L’optimisme ou le pessimisme sont-ils les seules options pour traverser ce sombre hiver ? Ou y a-t-il une troisième voie ?

On le lit partout. Une grande partie de la population a peur de l’avenir. Avec une crise énergétique qui se présente après le coronavirus, alimentée par le cycle 24/7 des rapports apocalyptiques dans les médias, la question se pose de savoir comment y faire face au mieux. Devons-nous croire en un scénario optimiste selon lequel les choses vont s’arranger très vite ou plutôt un scénario noir sans solution? À moins qu’il y ait une troisième option?

La question est de savoir comment nous allons passer l’hiver en Europe, sachant que la plupart d’entre nous devront vivre avec des températures ambiantes plus basses. C’est aussi le cas sur les marchés : un environnement dans lequel beaucoup d’investisseurs en actions, mais aussi pour la première fois en obligations, vont perdre de l’argent. Le tableau n’est pas beau à voir, loin de là. Parallèlement, le nombre de personnes anxieuses augmente rapidement. Cet hiver sombre ne va certainement pas aider.

Pour les chefs d’entreprise et les PDG, c’est tout aussi douloureux. Ils ont aussi tous ces soucis, mais en plus, ils doivent continuer à motiver leur personnel et leurs collègues, et se demandent comment ils vont les payer. Pensez à l’indexation automatique des salaires qui pèse lourdement sur les résultats des entreprises en Belgique.

Alors quelle attitude est la meilleure pour passer l’hiver : une vision optimiste, souhaitant que tout aille mieux bientôt ? Une vision pessimiste où c’est vraiment game over ? Ou y a-t-il une troisième option ?

Les optimistes naïfs

Adopter une vision de Bisounours aide à faire face aux problèmes. Il est tout à fait possible que nous sortions bientôt de ce gouffre. L’inflation est un phénomène temporaire, car la déflation deviendra la norme à long terme, compte tenu du vieillissement de la population. De plus, un cessez-le-feu pourrait bientôt être signé en Ukraine et nous serons de nouveau sur pied.

Seulement, il y a une faille dans ce raisonnement. Si vous aviez demandé à ces optimistes, il y a un an, s’il était possible que la progression de la facture énergétique soit multipliée par 10, ils en auraient ri.

Dans la vie, des choses imprévues, parfois positives, parfois négatives, croisent votre chemin. La question cruciale est alors de savoir comment vous réagissez à cela. Si vous êtes optimiste, un revers peut être encore plus douloureux, car il va à l’encontre de vos attentes. Après tout, vous aviez des attentes très élevées et maintenant, elles ne sont pas satisfaites. Les optimistes doivent faire face à leurs propres attentes élevées.

Les sombres pessimistes

Les pessimistes ont toujours raison. Le monde va en enfer. Nous allons tous mourir un jour. Au moins, cette attitude ne souffre pas d’attentes trop élevées. Cela pourrait difficilement être pire selon eux.

Le problème de cette attitude, cependant, est le danger de tomber dans une sorte d’apathie, une léthargie qui consiste à laisser les choses suivre leur cours. Les troubles mentaux peuvent en être la conséquence, surtout si vous perdez tout espoir.

Les réalistes pragmatiques

Il existe pourtant une troisième voie, dont les entrepreneurs sont un excellent exemple. Les entrepreneurs disent souvent qu’ils sont de vrais optimistes. En réalité, la plupart d’entre eux sont des fonceurs qui sont très réalistes dans la vie et s’attaquent au problème tous les jours. Ce volontarisme pour aller de l’avant est interprété à tort comme de l’optimisme. C’est une résilience qui permet de ne pas rester inactif et de se fixer de nouveaux objectifs à chaque fois, même lorsque tout va mal. La résilience et une approche pragmatique de la résolution des problèmes ne doivent donc pas être confondues avec l’optimisme.

Ce réalisme ne se traduit pas par une sorte de léthargie ou d’apathie à laisser les choses suivre leur cours. Non, c’est un pragmatisme bien ancré où l’on protège chaque jour son entreprise et soi-même contre une calamité qui ne doit pas nécessairement arriver.

Le « paradoxe de Stockdale »

De manière surprenante, la confirmation de cette approche provient d’un amiral de l’armée américaine, James Stockdale, qui a été incarcéré comme prisonnier de guerre au Vietnam. L’histoire est racontée dans le best-seller From Good to Great, du gourou du management Jim Collins.

Stockdale a trouvé un moyen de faire face à la torture quotidienne que lui et ses soldats devaient endurer. Il avait mis au point tout un système : après x minutes, vous aviez le droit de dire ceci, après x minutes cela… Il a inventé une sorte de code Morse pour permettre aux soldats en situation d’isolement de communiquer avec le monde extérieur. Il a tout fait, chaque jour, pour que son équipe survive.

Quand Collins lui a demandé qui n’avait pas survécu au camp de prisonniers, il a répondu : « les optimistes ». « Ce sont ceux qui ont prétendu qu’ils seraient libres à Noël. Et quand Noël est arrivé et qu’ils étaient toujours coincés, ils ont dit Pâques… et puis Thanksgiving. Mais c’est finalement leur cœur qui s’est brisé. »

L’amiral James Stockdale à son retour du camp de prisonniers vietcong avec une jambe paralysée, résultat des tortures qu’il a dû endurer là-bas. (Getty Images)

La seule attitude à adopter face à cette nouvelle crise

Selon M. Stockdale, la leçon à tirer pour les chefs d’entreprise qui doivent piloter leur société pendant une crise est la suivante : « Faites face aux faits brutaux, mais ne perdez jamais la foi. »

C’est la seule attitude correcte. Communiquez de manière réaliste, faites face aux faits, mais en même temps, continuez à aller de l’avant, gardez l’objectif en tête et ne perdez jamais espoir. C’est la meilleure façon de faire face à des revers inattendus. Pas d’optimisme naïf, pas de pessimisme exagéré, mais un réalisme pragmatique qui évalue les problèmes de manière réaliste et fournit à l’entreprise une stratégie, une approche et un objectif pour y faire face.


Xavier Verellen est un auteur et un entrepreneur

(JM)

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