L’OPEP+ a grandement diminué les quotas de production de pétrole, il y a une semaine. Il s’avère qu’une des raisons pour cette décision pourrait être de dissuader le monde de suivre le plan du G7 d’un plafond sur les prix du pétrole. Un tel plafond pourrait créer une crise sur le marché, craignent de nombreux acteurs.
Les deux millions de barils de pétrole par jour que l’OPEP+ a décidé de produire en moins sur le mois de novembre n’ont pas fini de faire parler d’eux. Les coulisses de la décision remontent peu à peu à la surface, tout comme les aspects (géo-)politiques qui ont pesé dans la balance.
C’est la ministre indonésienne des Finances Sri Mulyani Indrawati (l’archipel est un ancien membre de l’organisation, soit dit en passant), qui fait ces observations : la décision aurait probablement été prise en lien avec le projet du G7 de plafonner le prix du pétrole russe (la Russie, elle, est membre de l’OPEP+). Des sources saoudiennes lui ont notamment fait part de leur inquiétude par rapport à ce plafond, rapporte Bloomberg.
Marché
Expliquons. Le G7, sur une proposition de Washington, veut imposer un plafond des prix sur le pétrole russe. La Russie a déjà indiqué qu’elle refuserait un tel plafond, et ne fournirait plus les pays qui suivent ce plan. Des quantités énormes de pétrole pourraient ainsi disparaître du marché, ce qui provoquerait une très forte hausse des prix de l’or noir, à échelle mondiale.
L’OPEP n’est pas opposée à une hausse des prix (c’est d’ailleurs une des raisons de la réduction des quotas de production : garder les prix élevés dans un contexte de chute de la demande) mais des prix trop élevés ne sont pas bons pour les affaires, car ils peuvent détruire la demande tout court.
La Chine et l’Inde, où la Russie essaie, tant bien que mal, de refourguer son pétrole que l’Europe va boycotter dès la fin de l’année, n’ont pour l’instant pas exprimé leur soutien au plan du G7. C’est là qu’intervient alors la baisse de production de l’OPEP (qui n’a pas du tout plu à l’Occident) : comme un message de dissuasion, pour ne pas créer encore d’autres baisses de la disponibilité du pétrole (avec l’adoption du plafond).
De plus, Saudi Aramco a prévenu qu’il ne restait pas beaucoup de capacité de réserve pour augmenter la production d’or noire dans le monde, en cas de besoin, rapporte MoneyWise. L’entreprise donne l’exemple d’une ouverture en Chine (encore marquée de confinements réguliers), d’une reprise générale de la demande si la récession est moins pire que ce que l’on estime, ou d’une augmentation de la demande pour le kérosène, comme relance de la demande. Dans ce cas, « vous allez éroder cette capacité de réserve, et le monde devrait être inquiet. Il n’y aura pas de place pour un quelconque hoquet – une quelconque interruption, un quelconque événement imprévu partout dans le monde », avertit le CEO Amin Nasser, lors d’une conférence à Londres ce mardi.
Risques pour l’économie mondiale
Indrawati n’est d’ailleurs pas une fan du plafond non plus. La ministre craint que cela ne cause des dommages à l’économie mondiale (à cause de cette explosion potentielle des prix), et ouvre la voie à d’autres sanctions de ce type, pour d’autres matières premières.
Concernant des restrictions sur des matières premières nécessaires à l’économie mondiale, l’Indonésie n’est cependant pas en reste. Après le début de la guerre en Ukraine, le prix des huiles végétales a explosé, et l’Indonésie, producteur numéro 1 d’huile de palme, a interdit les exportations de cette huile, dans un état d’esprit protectionniste. Le pays, assis sur la plus grande réserve de nickel du monde, a également interdit l’exportation de ce métal nécessaire à la transition énergétique (dans un esprit plus business tout de même : pour créer des industries de batteries locales).