En l’état, un traffic aérien neutre en carbone est un mirage: la production de kérosène vert ne suit pas

La part du trafic aérien sur les émissions de gaz à effet de serre reste difficile à estimer ; on estime généralement que les avions émettent 2,5% de nos émissions de CO2, mais il faut ajouter à ça les oxydes d’azote, dont l’effet sur le réchauffement climatique est indirect, et les traînées de condensation et cirrus artificiels qui se forment dans certaines conditions. Il n’empêche qu’avec un trafic en augmentation constante, le secteur est sous pression pour faire sa part d’effort.

Or, les compagnies aériennes de l’association mondiale du transport aérien (Iata qui regroupe plus de 80 % du secteur) estiment qu’elles n’arriveront pas à atteindre leur objectif fixé à aucune émission de carbone d’ici à 2050 pour cause de manque de carburant alternatif. Le plus grand espoir du trafic aérien « propre » repose en effet sur le kérosène dit « vert », ou e-kérosène : il s’agit d’utiliser de l’hydrogène, produit par électrolyse et donc lui-même vert, et de capter du CO2 dans l’atmosphère. En recombinant les deux, on obtient un carburant de synthèse imitant le kérosène d’aviation.

Plus cher, trop rare

La transition vers ce carburant représente 65% des efforts que se sont fixés les compagnies aériennes pour arriver au zéro carbone, auxquels s’ajoutent le rachat de droit d’émettre du CO2 (19%), et le développement de nouvelles technologies pour 13 %, détaille le quotidien Le Soir.

Sauf que ce kérosène vert est bien plus cher, de l’autre de deux fois et demie le prix du carburant classique et, surtout, la production ne suit pas : « On a pas utilisé la moindre goutte de kérosène vert produit en 2021, ce sera pareil en 2022 et l’année prochaine » assure Willie Walsh, ancien directeur de British Airways et patron de l’Iata. Le SAF, pour Sustainable Aviation Fuel, représente 12% environ du mélange de carburants utilisés dans les avions, alors que l’objectif est d’arriver à au moins 60 % d’ici 2050. Or pour atteindre cet objectif, la production actuelle de 100 millions de litres de SAF en 2021 devrait passer à 449 milliards de litres. D’autant que plus on produit de e-kérosène, moins celui-ci coûte cher sur le marché.

Moins exiger, et inciter davantage

Selon l’Iata, l’Union européenne devrait s’inspirer d’avantage des États-Unis, qui soutiennent directement la production et ne se contentent pas d’imposer des objectifs. Ceux-ci estiment leur production à 11 milliards de litres dès 2030. Dans l’UE, si les politiques d’incitation suivaient, la production pourrait atteindre 30 milliards de litres la même date.

L’Iata appelle aussi à certifier de nouvelles manières de production : il y a aujourd’hui 7 méthodes agréées, il devrait y en avoir 11 d’ici 2025. Et surtout, les compagnies aériennes incitent à développer la filière partout dans le monde, car, pour l’heure, l’UE et les USA seulement avancent dans le développement de lieux de productions, tandis que l’Afrique est négligée, et que l’Amérique du Sud et l’Australie viennent seulement de prendre l’avion en marche.

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