Cathie Wood revient à la charge : « La Fed se base sur des indicateurs retardés et contradictoires »

La célèbre investisseuse attaque la Fed dans une lettre ouverte. Pour elle, l’institution monétaire se base sur des indicateurs contradictoires, ce qui devrait remettre en question les hausses des taux d’intérêt. Cathie Wood s’attend également à une déflation profonde.

Après une première salve il y a près d’un mois, la célèbre investisseuse Cathie Wood tire à nouveau à boulets rouges sur la Fed, la banque centrale des Etats-Unis. Dans une lettre ouverte, elle souligne que l’institution dirigée par Jerome Powell, avec ses « erreurs de politiques », va causer de la déflation.

Déflation

« La plupart des prix des produits de base ont atteint un sommet et, à l’exception de l’alimentation et de l’énergie, sont en baisse sur une base annuelle. Il ne fait aucun doute que les prix de l’alimentation et de l’énergie sont importants, mais nous ne pensons pas que la Fed doive combattre et exacerber la douleur mondiale associée à un choc d’approvisionnement en produits agricoles et énergétiques causé par l’invasion de l’Ukraine par la Russie », écrit-elle.

En d’autres mots, elle accuse la Fed de trop se fixer sur l’inflation, causée par les prix élevés des denrées alimentaires et de l’énergie. L’institution monétaire ne serait pas assez regardante sur la déflation générale qui pourrait découler de cette baisse des prix des matières premières. Pour mémoire, cette baisse des prix des matières premières est provoquée par des craintes de récession, et les craintes de récession (voire les récessions tout court) sont alimentées par les hausses des taux d’intérêt des banques centrales.

Pour Cathie Wood, il y a effectivement des risques pour une déflation générale. « L’accumulation des stocks semble accabler les fabricants et les détaillants. Après avoir été aux prises avec les contraintes de la chaîne d’approvisionnement pendant plus d’un an, même les entreprises de classe mondiale semblent avoir outrepassé leurs systèmes automatisés de planification des ressources d’entreprise (ERP) et passé des commandes excessives de marchandises », écrit-elle.

Auprès de nombreux grands groupes, les ventes n’ont pas beaucoup augmenté, mais les stocks ont explosé, et cela encore plus lors du deuxième trimestre (pour le troisième, qui vient de se terminer, les données ne sont pas encore disponibles). Ils vont devoir se débarrasser de tous ces stocks, ce qui se traduira par une chute profonde des prix. Voilà un élément que Michael Burry a également pointé du doigt récemment.

« La Fed se base sur des indicateurs retardés et contradictoires »

La critique de Wood envers la Fed ne s’arrête cependant pas aux risques de déflation. Elle passe aussi en revue les indicateurs sur lesquels Jerome Powell et les autres gouverneurs se basent. « La Fed semble se concentrer sur deux variables qui, à notre avis, sont des indicateurs retardés – l’inflation et l’emploi – qui envoient tous deux des signaux contradictoires et devraient remettre en question l’appel unanime de la Fed à une hausse des taux d’intérêt », écrit-elle.

Pour l’inflation comme pour le marché du travail, les données vont dans les deux sens. Certaines sont dans le vert, comme l’indice des prix à la consommation américain qui est en baisse, les demandes de chômage qui sont en baisse et les embauches des secteurs non agricoles qui sont en hausse. Mais d’autres sont dans le rouge, comme l’inflation sous-jacente qui est en hausse, les créations de postes (selon le rapport JOLTS), les embauches dans la manufacture (selon l’indice des directeurs d’achat) qui sont en baisse, et les licenciements (selon le rapport Challenger) qui sont en hausse.

Bref, Cathie Wood s’inquiète que les hausses rapides des taux d’intérêt de la Fed ne causent plus de mal à l’économie américaine, mais aussi mondiale, que de bien. Elle appelle l’institution monétaire à considérer tous ces éléments, en vue de la prochaine réunion qui aura lieu début novembre. Les ETF de Cathie Wood, spécialisés dans les technologies du futur, sont d’ailleurs particulièrement touchés dans le contexte d’inflation, de hausse des taux d’intérêt et de risques de récession. Son principal fonds, Ark Innovation, a perdu 65% depuis le début de l’année, et 76% depuis son sommet atteint au début de 2021.

Le rapport sur l’inflation américaine du mois de septembre tombe d’ailleurs à la fin de cette semaine. Dès la publication de ces données – très attendues par les marchés – les spéculations sur l’ampleur de la prochaine hausse des taux vont pouvoir véritablement commencer.

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