La Chine et la diplomatie du porte-monnaie : comment isoler Taïwan tout en s’assurant l’obéissance de petits pays un peu partout

Le Honduras vient de signer un accord diplomatique avec Pékin. Ce qui revient à terme à saper la reconnaissance de Taïwan par le pays d’Amérique latine. Coup dur pour Taipei, avec en sous-main un bras de fer qui se gagne souvent à coup d’aides économiques.

Pourquoi est-ce important ?

"Une seule Chine" : c'est le mantra de Pékin, avec pour objectif assumé d'être le seul pays reconnu à porter ce nom. Un bras de fer avec Taipei entamé en 1971, quand les représentants à l'ONU de la République de Chine (Taïwan) ont été remplacés par ceux de la République populaire de Chine. Depuis lors, le pays communiste fait tout pour éroder la reconnaissance internationale de l'île issue du régime nationaliste, et c'est un jeu que Taïwan est en train de perdre, progressivement.

Dans l’actualité : la présidente du Honduras, Xiomara Castro, a annoncé mardi que son pays commencerait à établir une relation officielle avec Pékin, ce qui fait de facto passer son pays de ceux qui reconnaissent Taïwan à ceux qui prennent parti pour la Chine communiste. La République de Chine – Taïwan, donc – était reconnue par 14 des 193 États membres des Nations unies, ainsi que par le Saint-Siège. Un chiffre qui va donc de facto passer à 13 dans un avenir proche.

  • Il faut dire que Pékin a mis un argument de poids sur la table : l’argent. Eduardo Enrique Reina, le ministre des Affaires étrangères du Honduras, a déclaré mercredi que le pays avait demandé à Taïwan de doubler son aide annuelle pour la porter à 100 millions de dollars et de renégocier sa dette envers l’île, selon The Guardian. Demande qui, selon lui, est restée sans réponse.
  • Une requête non assouvie qui est tombée dans l’oreille de la Chine communiste, qui n’a vraisemblablement pas manqué d’évoquer ses coffres bien remplis et sa grande générosité. La Chine a d’ailleurs déjà investi 298 millions de dollars dans un barrage dans l’est du pays, qui a été inauguré en janvier 2021.

Pour Taïwan, envers qui la République populaire est de plus en plus hostile et multiplie les menaces d’invasion, c’est un coup dur. Car la reconnaissance internationale est une manière tangible de contredire le récit de Pékin, pour qui l’île est une province rebelle et non une république indépendante.

  • « Nos efforts de communication avec le Honduras n’ont jamais cessé », a déclaré le ministère des Affaires étrangères de l’île dans un communiqué. « Nous exhortons le Honduras, qui souffre déjà de problèmes d’endettement, à ne pas étancher sa soif avec du poison et à ne pas tomber dans le piège de l’endettement de la Chine. »
  • Les politiques économiques de la Chine envers ses nouveaux partenaires – souvent des pays assez pauvres du sud – ont souvent été pointées du doigt, Pékin s’assurant la part du lion, en particulier sur les ressources économiques. Certains experts présentent les investissements massifs à l’étranger comme une manière de constituer une hégémonie basée sur la dette, mais ce sujet fait débat.
  • Dans tous les cas, la question de la reconnaissance de Taïwan pèse toujours dans les relations économiques avec Pékin. On l’a vu récemment au Nicaragua ainsi que dans les Îles Salomon.
  • Taïwan bénéficie toutefois de reconnaissances plus implicites, grâce à des représentations commerciales, en Europe par exemple. Des relations moins officielles, mais tout aussi importantes. Et qui ont valu à la Lituanie la colère de Pékin.
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