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Le 12 Mars dernier, Vladimir Poutine aurait déclaré à Moustafa Djemilev, un leader des Tatars de Crimée, que la déclaration d’indépendance de l’Ukraine en 1991 n’avait pas respecté « la procédure soviétique prévue pour quitter les structures de l’URSS ». Cette déclaration suggère que le président russe envisage de remonter l’Union soviétique, mais la vérité est plus complexe que cela, affirme Sylvie Kaufmann du journal français Le Monde.
Au cours de sa troisième campagne présidentielle, Poutine a déclaré que « La phase post-soviétique de l’histoire russe et mondiale est désormais close ». Il réalise donc que l’ère de l’URSS est bien révolue, et il voit les deux décennies qui ont suivi la chute de l’Union soviétique comme une période de « guérison », qui est désormais achevée. La nouvelle Russie doit maintenant se « tenir fermement debout » et « faire valoir ses intérêts ».
Les actions de Poutine en Ukraine mènent à un bouleversement de l’équilibre géopolitique qui aboutira à un ‘nouvel ordre mondial’. Kaufmann cite 9 aspects de ce bouleversement :
✔ Le retour des Etats-Unis en Europe. Les Américains avaient laissé les dirigeants européens s’assurer de la sécurité de l’Europe, mais la crise en Ukraine les a obligés à revenir sur le devant de la scène européenne. La visite de Joe Biden, le vice-président américain, en Pologne et en Lituanie, deux Etats voisins de la Russie et inquiets de ses velléités territoriales, s’est accompagnée de l’arrivée de plusieurs F16 américains en Pologne.
✔ Les divisions au sein de l’UE. Les États membres individuels ont chacun une politique étrangère totalement différente à l’égard de la Russie en raison de leur dépendance éventuelle au gaz russe, ce qui complique le processus de décision.
✔ La fin de l’Ostpolik. Les tentatives de dialogue de la chancelière Merkel avec Poutine ont totalement échoué, ce qui signifie la fin de l’attitude conciliante de l’Allemagne à l’égard de la Russie. En outre, sur le continent européen, ce n’est plus le Royaume Uni, la France ou l’UE qui ont mené les négociations avec la Russie, mais l’Allemagne.
✔ L’isolement de la Russie. Vladimir Poutine a été le seul à mettre son veto sur la résolution de l’ONU portant sur l’illégalité du référendum en Crimée, ce qui démontre que son pays est isolé. Aucun des 14 autres pays n’a soutenu Moscou.
✔ Le choix de la Chine. Même si elle n’aime pas les émeutes de rue, la Chine considère que le principe de l’intégrité territoriale est essentiel. Lors du vote sur la résolution de l’ONU, la Chine s’est donc abstenue. Contrairement au président Poutine, Xi Jinping n’est pas prêt à sacrifier les avantages de la mondialisation pour gagner plus de puissance et de prestige.
✔ La réticence des anciennes républiques soviétiques. Noursoultan Nazarbaïev, le dirigeant du Kazakhstan, et ceux des autres ex-républiques soviétiques, ne se sont guère enthousiasmés de l’annexion de la Crimée. Nul doute que le vœu de Poutine de « protéger les Russes et les russophones » les inquiète, en raison de la présence de communautés russophones dans leurs propres pays.
✔ Le malaise des institutions internationales. Le conseil de sécurité de l’ONU a été bloqué par le veto russe. Le G8 doit se tenir en Juin à Sotchi, mais les dirigeants occidentaux semblent désormais lui préférer le G7 (Le G8 sans la Russie). L’OCDE rejette maintenant la candidature de la Russie qui souhaitait y adhérer.
✔ Une possible remise en cause du désarmement nucléaire. En 1994, l’Ukraine avait cédé l’armement nucléaire soviétique qui se trouvait sur son territoire en échange de garanties de protection. Cette promesse non tenue crée un précédent négatif pour les pays que l’Occident tente de dissuader de se lancer dans la course à l’armement nucléaire, comme l’Iran, par exemple.
✔ Un nouveau paysage énergétique. Cette crise politique pourrait déboucher par la recherche de l’indépendance énergétique des pays européens clients de Gazprom à l’égard de la Russie.