorités chinoises tentent de plus en plus de saper, selon les opposants hongkongais au pouvoir de Pékin.

‘Les deux parties ont le devoir de trouver un moyen de coexister à long terme et d’empêcher l’intensification des antagonismes et des différences’, a toutefois ajouté la présidente taïwanaise. ‘Nous sommes prêts à engager un dialogue avec la Chine et à apporter des contributions plus concrètes à la sécurité régionale.’

‘La réunification est une fatalité historique’

La réponse de Pékin n’a bien sûr pas tardé, réaffirmant le fait que jamais la Chine ne tolérerait l’indépendance de Taïwan. ‘La réunification est une fatalité historique du grand rajeunissement de la nation chinoise’, a déclaré le Bureau des affaires taïwanaises. ‘Nous avons la ferme volonté, une confiance totale et une capacité suffisante pour défendre la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale’.

Depuis la réélection de Tsai Ing-wen, la Chine a intensifié ses exercices militaires dans la région. Des avions de chasse chinois ont notamment pénétré dans l’espace aérien de l’île et des navires de guerre ont croisé au large de ses côtes. En 2016, après la première élection de Mme Tsai, la Chine avait mis fin à un mécanisme officiel de pourparlers avec Taïwan.

Le surprenant effet du coronavirus

La crise du coronavirus a ramené Taïwan sur le devant de la scène internationale ces dernières semaines. Sa gestion exemplaire de la crise sanitaire, alors que l’île ne fait pas partie de l’OMS, à cause du refus chinois, a suscité l’indignation de plusieurs nations, une chose qui aurait été impensable en d’autres circonstances.

En plus de la dizaine de pays qui entretiennent encore des relations diplomatiques avec Taïpei, les États-Unis, le Canada, l’Australie, la France, l’Allemagne, la Nouvelle-Zélande, la Grande-Bretagne et le Japon ont demandé à l’OMS d’accorder à Taïwan le statut d’observateur, au grand dam du pouvoir chinois.

‘Depuis le début de l’épidémie de Covid-19, les autorités du DPP se sont engagées dans une manipulation politique, organisant un battage constant autour de la participation à l’OMS’, a réagi un porte-parole des Affaires étrangères chinoises, dont les propos sont relayés par Le Soir. ‘Leurs intentions réelles sont très claires: profiter du virus pour courir derrière l’indépendance.’

Taïwan espérait pouvoir participer à l’Assemblée générale de la Santé, organe décisionnel de l’OMS, les 18 et 19 mai, afin d’y ‘expliquer en détail ce que nous avons fait en matière de tests, de diagnostics, de contrôle des frontières, de prévention communautaire’, selon les dires du ministre taïwanais de la Santé Chen Shih-chung.

Ce ne fut pas le cas. Et les débats sur la participation de Taïwan comme observateur ont reportés. Un choix que Washington a ‘condamné’ et qualifié d »exclusion’.

Tensions entre Trump et la Chine

En particulier depuis l’élection de Donald Trump, Taïwan est une source de tensions dans les relations sino-américaines, même si Washington et Taipei n’entretiennent pas de relations diplomatiques formelles.

Mardi, le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a d’ailleurs envoyé ses félicitations à Mme Tsai et loué son ‘courage et sa vision dans la conduite de la dynamique démocratie taïwanaise’.

En représailles de ces déclarations, le gouvernement chinois a fait savoir qu’il prendrait ‘les contre-mesures nécessaires’.

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