L’université de Fudan, considérée comme l’une des meilleures de Chine, a trouvé un accord avec la Hongrie pour y ouvrir un nouveau campus. Un évènement qui peut être considéré comme une véritable percée de Pékin au sein de l’Union européenne.
Au classement des meilleures universités chinoises, l’université de Fudan, basée à Shangai, se situe à la troisième place depuis des années. Coopération avec des dizaines d’universités étrangères, programmes d’échanges d’étudiants (notamment avec la KU Leuven), dispense de certains cours en anglais: Fudan est déjà bien internationalisée. Mais le coup qu’elle vient de réussir est inédit.
En 2024, l’université chinoise ouvrira un campus rien qu’à elle à Budapest, en Hongrie. Au sein de l’Union européenne. Les travaux de construction de l’établissement – dont le coût est estimé à 2,2 millions d’euros – seront couverts par le gouvernement hongrois. L’université de Fudan y proposera des programmes très variés: relations internationales, économie, médecine ou encore ingénierie. Entre 5.000 et 6.000 étudiants – principalement chinois, mais aussi hongrois et, pourquoi pas, issus d’autres pays européens – pourront y être inscrits chaque année.
En attendant l’ouverture du campus, Fudan s’est déjà associé avec quatre universités hongroises pour organiser des programmes de diplômes communs.
L’amitié sino-hongroise se renforce
L’installation de Fudan à Budapest n’est qu’une étape supplémentaire dans le renforcement des relations entre les deux pays. Depuis 2010 et l’arrivée de Viktor Orban à la tête de la Hongrie, la Chine lui a déjà apporté son aide plus d’une fois.
Ainsi, la Hongrie abrite le plus grand centre d’approvisionnement de Huawei en dehors de la Chine. S’il a été créé en 2005, soit avant Orban, il n’a eu cesse de s’agrandir ces dix dernières années. Aujourd’hui, plus de 21.000 Hongrois y travaillent.
Autre exemple. L’an dernier, Pékin a accordé un prêt de 1,9 milliard de dollars à Budapest afin d’aider à la construction d’une ligne ferroviaire reliant la capitale hongroise à Belgrade.
Pour les analystes, le choix de la Hongrie pour implanter une première université chinoise dans l’Union européenne coulait de source. Si les autorités hongroise et chinoise s’entendent bien, ces dernières trouvent également à Budapest un terrain stable et sécurisé. Si Fudan avait tenté de prendre ses quartiers en Europe occidentale, cela aurait sans doute provoqué des mouvements contestataires. En Hongrie, les médias et les institutions sont davantage muselés: la Chine n’a rien à craindre.
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Sublimer l’éducation
En accueillant la prestigieuse université de Fudan, la Hongrie espère bien profiter de nombreuses retombées sur le long terme.
‘Cela facilitera considérablement la création d’infrastructures éducatives de haute qualité et élèvera le niveau de l’enseignement’, a déclaré un porte-parole du gouvernement hongrois, cité par le Financial Times.
Pour lui, cette nouvelle alliance sino-hongroise doit aller au-delà du terrain universitaire. L’arrivée de Fudan à Budapest doit donner ‘un coup de fouet aux investissements chinois, en particulier à la création de centres de recherche et de développement d’entreprises chinoises en Hongrie’.
L’ombre du Parti communiste
Si le campus hongrois de Fudan va, logiquement, tirer le niveau de l’enseignement hongrois vers le haut, il existe toutefois des craintes d’une vampirisation. Avec cette focalisation sur l’université chinoise, certains académiciens hongrois ont peur que les établissements nationaux ne perdent de leur superbe.
Une crainte d’autant plus légitime lorsqu’on se rappelle que le gouvernement Orban a chassé du pays la prestigieuse Université d’Europe Centrale, fondée par le philanthrope américano-hongrois Georges Soros. Depuis un an et demi, l’institution a transféré la majeure partie de ses activités à Vienne, en Autriche.
Enfin, certaines voix s’élèvent pour dénoncer le fait que l’université de Fudan va permettre au Parti communiste de propager ses idées en Hongrie, et de facto en Europe. En 2019, l’institution chinoise a ajouté dans sa charte une clause stipulant son ‘adhésion à la direction du parti communiste chinois’. Elle promet ‘d’appliquer pleinement la politique éducative du parti’. En parallèle, l’université de Fudan a retiré un engagement… en faveur de la liberté de pensée.