Cathie Wood, directrice générale de la société de gestion d’actifs à succès Ark Invest, ne veut plus risquer les foudres du parti communiste chinois. Elle a déclaré au Financial Times que son fonds a considérablement réduit son exposition à la Chine et ne compte dans son portefeuille que des entreprises dans les bonnes grâces de Pékin.
L’investisseuse vedette Cathie Wood remanie son portefeuille chinois
Pourquoi est-ce important ?
Ce n'est un secret pour personne: Cathie Wood a connu un grand succès avec sa stratégie d'investissement active depuis 2014. Depuis le lancement de son fonds commun de placement, ARK Innovation ETF, le 31 octobre 2014, un rendement impressionnant de 495% a été enregistré, indique Business Insider. Rien que l'année dernière, le rendement a été de 183%. Ce genre de personne sait quand il est temps d'entrer ou de sortir de quelque chose.Le changement de stratégie d’Ark, a-t-elle déclaré jeudi à un public de gestionnaires de fonds institutionnels, est dû au changement d’atmosphère en Chine. La situation est désormais « très différente » de celle de la fin de l’année dernière, lorsque les principaux gestionnaires d’actifs mondiaux avaient les yeux rivés sur les valeurs technologiques chinoises.
Les autorités chinoises se concentrent désormais sur les questions sociales et l' »ingénierie sociale » au détriment des marchés de capitaux, a-t-elle déclaré. Tout ce qui est jugé trop rentable par Pékin risque d’être torpillé.
Le secteur du soutien scolaire anéanti
La fondatrice d’Ark a cité comme catalyseur une série de changements réglementaires radicaux mis en œuvre par le gouvernement chinois en juillet. Ce resserrement s’est fait au détriment du secteur de l’enseignement en ligne du pays. Cette mesure, a-t-elle dit, suggère que la recherche d’une « prospérité partagée » est devenue la principale préoccupation du gouvernement.
Les lignes directrices en matière d’éducation interdisent aux entreprises à but lucratif d’enseigner les matières scolaires, ce qui a eu pour effet d’anéantir du jour au lendemain le secteur du soutien scolaire privé du pays. Ces mesures s’inscrivent dans le cadre d’une répression plus large des secteurs de la technologie, du divertissement et des jeux.
Les actions de Tencent et de NetEase, les deux plus grandes sociétés chinoises de jeux en ligne, ont fortement chuté jeudi, tandis que l’indice général Hang Seng Tech a plongé de 4,7 points de pourcentage. L’instruction donnée par les autorités au secteur de « rompre avec l’objectif unique de la recherche du profit » serait à l’origine de cette situation.
« Prospérité partagée »
« Nous n’avons pas éliminé nos positions, mais nous avons réduit drastiquement notre positionnement en Chine et nous avons échangé certaines de nos participations, devenues (en raison de la réglementation, ndlr) perdantes, contre des entreprises dont nous savons qu’elles courtisent le gouvernement sous couvert de « prospérité partagée« », a déclaré Mme Wood.
L’une des entreprises en lice pour obtenir les faveurs du gouvernement chinois est JD Logistics. Elle disposait d’infrastructures construites dans des villes de troisième et quatrième rangs, avec des marges brutes extrêmement faibles, selon Mme Wood. La société fait partie du portefeuille d’Ark.
La célèbre investisseuse a également cité la plateforme d’e-commerce Pinduoduo, qui, selon elle, a investi massivement dans le secteur de l’épicerie et les chaînes d’approvisionnement entre les fermes et les magasins. « Je pense qu’il s’agit essentiellement d’investissements gratuits pour aider le gouvernement », a-t-elle déclaré, ajoutant que certaines entreprises semblent être spécifiquement là « pour s’attirer les faveurs du gouvernement ».
Mme Wood ne pense pas que la Chine veuille se couper du reste du monde ou arrêter de se développer. Au lieu de cela, la deuxième plus grande économie du monde subirait une « réinitialisation ». « Nous pensons qu’ils repenseront certaines de ces règles au fil du temps et nous n’abandonnerons pas la Chine, parce qu’elle est très axée sur l’innovation et qu’elle a un esprit d’entreprise inhérent », a-t-elle conclu.
Économique ou éthique ?
Les commentaires de Mme Wood s’inscrivent dans le cadre du débat mondial sur la Chine, suscité par les mesures répressives prises à l’encontre du secteur technologique. La question est de savoir si investir là-bas est encore judicieux d’un point de vue économique ou éthique.
Cette semaine, le groupe d’investissement BlackRock a déclaré avoir mis de côté 1 milliard de dollars pour un fonds d’investissement en Chine. Le milliardaire George Soros a critiqué cette décision dans le Wall Street Journal, la qualifiant d' »erreur tragique ».
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