L’exploitation minière du bitcoin est en plein essor après l’interdiction des cryptomonnaies décidée par la Chine. Mais les sociétés minières en pleine croissance sont également embêtées par les problèmes de la chaîne d’approvisionnement mondiale.
Le « minage » de cryptomonnaies, des monnaies numériques sur un code blockchain sécurisé, est devenu une affaire sérieuse ces dernières années. Pour miner ces pièces, comme le bitcoin, les mineurs ont besoin d’ordinateurs puissants qui travaillent jour et nuit. Ces machines sont constamment en train de déchiffrer le puzzle mathématique nécessaire à l’approbation des transactions.
Récompense pour l’exploitation minière
Celui qui réussit en premier crée de nouvelles cryptomonnaies en guise de récompense. Dans le cas du bitcoin, la récompense est une jolie somme de 6,25 bitcoins. À l’heure où nous écrivons ces lignes, cela représente une valeur énorme: 337.000 euros. C’est ainsi qu’est née une industrie compétitive et énergivore, composée d’entreprises remplissant des hangars entiers d’ordinateurs miniers, conçus pour effectuer le plus de calculs mathématiques possibles en un minimum de temps.
Cet été, cependant, la Chine a décidé qu’elle en avait assez de ces mineurs. Elle a notamment avancé que cet emploi polluant n’est pas conforme à la politique climatique nationale, qui vise à atteindre la neutralité carbone d’ici 2060.
Selon divers experts, il s’agit toutefois d’une erreur. La véritable raison serait beaucoup plus pragmatique. La banque centrale chinoise travaille au déploiement du yuan numérique, une monnaie numérique de la banque centrale (CBDC). Cela fonctionne aussi avec la blockchain, comme les cryptomonnaies, mais c’est complètement centralisé. Les cryptomonnaies décentralisées, et donc incontrôlables, n’intéressent pas Pékin et pourraient même menacer l’harmonie en Chine. Les mineurs ont donc dû aller voir ailleurs.
650.000 dollars par jour
L’interdiction en Chine a entraîné un exode massif des mineurs de bitcoins. C’est pourtant là qu’on avait déjà extrait 65 à 75% de tous les bitcoins. Aujourd’hui, il n’y a presque plus personne. La plupart des mineurs sont partis aux États-Unis ou se sont réfugiés dans des pays comme le Kazakhstan.
Les mineurs ont ensuite pu massivement reprendre leur travail. Cela se reflète dans le degré de difficulté des problèmes à résoudre pour extraire des bitcoins. Celui-ci s’ajuste automatiquement en fonction du nombre de mineurs sur le réseau. Cryptosite Decrypt a indiqué le 1er novembre que le niveau avait augmenté pour la huitième fois depuis l’interdiction chinoise. Et cela se reflète également dans les bénéfices des cryptomonnaies.
Le mineur de bitcoins Riot Blockchain, dans le Colorado, a annoncé qu’il avait extrait 464 bitcoins en octobre. C’est 433% de plus que l’année dernière. Ce montant représente environ 25 millions d’euros.
Bitfarms, un mineur opérant au Canada et en Argentine, a annoncé cette semaine gagner en moyenne 650.000 dollars par jour en extrayant des cryptomonnaies. En fait, c’est la société qui détient le plus de bitcoins, selon elle. Elle pense d’ailleurs que le prix de la monnaie numérique va continuer à augmenter.
Le prix des ordinateurs pour l’exploitation minière a triplé
Mais le petit monde de la crypto n’est pas uniquement baigné de soleil. Les mineurs, comme beaucoup d’autres industries, sont bloqués par le Covid-19 et les problèmes sur la chaîne d’approvisionnement mondiale. Les nouveaux ordinateurs miniers arrivent tardivement, car ils languissent pendant des semaines sur les porte-conteneurs qui font la queue pour entrer dans les ports bondés de Shanghai et de Los Angeles.
« Chaque jour où un ordinateur d’exploitation minière ne se connecte pas est une occasion manquée de générer des bénéfices », a déclaré Charlie Schumacher, porte-parole de la société d’exploitation minière Marathon Digital, basée à Las Vegas, au média économique Quartz.
En raison de ces nombreux problèmes, le prix de ces ordinateurs miniers a triplé. Cette année, Marathon a passé une commande de près de 130.000 nouveaux ordinateurs miniers à Bitmain, un fabricant chinois. Pour cela, la société a payé environ 3.000 dollars par machine. Aujourd’hui, le prix de ces mêmes ordinateurs chez ce même vendeur s’élève à 10.000 dollars pièce. Le prix d’un Antminer, l’une machines les plus utilisées, atteint même les 11.000 dollars.
Nouvelles opportunités
Pour d’autres sociétés minières, la crise a créé de nouvelles opportunités. La durée de vie moyenne d’un ordinateur minier varie entre 18 et 24 mois. Ils doivent donc être envoyés régulièrement en Chine pour être entretenus. La société minière canadienne Hut 8 a rencontré tellement de problèmes avec ce procédé, à cause des déboires des porte-conteneurs, qu’elle a commencé à réparer elle-même les ordinateurs pour le compte de MicroBT, un fabricant chinois.
« Nous sommes le seul atelier de réparation agréé pour MicroBT en Amérique du Nord et en Europe », s’est félicitée Sue Ennis de Hut 8 à Quartz. L’entreprise canadienne répare non seulement ses propres ordinateurs, mais aussi ceux d’autres sociétés minières. Ils ont même réussi à augmenter la durée de vie des mineurs à cinq ans, assure la firme.
Il semble donc que les mineurs de bitcoins continueront à gagner pas mal d’argent pour le moment, tant qu’ils restent suffisamment créatifs pour relever les défis de l’économie mondiale.