Le virologue belge de renommée internationale, Peter Piot, estime qu’il est ‘inévitable’ que le nouveau coronavirus refasse surface à l’avenir, mais il souligne que nous y sommes désormais bien mieux préparés. Il prévient toutefois que nous devrons ‘apprendre à vivre avec le Covid-19’, ce qui signifie modifier nos habitudes.
Médecin et microbiologiste d’envergure internationale, directeur de la London School of Hygiene and Tropical Medicine et désormais conseiller de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, pour la recherche sur le Covid-19, Peter Piots’est exprimé dimanche soir dans l’émission flamande ‘De zevende dag’ de la VRT concernant la suite de l’épidémie et sur une éventuelle ‘deuxième vague’.
‘Nous n’en sommes qu’au début de l’épidémie’
‘Il est inévitable que le virus revienne’, a-t-il ainsi déclaré, par vidéoconférence. ‘Il ne disparaîtra pas. Mais je ne pense pas qu’il s’agira d’une vague massive, mais de quelques retours de flammes comme on l’observe déjà en Chine et en Corée du Sud, pays qui ont été les premiers touchés. En fait, nous n’en sommes qu’au début de l’épidémie.’
Dans une interview accordée au journal Le Monde, il y a quelques jours, Peter Piot avait déjà confié ‘qu’il n’y a aucune raison qu’après avoir atteint cette ampleur, (l’épidémie) disparaisse spontanément’. ‘Nous n’avons pas encore une immunité de groupe, même en Suède, où la stratégie qui misait là-dessus a échoué’, pointait-il. ‘Ce n’est que dans un an ou deux ans que nous pourrons faire le bilan de la riposte qui aura été la plus efficace.’
‘Nous connaissons beaucoup mieux le virus’
Le scientifique de renom, qui a également l’oreille du cofondateur de Microsoft, Bill Gates, s’est néanmoins déclaré ‘assez optimiste’ dimanche sur la manière dont la suite de l’épidémie allait être gérée. ‘Maintenant que nous connaissons beaucoup mieux le virus, nous pouvons intervenir très rapidement et c’est le meilleur moyen de contenir une épidémie’, a-t-il noté sur la VRT.
‘Les pays qui ont immédiatement mis en place des dispositifs de dépistage ont eu le moins de décès’, avait-il par ailleurs détaillé dans Le Monde. ‘(En Europe), l’Allemagne a montré le chemin. Dès la fin janvier, elle disposait d’un test diagnostique et n’a pas attendu d’avoir beaucoup de cas pour l’utiliser à grande échelle. À l’autre extrême, le Royaume-Uni a réagi tardivement et a commencé à parler de mise en quarantaine pour les voyageurs quand le nombre de cas était en diminution. C’était trop et trop tard.’
‘Vivre avec le Covid-19’
Dans le grand quotidien français, Peter Piot estimait encore que nous ne devrions vraisemblablement pas revivre un épisode de lockdown comme celui que nous avons traversé au printemps. ‘Il n’est pas possible de revenir au même confinement, pas tous les deux mois…’, affirmait-il. ‘Il a des effets secondaires énormes et des répercussions sur les autres pathologies: une surmortalité par infarctus du myocarde, AVC, cancer, faute d’accès aux soins essentiels ; il y a un fort retentissement sur la santé mentale. Sans parler des problèmes économiques.’
Mais l’expert y prévenait toutefois que devrions apprendre avec le virus à l’avenir. ‘Nous devons vivre avec le Covid-19, comme nous vivons avec le VIH. Nous devons admettre que l’éradication de ce virus n’est pas réalisable actuellement (…) Cela signifie trouver des compromis entre la protection de la population et ne pas aggraver les problèmes. Il est nécessaire de modifier les comportements à grande échelle sur le port du masque, le lavage des mains et la distanciation physique.’
Peter Piot a également enjoint les autorités à concentrer leurs efforts sur les maisons de retraite, les hôpitaux, les foyers des travailleurs du secteur de la santé, les prisons… Bref, les endroits qui ont été les plus touchés par le virus dans la plupart des pays du monde.
Infecté par le virus
Reconnu mondialement pour ses recherches sur le sida et Ebola, un virus qu’il a codécouvert dans les années 1970. De 1995 à 2008, Peter Piot a notamment dirigé l’ONUSIDA, le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida. En 2014, il a été élu, avec d’autres scientifiques, ‘personnalité de l’année’ par le magazine américain Time.
Lui-même infecté par le coronavirus à la fin du mois de mars, le scientifique belge âgé de 71 ans a mis longtemps à se débarrasser du virus. Début mai, il confiait se remettre très lentement de la maladie. ‘Ce virus tue non seulement des gens, mais il peut aussi être très incapacitant, ainsi que je l’expérimente moi-même en ce moment, étant donné que je suis lentement, lentement, en train de me remettre d’un sale épisode de covid-19’, avait-il expliqué dans une courte vidéo, en marge du ‘téléthon’ organisé par l’UE pour la recherche contre le covid-19.