L’arsenal chinois a toujours été présenté comme entièrement défensif. Mais alors, pourquoi autant d’ogives, et surtout pourquoi tant de nouveaux missiles à longue portée ?
La Chine gonfle son arsenal nucléaire et le reste du monde s’inquiète
Pourquoi est-ce important ?
Le nombre estimé d'armes nucléaires chinoises a augmenté de 20% en seulement 2 ans. Et le pays expose régulièrement ses missiles nouvelle génération. Comme le DF-17, entré en service en 2019: d'une portée de 1.800 à 2.500 km, il atteint la vitesse supersonique de 6.125 km/h, ce qui le rend très difficile à détecter et intercepter.Il y a quelques semaines, des chercheurs américains signalaient que la Chine construit au moins 119 silos à missiles pour armes nucléaires près de la ville de Yumen, au nord-ouest du pays. Un mauvais présage qui se confirme: cette fois, c’est l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri) qui tire la sonnette d’alarme. Il a réévalué l’arsenal nucléaire chinois à 350 ogives, soit une hausse de 20% en seulement 2 ans. Une étude qui confirme les craintes déjà exprimées l’année passée par le Pentagone: l’Empire du Milieu cherche à considérablement augmenter sa dotation en armes de destruction massive, la doubler même, selon les Américains.
Robert Wood, ambassadeur des États-Unis à la Conférence de Genève sur le désarmement, a appelé la Chine à s’asseoir à la table des négociation sur cet explosif sujet: « Il est de l’intérêt de tout le monde que les puissances nucléaires discutent directement entre elles de la réduction des dangers de l’atome. Tant que la Chine ne s’assiéra pas avec les États-Unis de manière bilatérale, le risque d’une course aux armements dévastatrice continuera à augmenter et ce n’est dans l’intérêt de personne. La Chine prétend être une «puissance nucléaire responsable» et que son «très, très petit arsenal n’a qu’un but défensif». Mais quand vous vous voyez ce que la Chine fait, cela entre en contradiction avec ce qu’elle dit ».
Une première bombe en 1964
Le programme nucléaire chinois, essentiellement militaire à l’origine, remonte probablement aux années 1950. Mais il faudra attendre 1964 pour que le pays procède au test de sa première bombe. La Chine est le dernier pays à avoir mené des tests d’armes nucléaires dans l’atmosphère, avec un dernier tir le 16 octobre 1980.
Il y a beaucoup d’incertitudes sur la taille réelle de l’arsenal chinois, mais la majorité des estimations tournaient jusqu’il y a peu autour des 200 à 250 ogives, même si d’autres sont plus alarmistes. Ce qui représente un potentiel de destruction énorme, mais reste peu pour une puissance nucléaire. Par comparaison, la France reconnait posséder 300 armes atomiques. La Chine assurait donc que ces missiles n’avaient qu’un rôle défensif. Il faut dire que le pays est en contact direct avec la Russie (peut-être 4600 ogives) et l’Inde (80 à 100 ogives), deux puissances nucléaires avec qui il y a des dissensions territoriales parfois violentes. Sans compter l’imprévisible et insondable Corée du Nord.
Font commun franco-américain
En France aussi, les ambitions chinoises font réagir. La ministre des Armées Florence Parly a assuré depuis Washington que son pays ne comptait pas non plus se laisser distancer: « La France et les États-Unis partagent une analyse commune des menaces et des enjeux stratégiques. Si la doctrine nucléaire publique de la Chine reste centrée sur le non emploi en premier, le développement rapide de sa dissuasion soulève des questions. Et c’est un argument parmi tant d’autres qui appelle au maintien d’une doctrine de dissuasion forte et claire tant à Washington qu’à Paris. »
Il y a à peine 20 ans, la non-prolifération nucléaire, voire la réduction des arsenaux existants, semblait être un objectif réaliste dans l’optimisme de la fin de la guerre froide. De toute évidence on s’est trompé, et les missiles chargés de la puissance d’un millier de soleils ne sont pas près d’être relégués dans des musées.
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