La population suisse se prononce contre le port de la burka

Les Suisses se rendaient aux urnes pour une nouvelle votation le week-end dernier. Les citoyens devaient se positionner pour ou contre le port d’un voile cachant en partie le visage. Les raisons sanitaires constituant une exception, le masque buccal médical n’entrait pas en ligne de compte. La loi visait principalement les signes religieux que sont le niqab et la burka.

Cette votation émanait de la population elle-même. Une pétition d’au moins 100.000 signatures avait été rendue aux autorités nationales pour qu’un référendum soit organisé. Le parlement et le gouvernement se sont positionnés contre cette loi, interdisant le port d’un masque sans motif valable, mais cela n’a pas empêché les Suisses de voter en sa faveur à une courte majorité: 51,2% contre 48,8%.

Dans les termes de la loi, les vêtements religieux que sont la burka et le niqab ne sont pas explicitement cités. Il s’agit aussi d’éviter que lors de manifestations, des personnes se cachent trop fortement le visage au point de ne pas pouvoir être reconnues. Mais dans les faits, les musulmans suisses étaient directement visés.

Pour l’interdiction

Cette loi ne touchera qu’une ‘infime’ partie de la population. Selon la ministre de la Justice Karin Keller-Sutter, seules quelques dizaines de femmes portent ces vêtements traditionnels en Suisse.

Mais pour les personnes favorables à cette interdiction, il s’agit surtout du respect des valeurs suisses. ‘Les couvertures faciales sont contraires à notre système de valeurs’, avait affirmé Walter Wobmann, du Parti populaire suisse de droite, à la télévision. Selon un autre membre de ce parti, Jean-Luc Addor, le niqab et la burka sont des symboles d’un islam radical, qui est un défi pour la société suisse, mais aussi pour les autres musulmans.

De nombreux musulmans étaient d’ailleurs favorables à leur interdiction. Saida Keller-Messahli, fondatrice du Forum pour un islam progressiste a d’ailleurs applaudi le résultat de cette votation, indiquant qu’il montrait le rejet d’une ‘idéologie totalitaire qui n’a pas sa place dans une démocratie’.

Contre l’interdiction

Mais d’autres membres de la communauté musulmane n’ont pas vu cette votation de la même manière. Pour Ferah Ulucay, secrétaire général du Conseil central islamique de Suisse, le résultat a donné l’opportunité d’ancrer une certaine ‘islamophobie dans la Constitution’. L’interdiction du port d’un voile cachant le visage rappelle douloureusement à certains musulmans une votation de 2009. À l’époque, l’érection de minaret a été interdite en Suisse.

Amnesty International s’était également opposée à cette interdiction. L’association considère que cette politique ‘viole les droits des femmes, y compris la liberté d’expression et de religion’. Des mouvements féministes suisses ont la même vision des choses. Pour la sociodémocrate Tamara Funiciello, ce n’est qu’un autre exemple de décisions interdisant aux femmes ce qu’elles peuvent porter ou faire. Elle ajoute que cela ne changera rien aux vrais problèmes de société: le sexisme, le racisme et la violence.

Et ailleurs?

En Europe, la Suisse n’est pas le premier pays à interdire la burka. La France, la Belgique, les Pays-Bas, le Danemark, l’Autriche et la Bulgarie ont pris des décisions similaires contre ces vêtements religieux couvrant le visage.

La Belgique a voté sa loi dite ‘anti-niqab’ en juillet 2011, peu après la France. Cette règle ne toucherait que quelques centaines de musulmanes dans le pays. Plusieurs d’entre elles se sont rendues jusqu’à la Cour européenne des droits de l’homme pour faire annuler cette loi. Mais leur demande a été rejetée affirmant que le but de cette loi, c’est-à-dire la préservation du ‘vivre-ensemble’, était légitime dans une société démocratique.

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