Chypre va (enfin) rendre son registre des entreprises plus transparent

Chypre est en train de mettre en place un registre qui devrait permettre d’identifier les propriétaires réels des milliers de sociétés enregistrées sur l’île. Cela devrait mettre un terme aux structures opaques et complexes qui y sont souvent instaurées. Un exode des entités malhonnêtes n’est dès lors pas à exclure.

En raison de son manque de transparence, Chypre est souvent décrit comme un paradis pour de nombreux criminels, qui y cachent et blanchissent le butin qu’ils ont acquis via des pratiques illégales.

Les Russes aux manettes

Le remplissage du registre des entreprises débutera à la mi-mars. Cela devrait permettre de savoir clairement qui se cache en réalité derrière ces entreprises. Entre autres choses, on soupçonne que de nombreuses entreprises ayant des sièges sociaux chypriotes sont en réalité aux mains de groupes russes.

‘Les entreprises auront six mois pour collecter et soumettre les données requises’, ont déclaré les porte-parole du ministère chypriote du Commerce et de l’Industrie, qui coordonne le projet.

L’Union européenne demande depuis longtemps que des mesures soient prises contre les pratiques qui permettraient aux criminels de cacher leur butin. Les défenseurs du projet estiment que le registre pourrait constituer un tournant important pour Chypre.

‘Les critiques ont depuis longtemps dépeint Chypre comme un aimant pour toutes sortes de voyous, qui y cachent leurs richesses illégalement accumulées derrière toutes sortes de sociétés écrans’, indique Reuters. ‘Chypre a longtemps conservé l’image d’une juridiction qui prend aveuglément l’argent des investisseurs, sans se poser de questions.’

Le passeport en or chypriote en est un autre exemple. Ce projet a été brusquement interrompu l’année dernière suite à une enquête ayant démontré les nombreux abus dont il pouvait faire l’objet.

Une aiguille dans une botte de foin

Les militants affirment que l’identification du propriétaire final d’une entreprise chypriote doit souvent être comparée à la recherche d’une aiguille dans une botte de foin. Cela débute, disent-ils, par un labyrinthe d’administrateurs locaux, qui se réfèrent ensuite à des entités d’autres pays aux régimes fiscaux favorables. Au final, ceux qui se lancent dans cette quête finissent souvent par se retrouver désespérément bloqués quelque part.

‘Ces sociétés fictives sont des entités populaires pour le blanchiment d’argent’, confirme Mair Martini, analyste financier pour Transparency International.

‘Depuis les contrôles fiscaux plus stricts introduits à Chypre l’année dernière, un certain nombre de sociétés ont déjà quitté le pays pour s’enregistrer ailleurs’, souligne également Katerina Antoniou, spécialiste de la lutte contre la fraude chez Deloitte. ‘Le nouveau registre du commerce pourrait donc provoquer un nouvel exode de toute une série d’entreprises’.

Dans un premier temps, les organismes gouvernementaux pourront accéder au registre sur demande. Le gouvernement chypriote a déclaré qu’il espérait que le système final, avec différents niveaux d’accès, serait disponible d’ici la fin de cette année. Toutefois, certains responsables de la lutte contre la corruption affirment qu’il faut encore en faire davantage.

Tranparency International se plaint ainsi qu’il n’existe toujours pas, à Chypre, de registre public. Alors que l’UE l’exige. ‘Pour être vraiment efficace, le registre devrait également pouvoir être relié à d’autres bases de données, comme celle des biens immobiliers’, estime Mair Martini.

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