La Défense américaine veut envoyer des fusées à propulsion nucléaire vers la Lune : premier vol prévu pour 2026

L’un des grands enjeux de l’exploration spatiale reste la question du décollage des fusées depuis la Terre : pour surmonter la force de gravité, chaque newton de poussée compte, alors que chaque kilogramme supplémentaire à bord tire l’engin vers le bas. Dans cette optique, le choix du carburant demeure crucial, et il faut trouver le juste milieu entre puissance, encombrement… Et réduction des risques.

L’idée de nous propulser vers l’espace grâce à l’énergie atomique n’est pas nouvelle ; c’était même la première source d’énergie imaginée par la science-fiction pour les fusées et vaisseaux du futur (après, bien sûr, les canons géants de Jules Vernes et de H.G. Wells). Mais la fusée à propulsion nucléaire n’a jamais dépassé le stade d’esquisse sur une table à dessin – pour l’instant. Car l’armée américaine s’intéresse beaucoup ces derniers temps au potentiel de l’énergie nucléaire pour propulser des vaisseaux spatiaux.

Un premier vol orbital en 2026

La DARPA (Defense Advanced Research Projects Agency), l’agence de la Défense des États-Unis chargée de la recherche en technologies militaires, envisage ainsi de doter ses futurs satellites d’un mini-réacteur nucléaire afin de les rendre plus maniables et réactifs en cas de menace en orbite, humaine ou naturelle.

Ce mois-ci, l’agence a aussi annoncé qu’elle sollicitait des propositions pour les deuxième et troisième phases d’un projet visant à concevoir, développer et assembler un moteur de fusée nucléaire thermique en vue d’une démonstration de vol en orbite terrestre prévue pour 2026. « Ces capacités de propulsion permettront aux États-Unis de renforcer leurs intérêts dans l’espace et d’élargir les possibilités de missions de vols habités de longue durée de la NASA », ont déclaré des responsables de la DARPA dans un communiqué.

Surveiller l’espace cislunaire

Cette fusée à propulsion nucléaire s’inscrira dans le programme DRACO (Demonstration Rocket for Agile Cislunar Operations), qui vise à mettre au point une flotte d’engins spatiaux capables d’opérer dans l’espace cislunaire, soit entre la Terre et son satellite et dans les environs proches de celui-ci, afin de garder un œil sur les opérations commerciales et gouvernementales – et donc potentiellement militaires – qui vont très probablement s’y développer dans les années à venir, rappelle Space.com.

Concrètement, la future fusée à propulsion thermique nucléaire (NTP) fonctionnera avec des réacteurs à fission, qui chaufferont de l’hydrogène ou un autre propergol à des températures très élevées, puis éjecteront le gaz surchauffé par des tuyères pour créer une poussée. Les NTP ont un rapport poussée/poids environ 10.000 fois supérieur aux systèmes de propulsion électrique, ainsi qu’une efficacité de propulsion (ou impulsion spécifique) deux à cinq fois supérieure aux fusées chimiques traditionnelles, selon les objectifs affichés du programme DRACO.

Objectif Mars ?

En septembre 2020, la DARPA a attribué un ordre de mission de 14 millions de dollars pour le projet DRACO à Gryphon Technologies, une entreprise de Washington qui fournit des solutions d’ingénierie et techniques aux organisations de sécurité nationale.

La NASA s’intéresse également à la propulsion thermique nucléaire, car elle pourrait permettre aux missions d’atteindre Mars en deux fois moins de temps que les six à neuf mois actuellement possibles avec les systèmes de propulsion actuels. La demande de budget de la NASA pour l’exercice 2023, qui n’a pas encore été approuvée par le Congrès, comprend 15 millions de dollars pour soutenir la propulsion nucléaire.

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