Le logiciel de reconnaissance faciale des policiers de Londres se trompe dans 96 % des cas

A Londres, le recours de la police à la technologie de reconnaissance faciale montre ses failles. La police métropolitaine de Londres a mené des tests dans la capitale entre 2016 et 2018. Il s’est avéré que dans 96% des cas, le logiciel de reconnaissance faciale avait abouti à des faux positifs.

En d’autres termes, dans la grande majorité des cas, le logiciel a averti à tort la police qu’une personne circulant dans la zone scannée correspondait à une photo de la base de données de personnes recherchées.

En 2018, le groupe Big Brother Watch (BBW), organisation britannique à but non lucratif qui milite pour les libertés civiles et la vie privée, avait engagé une procédure judiciaire contre le déploiement de cette technologie. Après avoir eu accès aux chiffres de la police grâce aux lois britanniques sur la liberté d’information, BBW avait expliqué que 100% des correspondances effectuées par les scanners de reconnaissance faciale depuis plusieurs mois étaient inexactes.

Transparence

Selon la police londonienne, le logiciel controversé pourrait aider à traquer les délinquants recherchés et réduire la violence. Toutefois, selon les critiques, il s’agit d’un gaspillage d’argent public et le dispositif violerait les droits de l’homme. Selon la police, les différentes expériences avec ce logiciel ont été menées en toute transparence.

« Toutes les alertes de la liste de surveillance sont supprimées au bout de 30 jours et les visages du flux vidéo qui ne génèrent pas d’alerte sont supprimés immédiatement », a expliqué un porte-parole. Mais selon Big Brother Watch, la reconnaissance faciale en direct transforme les citoyens en carte d’identité vivantes et est effrayante. En outre, de nombreux citoyens ne savent pas qu’ils font l’objet d’une reconnaissance faciale. Les militants accusent également la police d’utiliser cette technologie dans le secret.

L’année dernière, deux essais à l’extérieur d’un centre commercial à Stratford ont abouti à un taux d’échec de 100%. Selon des observateurs, un écolier noir de 14 ans a dû fournir ses empreintes digitales après une mauvaise identification.

La police aurait également arrêté des personnes des passants dont le visage étaient couverts ou qui portaient une cagoule. Un homme a été condamné à une amende pour atteinte à l’ordre public après avoir refusé d’être scanné à Romford.

BBW plaide donc pour l’abandon de l’usage de cette technologie par la police.

« C’est un tournant pour les libertés civiles au Royaume-Uni. Si la police continue à utiliser la reconnaissance faciale, le public pourrait être tracé à travers les réseaux colossaux de vidéosurveillance britanniques », a déclaré Silkie Caro, directrice de Big Brother Watch.

« Pour un pays qui s’oppose aux cartes d’identité et refuse d’avoir une base de données ADN nationale, la notion de reconnaissance faciale en direct transforme les citoyens en cartes d’identité vivantes. La police britannique est en train de donner un exemple dangereux aux pays du monde entier. Ce serait désastreux pour la police et l’avenir des libertés civiles. »

Interdiction

Big Brother Watch a collecté 10.000 livres afin de mener une action en justice pour interdire le recours à la reconnaissance faciale par la police. Selon BBW, la reconnaissance faciale enfreint les droits fondamentaux personnes, viole leur vie privée et entrave la liberté d’expression.

La police métropolitaine admet cependant que la précision de cette technologie n’est pas encore parfaite. « Cependant, lors de l’utilisation de cette technologie, des contrôles supplémentaires sont toujours effectués avant que la police ne prenne des mesures. La décision finale de dialoguer avec un individu identifié par la reconnaissance faciale est toujours prise par un humain », a déclaré un porte-parole de la police.

Selon la police, les tests font actuellement l’objet d’une évaluation indépendante dont les conclusions seront rendues publiques.

« Nous comprenons que le public s’attend à juste titre à ce que cette technologie soit examinée minutieusement et utilisée légalement. Cependant, la technologie évolue constamment et nous nous efforçons de garantir une technologie aussi précise que possible. »

Les policiers du sud du Pays de Galles et du Leicestershire auraient également eu recours à la reconnaissance faciale. Ailleurs dans le pays, plusieurs forces de police comparent également les images de suspects potentiels avec des bases de données numériques.

Nick Hurd, ministre britannique de la police, a souligné que le gouvernement soutenait de tels projets pilotes. Selon lui, la reconnaissance faciale offre de réelles opportunités. « Les comités parlementaires et les organismes de surveillance ont mené des enquêtes approfondies sur les questions relatives à la protection de la vie privée », a déclaré le ministre. « Le ministère de l’Intérieur travaille également avec la police pour améliorer encore les procédures utilisées. »

« La Grande-Bretagne n’est pas et ne sera pas un Etat de surveillance », a déclaré Hurd. « Nous devons utiliser les nouvelles technologies en tenant compte de leur impact sur la vie privée, et veiller à ce que leur utilisation soit proportionnée. »

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