Pourquoi l’Europe n’est pas prête pour les voitures électriques en 2035

L’UE veut ouvrir la voie à un avenir 100 % électrique après une série d’initiatives, mais cela s’avère plus facile à dire qu’à faire.

Pourquoi est-ce important ?

L'UE souhaite réduire fortement les émissions de gaz à effet de serre au cours des prochaines années. Pour y parvenir, elle a élaboré un "Green Deal" européen en 2020 : une série d'initiatives visant à rendre l'Europe climatiquement neutre d'ici 2050. Une partie de ce paquet comprend l'interdiction de la vente de voitures à moteur à combustion à partir de 2035. En effet, l'Europe veut passer à un avenir tout électrique à partir de ce moment-là. Mais pour y parvenir, il y a encore beaucoup de travail à faire.

L’essentiel : « Le passage à un avenir électrique est totalement sous-estimé », déclare Patrick Hendrick, ingénieur à l’ULB, dans L’Echo.

À partir de 2035, les voitures à essence, diesel et hybrides ne seront plus vendues en Europe. C’est ce que l’UE a décidé afin de réduire fortement les émissions nettes de gaz à effet de serre dans les années à venir. « Nous ne sommes pas prêts », affirme Hendrick. « Il est temps de se bouger, car 10 ans vont passer vite ».

Première étape : l’accessibilité financière

Actuellement, l’achat d’une voiture électrique est assez cher par rapport à une voiture à moteur à combustion interne classique. La production de masse fera baisser ce prix, mais il faut d’abord remédier à la pénurie de pièces :

  • La logistique du lithium doit être améliorée. L’Europe compte actuellement une mine de lithium en activité, située au Portugal. Cela va changer à partir de 2028 : le groupe français Imerys a récemment annoncé l’exploitation d’un nouveau site. Mais c’est encore trop peu pour approvisionner l’ensemble du marché européen.
  • La disponibilité des batteries est également un problème. « Si nous ne voulons pas payer trop cher nos batteries parce qu’elles viennent de Chine ou de Corée, nous devons contrôler la logistique et les prix. Pour cela, nous avons besoin d’usines qui les produisent en Europe. Pas quelques-unes, mais des dizaines ou des centaines », estime Hendrick.
  • Certains composants – comme le cobalt – sont à éviter, selon le professeur d’aéro-thermomécanique. En outre, selon M. Hendrick, il convient d’utiliser des technologies qui ne sont pas actuellement disponibles. Il donne l’exemple du phosphate de fer, qui permet la production de batteries LFP (lithium fer phosphate, ndlr).
  • La taille de la voiture détermine aussi souvent le prix. « Nous avons besoin de voitures plus petites, avec des batteries plus petites, surtout en ville. Plus une voiture est lourde, plus elle consomme, plus elle a besoin de batteries, ce qui la rend encore plus lourde », explique M. Hendrick. « Mais les fabricants semblent le comprendre », observe-t-il.

Deuxième étape : la charge

  • « Aujourd’hui, les stations de recharge rapide sont encore insuffisantes à Bruxelles et en Wallonie ». C’est là que le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer, selon M. Hendrick. « Ils doivent encourager le secteur privé à faire des investissements », lit-on. En outre, les stations-service devront également s’adapter aux installations de recharge. « Avec les bornes rapides, la recharge prend une heure. Que faisons-nous des files d’attente pour les véhicules ? »
  • Une autre question est de savoir où installer les bornes. « À Bruxelles, peu de gens ont un garage. Ils devront se servir ailleurs : sur la voie publique, sur le parking d’un supermarché ou au travail », explique M. Hendrick.  « Mais comment éviter que chaque utilisateur ne reprenne sa voiture huit heures plus tard, après son travail, en ayant monopolisé la borne? Avec une application sur smartphone? »

Troisième étape : la surcharge

Ensuite, il y a le réseau électrique. « Le réseau ne pourra pas supporter tout le monde », entend-on.

  • « Que faites-vous en janvier et février, quand il y a peu de soleil ? Même pour les recharges à la maison, ça peut coincer », estime le professeur. « Si nous limitons la puissance, la recharge prend des heures et le propriétaire doit sortir dans la rue après minuit pour débrancher sa voiture ».

L’Union européenne, et la Belgique, ont encore du pain sur la planche si elle veut atteindre ses objectifs climatiques dans les temps.