Une association regroupant plusieurs dizaines d’ONG a démontré que le secteur bancaire mondial soutenait encore massivement l’industrie du charbon par ses investissements. Et ces transferts d’argent proviennent très majoritairement de six pays, dont certains qui se veulent à la pointe de la révolution énergétique, d’autant plus depuis la COP26.
L’industrie du charbon est, comme chacun sait, la plus dommageable pour la planète et le climat, tant l’extraction puis la combustion de ce minerai noir indissociable de la révolution industrielle rejettent gaz à effet de serre et particules nocives pour la santé humaine comme pour l’environnement. Il y a peu, on pensait l’ère charbonnière en voie de s’achever, les derniers grands consommateurs, comme la Chine, tentant de s’en sevrer – du moins jusqu’aux pénuries d’énergie de l’automne dernier.
1.500 milliards investis dans le diamant noir
Sauf que dans le monde des affaires, tout le monde n’a pas tourné le dos au charbon : une analyse publiée mardi par les groupes de campagne Urgewald et Reclaim Finance, aux côtés de nombreuses autres ONG, a révélé que les banques commerciales ont canalisé 1.500 milliards de dollars vers l’industrie du charbon entre janvier 2019 et novembre de l’année dernière. Les institutions financières de six pays seulement – les États-Unis, la Chine, le Japon, l’Inde, le Canada et le Royaume-Uni – sont responsables de plus de 80 % des financements et des investissements dans le secteur du charbon.
« Ces institutions financières doivent être critiquées de toutes parts : organisations de la société civile, régulateurs financiers, clients et investisseurs progressistes », a déclaré Katrin Ganswindt, responsable de la recherche financière chez Urgewald, dans le rapport. « Si nous ne mettons pas fin au financement du charbon, c’est lui qui nous achèvera. Les banques aiment faire valoir qu’elles veulent aider leurs clients du secteur du charbon à effectuer la transition, mais la réalité est que presque aucune de ces entreprises n’effectue cette transition. Et elles ne sont guère incitées à le faire tant que les banquiers continuent à leur faire des chèques en blanc. »
Une consommation qui a rebondi avec la crise
Lors de la conférence COP26 de Glasgow, en novembre dernier, les attentes d’engagements radicaux pour le climat étaient grandes ; et elles ont largement été déçues. Sur le charbon, de nombreux pays encore fort dépendants de cette source d’énergie ont fait pression pour que l’engagement d’en arrêter totalement l’usage devienne plutôt la vague promesse d’une diminution de la consommation. Et si certains gestes de bonne volonté ont bien été esquissés, y compris en Chine, pourtant premier consommateur mondial de charbon, ceux-ci ont vite été balayés par la crise énergétique qui a suivi.
L’étude menée par Urgewald et ses partenaires se base sur les premières données de Global Coal Exit List (GCEL) mises à jour pour 2022, et donc postérieures aux engagements pris lors de la COP26. Le GCEL fait référence à une liste de 1032 entreprises qui représentent 90 % de la production de charbon thermique et de la capacité de production de charbon dans le monde, et pour les ONG, il s’agit là d’un outil essentiel pour mesurer la sincérité des engagements écologiques du monde industriel et bancaire. Les recherches des ONG montrent que si 376 banques commerciales ont accordé 363 milliards de dollars de prêts à l’industrie du charbon entre janvier 2019 et novembre 2021, 12 banques seulement représentaient 48 % du total des prêts accordés aux entreprises charbonnières listées dans le GCEL. Le premier or noir est toujours rentable, malgré qu’il soit aussi toujours aussi nocif.