Pourquoi la France veut relancer sa production de paracétamol

L’Hexagone veut redevenir un acteur incontournable de l’industrie pharmacologique. Une place mise à mal par les délocalisations vers la Chine. Ce qui a eu des conséquences désastreuses pendant le pic de la pandémie de coronavirus.

Par Matthias Bertrand

La France ne produisait plus de paracétamol sur son sol depuis 2008. Mais ça va changer : le sous-traitant pharmaceutique Seqens a officialisé le lancement d’une nouvelle usine destinée à produire ce fameux composé chimique anti-douleur et anti-fièvre qui figure parmi les médicaments les plus utilisés au monde. Ce nouveau lieu de production devrait être fonctionnel dès 2023 et, ironiquement, il sera construit sur le plateau de Roussillon, dans l’Isère, là où se trouvait auparavant l’usine fermée en 2008 par son propriétaire d’alors, le groupe chimique Rhodia.

Rationnement en pharmacie

Ce retour annoncé du paracétamol vers la France intervient un an après que le président Macron ait annoncé un grand plan de relocalisation de la toute la chaine de production de certains médicaments essentiels. Car au début de la crise sanitaire provoquée par le coronavirus, le pays s’est retrouvé fort démuni, entre autres, en paracétamol : 60% de la production venait de Chine. Et l’industrie pharmaceutique a, elle aussi, été durement frappée par les fermetures d’usine dues au virus, alors que des molécules comme le paracétamol et l’ibuprofène étaient encore plus massivement consommés que d’habitude car ils permettent d’atténuer les symptômes d’une infection au Covid-19. Quant aux médicaments génériques, majoritairement produits en Inde, ils sont à 70% issus de principes actifs mis au point par la Chine. Résultat : en février 2020, la chaine logistique qui alimentait l’Europe en antalgiques s’est effondrée. En France, la vente de comprimés à base de paracétamol a même été limitée à deux boites par personne en mars 2020 afin d’économiser les stocks.

Une situation à laquelle les industriels français, comme le groupe pharmaceutique Sanofi, qui produit à Lisieux les fameux cachets de Doliprane (à base de paracétamol) ont bien été contraints de s’avouer peu préparés. Ce risque de pénurie a visiblement fait l’effet d’un électrochoc en France, et le pays cherche visiblement à rapatrier au plus vite une grande partie de la production de médicaments d’usage courant. La nouvelle usine aura une capacité de 10.000 tonnes par an. Le montant de l’investissement nécessaire, qui est soutenu par le plan France Relance, n’a pas été rendu public. Pour la ministre déléguée à l’Industrie Agnès Pannier-Runacher, c’est en tout cas une étape essentielle pour « renforcer la résilience de nos capacités de production de produits de santé et assurer ainsi la souveraineté sanitaire de l’Union européenne. »

Pour aller plus loin:

Plus