L’Europe se retrouve désormais avec trop de gaz: plusieurs facteurs à l’oeuvre

Durant un bref instant, les prix du gaz étaient négatifs sur le marché au comptant. Une situation invraisemblable à première vue, surtout en cette période de crise. Pourtant, en raison de plusieurs facteurs, l’Europe se retrouve bel et bien avec une surabondance de gaz, ce qui a des conséquences sur les prix. Malheureusement, cela n’est pas fait pour durer et surtout cela ne profite en réalité à personne dans ce cas précis.

Dans l’actu

  • Début de semaine, les prix du gaz naturel étaient négatifs sur le marché spot du gaz Dutch TTF. Ce qui signifie que si un client achetait du gaz à ce moment précis, il recevait de l’argent. Invraisemblable, mais pourtant vrai.

Le contexte

  • La chose parait en effet incroyable étant donné la crise énergétique à laquelle sont confrontés les consommateurs et entreprises depuis plusieurs mois.
  • Or, le fait est que les efforts des États membres de l’Union européenne pour remplir les stocks en prévision de l’hiver, ainsi que ceux de la population pour soulager les pressions sur le réseau couplé à des températures particulièrement douces pour la saison, font que la consommation est anormalement faible pour la période.
  • L’Europe se retrouve ainsi avec plus de gaz que ce que les gens consomment.
    • Les bateaux transportant du gaz naturel liquéfié font la queue au port pour tenter de livrer leur marchandise, alors que les espaces de stockage manquent. Ils « mettront probablement encore un mois à trouver un domicile pour leurs cargaisons », a estimé Felix Booth, responsable du GNL à la société de donnée Vortexa, auprès de CNN Business.
  • C’est ainsi que les prix au comptant du gaz néerlandais pour une livraison dans l’heure sont tombés sous 0 €.
  • « Les prix sont devenus négatifs en raison d’un ‘réseau surapprovisionné’ », a déclaré Tomas Marzec-Manser, responsable de l’analyse du gaz chez Independent Commodity Intelligence Services (ICIS), au média américain.

Accumulation de facteurs

  • Les dirigeants européens ont fait en sorte d’être près pour l’hiver et donc, de remplir leurs stocks au maximum, tout en sensibilisant la population à limiter leur consommation d’énergie, mais ils ne pouvaient pas prévoir des températures aussi clémentes.
  • Alors que les températures avoisinent les 20 degrés en journée, peu de chauffages sont allumés. De sorte que la demande en gaz est faible, plus qu’à la normale.
  • « Dans des pays comme l’Italie, l’Espagne, la France, nous constatons que les températures et la consommation [de gaz] se rapprochent des [niveaux] d’août et de début septembre », a déclaré Massimo Di Odoardo, vice-président de la recherche sur le gaz et le GNL chez Wood Mackenzie, à CNN Business. « Même dans les pays nordiques, au Royaume-Uni et en Allemagne, la consommation est bien inférieure à la moyenne pour cette période de l’année », a-t-il ajouté.
  • À cela s’ajoute le fait que les producteurs et livreurs ne peuvent pas stopper leurs machines en un claquement de doigts. C’est pourquoi ils préfèrent vendre à des prix négatifs, plutôt que d’arrêter leur producteur ou leur livraison. Cela leur coûterait plus cher.

De bon augure ?

  • Si sur le marché au comptant, les prix du gaz naturel ont chuté sous 0 €, cela ne signifie pas que la crise est passée, bien au contraire. Ce fut une accalmie de très courte durée. D’ailleurs, les prix ont déjà réaugmenté.
  • Les contrats à terme sur le gaz naturel européen sont toujours supérieurs à 126% à ce qu’ils étaient en octobre 2021. On note tout de même une baisse plutôt régulière des prix depuis quelques mois. Depuis le pic du mois d’août (349€ le mWh), les prix ont été plus que divisés par trois (99€ mWh au moment d’écrire ces lignes).
  • Reste que les choses pourraient évoluer dans les semaines à venir et pas forcément dans le bon sens. Les prochains mois seront certainement plus froids, de sorte que la consommation de gaz devrait fortement augmenter. De quoi faire grimper les prix du gaz.
  • Les prix devraient atteindre 150 € le mégawattheure d’ici la fin 2023, selon Bill Weatherburn, économiste des matières premières chez Capital Economics.
  • Mais c’est l’hiver prochain qui devrait véritablement poser problème. L’Europe devra certainement importer toujours plus de GNL pour préparer ses stocks pour l’hiver 2024.
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