Le gouvernement américain demande la levée temporaire des brevets sur les vaccins, l’UE lui emboîte le pas

Pour ceux qui l’ont manqué, Pfizer a récemment annoncé ses résultats trimestriels. On a appris que la société pharmaceutique avait enregistré un chiffre d’affaires record de 3,5 milliards de dollars sur la vente de ses vaccins contre le Covid-19. Sur une base annuelle, l’entreprise prévoit un chiffre d’affaires de 26 milliards de dollars en 2021.

Des centaines de millions de dollars de bénéfices sont réalisés via la vaccination, 900 millions de dollars selon le New York Times. La position que Caroline Ven, du lobby Farma.be, a tenue la semaine dernière sur Radio 1, selon laquelle les producteurs de vaccins ‘travaillent sur base du prix de revient’, peut donc être définitivement mise à la poubelle. Pfizer et Moderna font tous deux de gros profits avec leurs vaccins, et ils ne tournent pas autour du pot. Seuls AstraZeneca et Johnson & Johnson affirment travailler ‘au prix coûtant’ et donc ne réaliser aucun bénéfice sur les vaccins.

Quoi qu’il en soit, les chiffres de Pfizer – qui compte encore vendre des vaccins pendant des années et vise un chiffre d’affaires total de 72,5 milliards de dollars cette année – ont constitué un argument de plus pour ouvrir le débat sur les brevets des grands acteurs pharmaceutiques.

Une large coalition de pays, menée par l’Inde et l’Afrique du Sud, fait pression en ce sens depuis un certain temps au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Cela permettrait, surtout dans les pays du tiers monde, de produire plus rapidement des vaccins de bien meilleure qualité, comme une sorte de ‘produit blanc’.

Jusqu’à présent, les États-Unis et l’Union européenne s’étaient abstenus de donner suite à ces revendications. Mais hier, l’équipe du président Joe Biden a annoncé qu’elle allait changer de cap et plaider pour une levée temporaire du brevet: une ‘dérogation’, comme on l’appelle.

Cela signifie que le débat au sein de l’UE peut désormais être mené d’une manière totalement différente. La gauche exhorte l’UE à faire de même depuis un certain temps. En Belgique, la ministre fédérale de la Coopération au développement Meryame Kitir (Vooruit) a fait un plaidoyer similaire, mais elle n’a pas réussi à obtenir l’accord des libéraux au sein du gouvernement.

La Belgique possède une industrie pharmaceutique solide, avec de grands sites de production pour Pfizer et Johnson & Johnson. Ceux-ci sont farouchement opposés à la suspension des brevets: cela profiterait certainement aussi à des pays comme la Chine. Ils auraient alors soudainement accès à une technologie vaccinale de bien meilleure qualité.

La réaction de l’UE ne s’est pas fait attendre: Ursula Von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, a annoncé ce matin qu’elle souhaitait ‘entamer un dialogue’ sur la suspension des brevets. Cependant, dans la pratique, c’est loin d’être la panacée. Il faudra des mois, voire des années, avant que d’autres fabricants soient en mesure de produire des vaccins équivalents.

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