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Le F-35 poursuit sa conquête de l’Europe, sans pitié pour la France

Le F-35 poursuit sa conquête de l’Europe, sans pitié pour la France
Een Nederlandse F-35 op de luchtmachtbasis van Leeuwarden (Foto: ROBIN VAN LONKHUIJSEN/ANP/AFP via Getty Images)

La République tchèque est le dernier pays (pour l’instant) dans la liste des clients de l’entreprise américaine Lockheed Martin. Le pays achète 24 F-35. Ce n’est pas une bonne nouvelle pour les grands acteurs européens de la défense.

Pourquoi est-ce important ?

De plus en plus de pays européens choisissent le F-35 comme nouvel avion de combat. Construit par le fabricant américain Lockheed Martin, celui-ci un chasseur multirôle : il peut être utilisé pour toutes sortes de missions, y compris le combat aérien, le bombardement ou même la guerre électronique. Les capacités furtives de l'avion sont peut-être encore plus importantes : sa forme et sa composition le rendent très difficile à repérer, même avec les meilleurs radars.

Dans l’actualité : Le gouvernement tchèque approuve l’achat du F-35, la Roumanie pourrait suivre prochainement.

  • Au total, la Tchéquie achètera 24 F-35, pour un contrat à 6,5 milliards de dollars. Cela représente également le plus gros contrat de défense jamais conclu par le pays. Cependant, près d’un tiers du contrat reviendra à son propre secteur industriel. Déjà 13 entreprises et universités tchèques ont conclu un accord avec Lockheed Martin ou le fabricant de moteurs Pratt & Whitney, pour pouvoir produire eux-mêmes des composants.
  • En Roumanie aussi, la décision d’acheter le F-35 doit être prise incessamment sous peu. L’achat a déjà été approuvé par le gouvernement roumain et le gouvernement américain, on attend encore un ‘oui’ définitif du parlement de Bucarest. Le pays achètera d’abord 32 F-35. Dans une seconde phase, 16 autres devraient s’y ajouter, pour un total de 48.

12 acheteurs européens

Les chiffres : en incluant la Tchéquie et la Roumanie, les forces aériennes de 12 pays européens voleront bientôt sur des F-35.

  • Les États-Unis ne construisent pas entièrement seuls le F-35. Pour un projet de cette envergure, d’autres pays ont été invités à investir, et donc à adopter également l’avion. En échange, des entreprises de ces pays ont pu fabriquer des composants, ou Lockheed Martin a prévu d’installer des centres logistiques.
  • Le Royaume-Uni était le partenaire principal dans le développement. Dans le tier 2 se trouvent l’Italie et les Pays-Bas, suivis par le Danemark et la Norvège dans le tier 3.

Des contrats qui se succèdent

  • Outre les pays qui ont participé au développement (et donc acheté des F-35), il y a aussi des contrats d’exportation « classiques ». Ainsi, la Belgique, la Finlande, l’Allemagne, la Pologne, et la Suisse ont décidé d’acheter des F-35. La Tchéquie et la Roumanie complètent la liste.
  • Mais même à l’avenir, le F-35 a beaucoup de potentiel sur le marché européen. Par exemple, l’armée de l’air grecque doit chercher un remplaçant pour le F-4 Phantom et le F-16 Fighting Falcon, et le F-35 semble être le choix logique. Le Portugal doit également décider, dans les années à venir, par quel appareil il va remplacer sa flotte de F-16. L’Espagne est également sur la liste des acheteurs potentiels. Tant les F-18 de l’armée de l’air que les AV-8B Harriers de la marine doivent être remplacés. Pour ce dernier avion, qui peut décoller verticalement et est utilisé sur le navire porte-hélicoptères Juan Carlos I, le F-35 est vraiment la seule option disponible. Et l’Ukraine a aussi exprimé son intérêt pour le F-35, bien que cela ne sera guère dans un futur proche.
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Pas de concurrence sérieuse

L’essentiel : le F-35 unit l’Europe, mais la divise en même temps. Il est remarquable que tant de pays européens choisissent un avion de combat américain. En Europe, il existe trois autres choix possibles :

  • le Dassault Rafale français,
  • le Saab JAS 39 Gripen suédois,
  • l’Eurofighter Typhoon, construit par un consortium d’Airbus (France, Allemagne et Espagne), Leonardo (Italie) et BAE Systems (Royaume-Uni).

Cependant, on ne peut pas vraiment appeler ces avions des concurrents. Le Rafale, le Gripen et le Typhoon ont tous volé pour la première fois dans les années 80, et appartiennent en réalité à la 4e génération d’avions de combat. Des développements ultérieurs ont amené ces jets à un niveau où ils peuvent encore aujourd’hui tenir leur place dans les combats, mais le F-35 (un avion de cinquième génération) reste tout de même un cran au-dessus.

Pour beaucoup de pays européens, qui regardent vers un investissement pour l’avenir, le F-35 est tout simplement le meilleur choix disponible. Cet appareil en est encore à ses débuts. Il pourra, au cours des prochaines décennies, devenir une plateforme mature, capable de coopérer étroitement avec les troupes au sol, d’autres avions et des drones. C’est quelque chose que les avions européens ont beaucoup plus de mal à offrir. Et cela suscite la grande colère de la France en particulier, qui encourage ses voisins continentaux à « acheter européen ». Et par européen, on entend surtout « français ».

Pain bénit pour les Américains

À l’avenir, l’industrie aéronautique européenne devra surtout vivre de son engagement dans le F-35. Les projets propres sont plutôt difficiles dans l’ensemble.

  • Dans les années à venir, les forces aériennes de la France, de la Suède et de l’Espagne continueront de compter sur leurs Rafale, Gripen et Typhoon. Ces avions sont également constamment mis à jour. La France veut ainsi utiliser la version Rafale F5, qui doit sortir de la chaîne à partir de 2030, jusqu’au milieu des années 2060.
  • Cependant, tôt ou tard, un tel avion devient obsolète, et il faut chercher un successeur. Les Français ont ainsi déjà lancé, avec l’Allemagne et l’Espagne, le projet SCAF pour construire un avion de 6e génération.
  • Les Britanniques, avec l’Italie et le Japon, travaillent sur une piste parallèle, appelée GCAP. Mais aux États-Unis aussi, ils travaillent déjà intensivement sur un avion de combat de 6e génération, le NGAD (Next Generation Air Dominance). Celui-ci doit accompagner le F-35 et éventuellement le remplacer à terme.

Un avion amené à dominer les cieux ?

  • Cependant, ces projets européens sont très difficiles à mener à bien. Au sein du SCAF, il y a déjà des mois de discussions sur la répartition du travail. En réalité, Dassault, l’entreprise française, veut attirer à elle le plus de travail possible. En même temps, son PDG Eric Trappier estime que le SCAF n’est absolument pas une priorité pour l’entreprise, puisqu’elle va d’abord travailler sur le Rafale F5. Le fait que l’Allemagne a décidé d’acheter une flotte de F-35 rend le projet SCAF encore plus difficile.
  • Donc, les chances sont grandes que le F-35 continuera de dominer le marché européen dans les années à venir.
  • Les développements de 6e génération restent incertains, surtout en comparaison avec le NGAD américain, un projet qui avance rapidement. Pour l’industrie aéronautique européenne, le F-35 est du pain bénit ; pas comme un projet propre, mais comme un projet auquel ils peuvent participer.
  • Les autres concurrents du F-35 sont le Su-57 russe et le J-20 chinois. Mais ces modèles n’ont pas encore de réelle présence sur le marché international, en grande partie à cause des sanctions politiques et économiques contre ces pays. En conséquence, le F-35 reste le choix le plus logique pour de nombreux pays, bien qu’il soit aussi très coûteux.

MB

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