Les célibataires paient trop d’impôts : « Le politique doit adapter le système fiscal à la réalité sociale »

Être célibataire n’est pas du tout intéressant sur le plan financier, car on paie plus d’impôts que les cohabitants et les familles avec enfants. Le groupe de réflexion de l’OCDE a calculé que 52 % du salaire moyen d’un travailleur célibataire en Belgique va au Trésor public. Business AM s’est entretenu avec Michel Maus, avocat fiscaliste et professeur à la VUB.

Où est-ce que ça coince ?

  • Michel Maus : « Notre charge fiscale élevée sur le travail est un problème. Il est navrant de constater qu’en comparaison internationale, le célibataire belge a toujours été le plus gros contribuable, et ce pendant 23 années consécutives. »

Comment la politique peut-elle justifier cela ?

  • « La grande différence réside dans la charge des enfants. Lorsqu’il y a des enfants, nous constatons que la charge fiscale diminue considérablement. Cela s’explique par le fait que l’impôt sur le revenu des personnes physiques prévoit un revenu non imposable. Ce revenu est considérablement gonflé dès qu’il y a des enfants à charge. La question que nous devons nous poser est de savoir si la charge des enfants ne pèse pas trop dans le calcul de l’impôt. »

Le choix d’avoir des enfants est récompensé. Le choix de ne pas avoir d’enfants est pénalisé.

  • « C’est vrai dans une certaine mesure. Je peux comprendre quelque part que lorsque nous examinons l’allocation exonérée d’impôt, elle soit augmentée s’il y a des enfants à charge. Seulement, dans notre système fiscal, nous constatons que l’augmentation accordée pour la charge des enfants augmente proportionnellement au nombre d’enfants. »
  • « Nous devrions donc peut-être commencer à appliquer le même montant pour chaque enfant. Cela libérerait de l’espace budgétaire pour pouvoir augmenter l’allocation exonérée d’impôt pour les célibataires. »

Le problème ne réside-t-il pas dans le fait qu’il n’y a pas de représentation politique pour ce groupe ?

  • « Dans notre système juridique, la famille reste en quelque sorte la pierre angulaire de la société. Cela vaut également pour le droit de succession, les pensions, etc. Force est d’ailleurs de constater que les partis politiques ne sont pas très enthousiastes à l’idée de changer cette ligne de pensée ».
  • « Pourtant, le nombre de célibataires ne cesse de croître, de même que les relations à long terme [sans union légale ni enfant]. En termes juridiques, il s’agit de relations entre célibataires, parce qu’ils ne vivent pas ensemble et sont donc fiscalement désavantagés. Les politiciens devraient peut-être se rendre compte qu’ils doivent adapter le système juridique à la réalité sociale ».

Les célibataires sont les plus fiscalement désavantagés

  • Un célibataire sans enfant disposant d’un revenu moyen voit en effet 52 % de son salaire disparaitre dans les poches du fisc, comme nous vous l’indiquions récemment.
    • Dans les faits, cela signifie que pour chaque euro payé par l’employeur, l’employé reçoit 48 cents.
    • La moyenne de l’OCDE pour un célibataire sans enfant est de 24 %. La Belgique est la pire élève en la matière.
  • En comparaison, une famille avec deux enfants voit en moyenne 35 % de son salaire disparaitre dans les caisses de l’état.
    • Là aussi, c’est plus que la moyenne de 24 % de l’OCDE. Seuls 6 pays font moins bien que la Belgique.  

Plusieurs facteurs expliquent cette différence fiscale particulièrement forte entre les célibataires et les ménages. Certaines inégalités ont déjà été éliminées au cours des dernières années, mais des efforts plus conséquents doivent encore être faits.

(JM)