Malgré le conflit avec l’Occident, la Russie envoie un aimant géant en France pour le plus grand projet de fusion nucléaire du monde

La Russie a expédié hier l’un des six aimants géants nécessaires au projet français d’essai de fusion nucléaire ITER. Ce n’est d’ailleurs pas le seul exemple de coopération entre la Russie et l’Occident, bien au-delà du début du conflit en Ukraine.

Pourquoi est-ce important ?

Le projet de fusion nucléaire ITER est l'un des derniers projets scientifiques internationaux auxquels Moscou participe, malgré les mesures punitives de l'Occident contre sa guerre en Ukraine. La recherche est donc un sujet particulièrement important. Les scientifiques considèrent la fusion nucléaire, le même processus qui alimente notre soleil, comme une source potentielle future d'énergie propre presque illimitée. ITER est une collaboration de 35 pays.

L’essentiel : un navire transportant un aimant de fabrication russe – ou « bobine de champ poloïdal » – a quitté Saint-Pétersbourg pour Marseille, dans le sud de la France, mardi, rapporte le site d’information européen Euractiv. « L’énorme bobine, large de neuf mètres et pesant 200 tonnes, a été emballée avec beaucoup de précaution pour supporter un voyage de deux semaines », ajoute-t-il.

  • L’aimant en forme d’anneau a été construit sous la supervision de l’agence nucléaire russe Rosatom.
  • L’objectif est de former la partie supérieure du plus grand « tokamak » du monde.

Dix fois plus chaud que le soleil

Un quoi ? Tout d’abord, un peu de contexte. Dans la fusion nucléaire, les atomes d’hydrogène sont comprimés sous une chaleur et une pression intenses pour donner de l’hélium, ce qui libère de l’énergie sous forme de neutrons. Pourquoi ce processus est-il un travail extraordinairement difficile ? Pour cela, il faut imiter des conditions « similaires au soleil » sur Terre.

  • Quelques laboratoires dans le monde utilisent à cette fin un type particulier de réacteur de fusion nucléaire : le tokamak.
  • Une telle installation peut chauffer le combustible de fusion – les atomes d’hydrogène « lourds » que sont le deutérium et le tritium – à des centaines de millions de degrés Celsius. Cela crée un plasma qui peut être environ 10 fois plus chaud que le soleil. Cela fait du réacteur d’essai l’endroit le plus chaud de notre système solaire, pendant les quelques secondes où il fonctionne.
  • L’une des approches permettant de rendre la fusion nucléaire utile – dans laquelle les scientifiques peuvent lancer le processus de manière contrôlée, en produisant plus d’énergie qu’ils n’en mettent dans le processus – comprend l’utilisation d’aimants. Cela devrait permettre de contrôler le plasma tourbillonnant. C’est l’approche utilisée par ITER.

Quel est son argument de vente unique ? La fusion nucléaire, contrairement à la fission nucléaire, le processus des réacteurs nucléaires classiques, ne produit pas de déchets radioactifs à long terme.

« Si cette collaboration était arrêtée, tout le monde serait perdant »

Et maintenant : L’aimant russe aurait dû commencer son voyage en France dès le mois de mai. Toutefois, les sanctions de l’UE interdisant aux navires russes d’accoster en Europe ont retardé le départ du composant du réacteur.

  • Sans la bobine russe, le tokamak « ne fonctionnerait pas ». Tel est le message que le Russe Leonid Khimchenko, scientifique en chef du centre de recherche ITER, a déclaré à l’agence de presse AFP.
  • Andrei Mednikov, un scientifique chargé de produire la bobine de champ poloïdal, a fait l’éloge de la coopération internationale en cours.
  • « Si cette coopération s’arrêtait, tout le monde serait perdant : tant la Russie que la communauté internationale », a-t-il fait écho.

La Russie commerce davantage avec… la Belgique

Ce n’est pas la première fois, ces derniers temps, que la Russie est associée à un partenariat inattendu.

  • Ainsi, le quotidien américain New York Times a écrit fin octobre que certains pays viennent d’approfondir leurs relations économiques avec la Russie depuis le début de la guerre en Ukraine.
  • Il s’agit notamment de la Chine et de la Turquie, « mais aussi de l’Inde, du Japon, et… de la Belgique et des Pays-Bas. »
  • Chez nous, la valeur des importations de pétrole, de gaz et de diamants a augmenté.

BL

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