Principaux renseignements
- L’UE et ses États membres sont invités à augmenter leur production de défense en raison des menaces russes prévues.
- La mise en commun des dépenses de défense dans un fonds commun de l’UE pourrait accélérer le développement de projets et combler les lacunes en matière de capacités, ce qui nécessite un leadership politique fort.
- Un fonds commun de 100 milliards d’euros permettrait de financer des projets majeurs, mais cela nécessite des décisions politiques importantes.
Les services de renseignement préviennent que la Russie pourrait être en mesure, d’ici la fin de la décennie, d’attaquer un autre pays européen. Cette menace pousse l’Union européenne et ses États membres à renforcer d’urgence leurs capacités de défense et à augmenter leur production militaire.
Micael Johansson, futur président de la plus grande organisation européenne de l’industrie de défense, plaide pour une approche coordonnée. Selon lui, rassembler plusieurs milliards d’euros de budgets nationaux dans un fonds commun de l’UE permettrait d’accélérer le développement de projets essentiels et de combler les lacunes actuelles. Il souligne toutefois que cela nécessite un véritable leadership politique.
Johansson soutient les initiatives de la Commission européenne, comme le plan « Readiness 2030 », visant à augmenter les dépenses militaires. Mais il estime que des mesures supplémentaires sont nécessaires pour faciliter la coopération entre États et entreprises dans le développement et l’acquisition de nouveaux systèmes d’armement.
Un fonds commun de 100 milliards d’euros proposé
Le plan « Readiness 2030 » prévoit déjà un assouplissement des règles budgétaires permettant jusqu’à 650 milliards d’euros de dépenses de défense sur quatre ans. Il s’appuie également sur un mécanisme de prêt baptisé SAFE, doté de 150 milliards d’euros. Mais Johansson note que ces financements restent largement contrôlés par les gouvernements nationaux, qui les utilisent en fonction de leurs besoins immédiats.
C’est pourquoi il propose de centraliser une partie des budgets nationaux dans un fonds européen commun, par exemple via le programme existant « European Defence Industrial Programme » (EDIP). Il suggère de fixer un objectif de 100 milliards d’euros pour financer de grands projets conjoints, tout en reconnaissant que cela nécessitera des décisions politiques fortes.
Une industrie fragmentée qui freine l’efficacité européenne
L’un des grands obstacles reste la fragmentation du marché européen de la défense. Les États membres protègent jalousement leurs industries nationales, ce qui complique la coopération et ralentit la capacité de réaction en cas de crise. L’interopérabilité — la capacité des systèmes à fonctionner ensemble — en souffre fortement.
L’UE et l’OTAN ont identifié sept domaines prioritaires en matière de capacités : munitions, drones, défense aérienne, guerre électronique, et d’autres encore. Si Johansson estime que les entreprises européennes peuvent répondre à la plupart des besoins, elles sont encore en retard par rapport aux acteurs américains dans certains secteurs comme les systèmes de défense aérienne intégrée ou les technologies autonomes.
Alors que les États-Unis pourraient réorienter leur attention vers la région indo-pacifique, Johansson voit une opportunité claire pour l’Europe : financer ensemble des projets de défense majeurs — dits « projets phares » — à travers des coalitions d’États ou d’entreprises volontaires. Cela nécessitera toutefois un équilibre délicat entre souveraineté nationale et interdépendance.
Réduire la bureaucratie pour accélérer la coopération
Le projet actuel de la Commission européenne encourage la coopération en conditionnant l’accès au financement SAFE au regroupement des commandes par plusieurs États membres. La semaine prochaine, une nouvelle proposition visant à réduire les obstacles bureaucratiques dans le secteur de la défense devrait être présentée, afin de faciliter davantage les projets communs.