Brexit: Gibraltar a moins de 100h pour éviter de devenir le nouveau Douvres

Si l’Union européenne et le Royaume-Uni ont annoncé un accord jeudi dernier, celui-ci ne concernait pas le cas Gibraltar. Ce dossier est traité à part, entre le Royaume-Uni, l’Espagne et l’enclave britannique.

Avec le Brexit, Gibraltar est installé dans un drôle de paradoxe: l’enclave britannique est très attachée au Royaume-Uni, mais elle était aussi pleinement favorable à son appartenance à l’Union européenne. Lors du référendum de 2016, 96% de ses habitants avaient voté pour le maintien de leur territoire au sein de l’UE. Ils estimaient que ça leur donnerait plus de poids en vue de leurs relations – parfois tendues – avec Madrid. De plus – et c’est peut-être là l’essentiel, Gibraltar et ses 34.000 habitants sont très dépendants de l’extérieur, étant donné qu’ils important la quasi-totalité de leur nourriture.

À l’annonce du deal entre le Royaume-Uni et l’Union européenne du 24 décembre dernier, on aurait imaginé les Gibraltariens rassurés. Le Premier ministre de Gibraltar, Fabian Picardo, a ainsi déclaré que l’accord commercial post-Brexit était ‘un énorme soulagement étant donné les difficultés potentielles qu’un Brexit sans accord aurait pu créer pour le Royaume-Uni et l’Union européenne’.

Mais le soulagement des autorités gibraltariennes n’est pas total. ‘Cet accord ne couvre pas Gibraltar. Pour nous, et pour les habitants du Campo de Gibraltar qui nous entourent, l’heure tourne encore’, a précisé le Premier ministre.

En effet, le deal ne concerne pas l’enclave britannique. L’Espagne avait réussi à convaincre l’UE de la laisser gérer ce dossier avec les principaux concernés: le Royaume-Uni et Gibraltar. Les discussions sont toujours en cours.

Mettre la question de la souveraineté de côté

Cédé en 1713 au Royaume-Uni, Gibraltar est, depuis, revendiqué par l’Espagne. Une volonté de souveraineté espagnole qui est toujours de mise aujourd’hui.

Suite au désir affiché par Gibraltar lors du referendum de 2016 de rester dans l’UE, le chef de la diplomatie espagnole Alfonso Dastis avait proposé la mise en place d’une souveraineté partagée entre Madrid et Londres sur l’enclave britannique. Idée reprise en 2018 par le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez. Mais les autorités de Gibraltar avaient immédiatement fait part de leur totale opposition à ce projet.

‘Aucune des deux parties ne va renoncer à ses prétentions de souveraineté, mais nous devons mettre cela de côté pour parvenir à un accord qui facilite la vie de ceux qui vivent de part et d’autre de la frontière’, a déclaré la ministre espagnole des Affaires étrangères Arancha González Laya à la télévision publique espagnole RTVE.

La ministre espagnole a ensuite pointé les autorités britanniques comme un possible frein à un accord. ‘Les Espagnols en veulent un, les habitants de Gibraltar en veulent un, maintenant le Royaume-Uni doit en vouloir un aussi. Une volonté politique est nécessaire’, a-t-elle indiqué.

Craintes d’un Douvres 2.0

Si Gibraltar ne compte que 34.000 habitants, près de 15.000 Espagnols viennent y travailler chaque jour. À cela, il faut ajouter les 10 millions de touristes qui visitent l’enclave britannique tous les ans et, comme dit précédemment, les nombreux produits d’importation. Autant dire que la frontière entre l’Espagne et Gibraltar est un haut lieu de fréquentation. Environ 30 millions de véhicules la traversent chaque année.

Si un accord n’est pas trouvé d’ici le 1er janvier et la fin de la période transitoire réglementant la frontière, les autorités espagnoles et gibarltariennes craignent que d’énormes files de véhicules ne s’y forment.

‘Nous n’avons pas beaucoup de temps, et les scènes de chaos en provenance du Royaume-Uni doivent nous rappeler que nous devons continuer à travailler pour parvenir à un accord sur Gibraltar’, a rappelé Mme González Laya, faisant référence aux embouteillages monstres apparus autour de Douvres la semaine dernière. Des files nées de la fermeture temporaire des frontières entre le Royaume-Uni et la France suite à la découverte d’une nouvelle forme de coronavirus dans le sud de l’Angleterre.

Pour éviter pareille situation, le Premier ministre de Gibraltar Fabian Picardo a émis l’idée d’une inclusion de Gibraltar au sein de l’espace Schengen, auquel le Royaume-Uni ne faisait partie que partiellement en tant que membre de l’UE et auquel il ne compte pas faire partie une fois le Brexit finalisé.

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