Que se passerait-il si Bakhmout venait à tomber ?

Depuis le mois d’août, l’Ukraine et la Russie s’affrontent dans les villages, les champs, les forêts et les rues autour de la ville de Bakhmout. Celle-ci est de plus en plus encerclée, mais l’armée ukrainienne refuse de battre en retraite. Quelles seraient les conséquences si elle battait en retraite ou si la Russie parvenait à s’emparer de la ville ?

La situation : Bakhmout reste pour l’instant aux mains des Ukrainiens, mais la situation se dégrade de plus en plus.

  • Il y a quelques jours, les dirigeants de l’armée ukrainienne ont décidé de faire sauter tous les ponts sur la rivière Bakhmutka, qui coupe la ville en deux. L’armée ukrainienne s’est retranchée derrière cette barrière naturelle, espérant ainsi garder pied dans la ville.
  • Cependant, la véritable menace ne vient pas seulement du front : les troupes russes se sont emparées de plusieurs villages au nord et au sud de la ville, menaçant de l’encercler. L’Ukraine a envoyé des troupes supplémentaires sur ces flancs afin d’enrayer ce péril.
  • Le centre de Bakhmout est toujours soumis à une pression intense. L’armée russe, et plus particulièrement la milice privée du groupe Wagner, lance des vagues de soldats, qui s’écrasent l’une après l’autre sur les positions ukrainiennes jusqu’à les submerger. Il est donc possible que la ville tombe dans les jours ou les semaines à venir. Toutefois, l’Ukraine semble également avoir la possibilité de se retirer.

L’option de la retraite : la ville elle-même n’est pas particulièrement importante d’un point de vue stratégique.

  • Le président ukrainien Volodymyr Zelensky craint cependant qu’une victoire russe à Bakhmout n’ouvre la porte à l’arrière-pays, à Kramatorsk et à Slovyansk. Si la Russie parvient ensuite à s’emparer de ces villes, c’est la quasi-totalité de la province de Donetsk qui tomberait entre sous son contrôle.
  • Selon le groupe de réflexion Institute for the Study of War, la Russie n’ira pas aussi loin. D’une part,elle n’a tout simplement pas assez de poids pour avancer rapidement après la prise de Bakhmout. Les unités blindées, en particulier, font défaut : Bakhout et Kramatorsk sont distantes de près de quarante kilomètres à vol d’oiseau, ce qui ne se parcourt pas à pied.
  • Par ailleurs, si la Russie s’empare de Bakhmout , elle sera confrontée à un dilemme : se diriger vers le nord, via l’autoroute M03 (qui fait partie de l’E40) vers Slovyansk, ou vers l’ouest, via la T0504 vers Kostiatinivka. Les chances que l’armée russe puisse avancer simultanément par les deux routes sont minces : elle a tout simplement subi trop de lourdes pertes autour de Bakhmout pour cela.

L’enjeu : si Bakhmout n’a que peu de valeur stratégique, elle en a une sur le plan symbolique.

  • Kramatorsk et Slovyansk sont sur des hauteurs par rapport à Bakhmout, ce qui est toujours un avantage dans les situations de combat. Mais cette ville, en raison de la résistance qui dure maintenant depuis des mois, a une solide valeur symbolique tant pour l’Ukraine que pour la Russie.
  • Si Bakhmout tombe, ce sera vraisemblablement un coup de massue pour le moral des Ukrainiens. Poutine, quant à lui, a besoin de cette conquête pour annoncer de bonnes nouvelles à ses partisans et peut-être même pour survivre politiquement.
  • Cependant, le prix à payer est particulièrement lourd : on estime que quelque 20 à 30.000 soldats russes sont déjà morts dans cette bataille. Du côté ukrainien, les pertes sont bien moindres : les services de renseignement ukrainiens utilisent un ratio de sept Russes tués pour un Ukrainien ; un officier de l’OTAN a indiqué au Telegraph qu’ils partaient sur un ratio à peine moins déséquilibré d’un ratio de 5 pour 1.

MB

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