Le « Système de combat aérien du futur » des Européens enfin prêt à décoller ?

Paris, Berlin et Madrid veulent mettre au point un chasseur européen et un nouveau système rendant compatibles tous les appareils de combat du continent. Mais depuis un an, le dossier est cloué au sol, tant par manque de coopération entre les entreprises qu’entre les États concernés. Il semble que les tensions géopolitiques lui retirent ses entraves.

Le contexte

L’Union européenne se rêve en acteur géopolitique à part entière, alliée des États-Unis, mais affranchie de toute dépendance à leur égard dans la sphère militaire. Or, on en est loin, malgré quelques grands projets multinationaux tels que le SCAF, ou « système de combat aérien du futur« . Aussi ambitieux soient-ils, les industriels européens de l’armement ont du mal à se mettre d’accord. Du moins jusqu’à présent.

  • Le SCAF n’est pas simplement un nouvel avion de chasse typiquement européen, même si celui-ci est effectivement aussi dans les cartons sous le nom de NGF (new generation fighter), dont le premier prototype est attendu pour 2027, bien que son entrée en service ne soit prévue que pour 2040. Il s’agit aussi de tout un système d’armes, qui permettra d’interconnecter les différents avions de chasse et drones utilisés par les armées européennes afin de les rendre plus aptes à opérer ensemble. Vaste programme, alors qu’il n’y a jamais eu de vrai programme de défense commun à l’échelle de l’UE.
  • Le programme doit être mené à bien conjointement par les Français de Dassault Aviation et les Allemands d’Airbus Defence and Space. Mais ça coinçait entre les deux avionneurs, Dassault se targuant d’être capable de bâtir seul un avion de combat 100% européen capable de devenir un succès commercial, comme son fameux Rafale.
  • Du côté politique, on ne peut pas non plus parler de grande amitié franco-allemande. Les Français rappellent régulièrement qu’ils ont le savoir-faire pour faire cavalier seul, voire s’ériger en pilier de la défense européenne, mais pendant ce temps les Allemands concluent de nouveaux partenariats dans le cadre de l’OTAN, mais dans le dos de Paris. C’est le cas récemment avec un projet de bouclier antimissile, qui s’ajoute aux nombreux sujets qui font vaciller le couple franco-allemand.

L’actualité

La situation semble se débloquer entre les deux entreprises, qui seraient sur la voie d’un accord pour relancer le programme.

« Le leadership de Dassault sur le NGF n’est en aucun cas remis en cause. Les discussions, qui d’ailleurs avancent de façon constructive, portent sur le type de coopération que les 3 États demandent aux industriels de mettre en place, que ce soit sur le NGF ou sur toutes les sous-parties (appelés « piliers ») du SCAF: combat cloud, moteur, drone, capteurs… »

Un porte-parole d’Airbus auprès de BFM Business
  • Si Airbus et Dassault se partagent les tâches, le SCAF est un projet qui réunit l’Espagne en plus de la France et l’Allemagne. Lancée en 2017, cette collaboration vient d’accuser une année complète de retard.
  • Mais les nouveaux enjeux géopolitiques – en premier lieu les relations tendues avec la Russie – devraient peser sur la prise de décision pour relancer le concept. Ces dernières semaines, des responsables français comme allemands ont réaffirmé leur volonté de mener à son terme ce programme.

« Beaucoup de choses ont été dites ou écrites ces dernières semaines, je crois que d’une phrase, nous allons y couper court en disant que le SCAF est un projet prioritaire »

Sébastien Lecornu, ministre français des Armées

Le détail : il n’est pas exclu que la rencontre entre Emmanuel Macron et Olaf Scholtz à Paris, ce mercredi, ait servi de ferment à ce regain d’intérêt pour ce projet de système d’armes. Cette réunion de plus de trois heures qui s’est conclue par un tête-à-tête entre le président et le chancelier devrait conduire ces prochaines semaines à « une très bonne et très intensive coopération » selon un son de cloche allemand. Côté français, on parle d’un échange « très constructif ». Il est en effet peu probable que les deux chefs d’État n’aient pas abordé le sujet de la défense conjointe de l’Europe, dans un contexte géopolitique aussi incertain.

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