Quelles leçons pouvons-nous tirer de la sécheresse actuelle ?

Il fait très sec. Le déficit de précipitations est maintenant aussi élevé qu’au début du mois de mai 1976, l’année la plus sèche jamais enregistrée. S’il n’y a pas de pluie bientôt, nous aurons de gros problèmes dans notre région au cours des prochains mois. Car nous sommes face à un problème structurel : les sécheresses qui se produisaient auparavant tous les dix ans semblent désormais apparaitre plus de quatre fois par décennie. Il est donc urgent que les gouvernements commencent à mettre en œuvre des politiques visant à réduire les impacts futurs de la sécheresse et à renforcer la résilience des agriculteurs.

Selon la Commission européenne, le changement climatique entraînera des sécheresses plus fréquentes, notamment en Europe du Sud et de l’Ouest, et ce même si l’augmentation de la température moyenne se limite à 1,5 degré Celsius. Et nous ne sommes pas les plus vulnérables : le Chili, l’Argentine et l’Ouest américain sont en plein milieu d’une méga-sécheresse qui dure depuis une décennie – les conditions les plus sèches que ces régions aient connues depuis un siècle. Et de nombreuses régions de l’ouest du Canada et des États-Unis connaissent aussi une sécheresse extrême – un événement qui se produit une fois tous les 20 ans.

La sécheresse rend l’agriculture moins productive, réduit le rendement des cultures et augmente le nombre de décès liés à la chaleur. Elle contribue également aux conflits et aux migrations, car les personnes les plus vulnérables se retrouvent privées de leurs terres. En bref, cela rend les gens plus vulnérables.

Des sécheresses plus fréquentes

La sécheresse fait partie de la variabilité naturelle du climat, mais elle est aussi l’un des nombreux impacts du changement climatique dont on voit la fréquence et l’intensité augmenter. Les sécheresses qui se produisaient auparavant une fois tous les dix ans dans les régions arides devraient se produire plus de quatre fois par décennie si la température moyenne mondiale augmente de 4°C. Et si les pays ne réduisent pas radicalement leurs émissions dues à la combustion du charbon, du pétrole et du gaz naturel, nous nous dirigerons immanquablement vers ce genre de situation. Les zones arides vont s’étendre, jusqu’à couvrir la moitié de la surface terrestre.

Le manque de pluie n’est cependant pas la seule cause de la sécheresse ; l’évaporation plus rapide joue un rôle majeur. Au cours des dernières décennies, l’évaporation a augmenté dans notre pays, surtout au printemps, en raison de la hausse des températures. En outre, le ciel est en moyenne moins nuageux, en partie parce que l’air est plus pur que dans les années 1980, ce qui contribue également à augmenter l’évaporation.

Des changements climatiques majeurs approchent

Les terres sèches se réchauffent deux fois plus vite que les zones humides. Les scientifiques prévoient qu’au cours des 50 prochaines années, entre un et trois milliards de personnes connaitront des températures qui dépasseront la fourchette climatique connue par l’humanité depuis plus de 6.000 ans.

Les moyens de subsistance et la vie elle-même vont changer fondamentalement dans ces régions. L’élevage du bétail et des bovins ne sera plus possible, car la hausse des températures entraînera la mort généralisée des animaux. Et les infrastructures urbaines n’auront pas été construites pour faire face à des inondations intenses, dont la fréquence peut augmenter dans de nombreuses zones sèches.

Dans les régions où l’eau est rare, les agriculteurs utiliseront de plus en plus des sources d’eau de mauvaise qualité, comme les eaux usées ou les eaux de drainage, qui peuvent être riches en sels, en agents pathogènes et en métaux lourds, pour irriguer leurs cultures. Cela peut entraîner une accumulation de sel dans le sol et rendre les terres inutilisables pour l’agriculture, ce qui peut avoir des répercussions sur la sécurité alimentaire. Les pertes économiques mondiales dues à la dégradation des terres causée par le sel s’élèvent déjà à environ 30 milliards d’euros par an.

Que peut-on faire ?

Il est donc urgent que les gouvernements commencent à mettre en œuvre des politiques visant à réduire les impacts futurs de la sécheresse et à renforcer la résilience des agriculteurs. Il faudrait proposer des solutions pour lutter contre l’érosion des sols due aux vents, la gestion des poussières, ou lancer des campagnes pour réduire la consommation d’eau et promouvoir la restauration des paysages. Ils pourraient adopter des stratégies d’hétérogénéité dans le paysage – variétés de cultures et étendues de terres non cultivées – qui permettent aux abeilles et aux pollinisateurs de prospérer. Ils pourraient encourager les agriculteurs à planter des cultures alimentaires résistantes à la sécheresse.

Si l’adaptation progressive est importante, des changements systémiques majeurs ou des adaptations transformationnelles peuvent être nécessaires pour faire face aux risques climatiques croissants. Ces adaptations peuvent inclure le développement et la mise en œuvre de technologies de stockage de l’eau, des changements dans les pratiques de pâturage et d’agriculture pour préserver les sols, et des changements de comportement pour réduire l’utilisation de l’eau.

Il peut également y avoir des risques résiduels que l’adaptation ne peut pas traiter, ainsi qu’une maladaptation – des actions qui augmentent involontairement le risque d’effets négatifs dus au changement climatique. Par exemple, les eaux souterraines sont une source d’irrigation dans de nombreuses régions du monde et leur épuisement peut avoir dépassé un point de basculement où elles ne peuvent plus être reconstituées par les précipitations.

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