Pénurie de médicaments, nombre de tests, choix des labos qui les analyseront… Le ministre Philippe De Backer (Open VLD), en charge de la lutte matérielle contre le covid-19, n’est plus épargné par la critique.
Son introduction comme ministre en charge de la ‘task force’ par l’Open VLD était perçue comme une réponse aux critiques subies par Maggie De Block, ministre de la Santé. Sa tâche n’était pas simple: se mettre à la recherche des matériaux indispensables à la lutte contre le coronavirus, notamment des masques, du gel hydroalcoolique, des tests ou des respirateurs.
Les premières critiques se sont cristallisées autour des tests. Depuis le 26 mars, 10.000 tests par jour ont été promis. Ce mardi (14 avril), on a enfin atteint ce qui doit désormais être un plancher, avec 13.000 tests, principalement à destination des maisons de repos, mais aussi dans les hôpitaux.
Ce mercredi, pendant près de 4 heures, le ministre a répondu aux questions des députés de la Commission Santé de la Chambre, présidée par Thierry Warmoes (PTB). Au menu: testing, masques, tracing, médicaments ou encore maisons de repos.
Le ministre a confirmé que 200.000 tests seraient réalisés dans les maisons de repos dans les prochaines semaines, à destination des patients et du personnel. Les critères sont en outre élargis aux généralistes. Bien.
Son choix de privilégier les grandes firmes pharmaceutiques au détriment de 45 laboratoires cliniques locaux pour analyser les tests a soulevé davantage d’interrogations.
L’invité surprise
C’est ce que soulevait mercredi assez maladroitement un journaliste lors de la conférence de presse de Sophie Wilmès, suite au Conseil national de sécurité. Alexandre Penasse est un journaliste professionnel travaillant pour Keirospresse. Il a été porté aux nues par certains sur Facebook pour son culot avant de se faire détruire dans la foulée par d’autres – il est accusé d’avoir écrit des articles complotistes sur ‘le terrorisme occidental’, des textes sexistes, voire transphobes, ou encore des textes complaisants sur la réelle implication de Bachar el-Assad dans le conflit syrien – que ce soit sur Facebook et encore davantage sur Twitter, confrontant plusieurs camps à gauche.
Pour la parenthèse, Kairospresse se définit comme un journal anti-productiviste. Son journaliste a mêlé dans une question des accusations de conflit d’intérêts, des éléments de la gestion de crise et… la 5G. Se définissant comme seul ‘vrai’ journaliste qui pose ‘les vraies questions’, Alexandre Penasse a plutôt été remis à sa place par la Première ministre, masquant du même coup l’intérêt de sa question, légitime au demeurant.
En Commission, le ministre De Backer, accusé d’être à la solde du big pharma, a défendu son choix. Selon lui, les laboratoires locaux ne pouvaient pas garantir leurs capacités à absorber le flux de tests à analyser, à leur grande stupéfaction. L’industrie pharmaceutique serait par contre prête à absorber ces tests, qui plus est au prix coûtant et suivant un protocole uniformisé, rapporte Belga. De ce fait, le fédéral n’achètera que le réactif.
En outre, l’Allemagne, qui applique une politique de tests massive (500.000 par semaine), a elle aussi fait appel au tissu industriel, avec une certaine efficacité.
Le ministre a par contre confirmé son choix de sélectionner deux entreprises belges pour la confection de masques chirurgicaux et FFP2. Deux entreprises flamandes – le communautaire n’est jamais loin – mais De Backer a promis de rester attentif aux projets wallons.
Les médicaments
Les critiques autour du ministre De Backer ne se limitent toutefois pas aux tests ou à ses choix pour les analyser. Des pénuries de médicaments sont pointées par l’Absym, l’Association belge des Syndicats Médicaux, contredisant ainsi les affirmations du ministre et l’accusant de ‘mauvaise gestion’.
‘Il n’y a actuellement pas de pénurie de médicaments qui empêche le traitement de patients Covid-19 en Belgique’, a rétorqué l’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS), dans des propos relayés par Belga.
L’Absym conteste en fait un délai de 48 heures accordé aux hôpitaux. Ils ne peuvent effectuer leur demande de réapprovisionnement que deux jours avant la rupture de stock des médicaments. Ce qui contraint les hôpitaux, selon l’Absym, a devoir choisir des médicaments de substitution non appropriés. En outre, il faudrait parfois cinq jours pour que les médicaments arrivent à destination, ce que l’AFMPS conteste: ‘Nous avons répondu à 200 demandes qui ont toutes été résolues dans les temps impartis.’
Le Dr Philippe Devos, chef des soins intensifs au CHC de Liège et président de l’Association belge des syndicats médicaux (Absym), accuse même l’Agence fédérale de fournir des anesthésiques pour animaux. C’est désormais une guerre ouverte.
Le ministre n’a pas encore éteint la polémique. Il a toutefois expliqué qu’un stock suffisant d’hydroxychloroquine et de chloroquine a été réparti vers tous les hôpitaux pour traiter plus de 30.000 patients. Et qu’une quantité stratégique supplémentaire est disponible.
Il rapporte aussi que tous les hôpitaux ont reçu des lots du stock stratégique de curare (substance utilisée pour relâcher les muscles des personnes intubées), auxquelles viendront s’ajouter 50.000 lots supplémentaires. Il précise enfin que la répartition se fait sur base du nombre de lits en soins intensifs des hôpitaux. L’AFMPS a de cette manière réparti 20 différentes sortes de médicaments.