Les pays de l’UE qui soutiennent le projet chinois “One Belt, One Road” feraient bien d’y réfléchir à 2 fois

Cette année, la Chine a enregistré deux succès notables lorsqu’elle est parvenue à convaincre deux pays membres de l’UE à coopérer avec elle dans le cadre de son projet « Belt and Road Initiative » (BRI). Mais ces pays devront faire très attention, affirme le Financial Times. Car ce projet n’est pas toujours synonyme de bonne affaire pour les pays qui y souscrivent, explique-t-il. 

Lors de son récent passage en Europe, le Premier ministre chinois Li Keqiang a consacré bien moins de temps à l’Union européenne qu’au Groupe des 16 + 1, qui rassemble les pays de l’Europe centrale, des Balkans et de l’Europe de l’Est. Au cours de cet événement, le Premier de l’Empire du Milieu les a exhortés une fois de plus à s’ouvrir aux investissements chinois.

La Grèce et l’Italie, les deux « gros lots » chinois

Cette année, l’Italie et la Grèce ont indiqué qu’elles étaient prêtes à collaborer dans le cadre du méga-projet chinois One Belt, One Road, surnommé par les Chinois eux-mêmes la «Nouvelle Route de la Soie».  Il s’agit d’un gigantesque réseau mondial de routes, de ports, de chemins de fer et de projets énergétiques d’une valeur de plus de 1 000 milliards de dollars. Les nouveaux itinéraires qu’ils permettront de créer relieront la Chine à 80 pays du reste du monde.

Ces deux soutiens diplomatiques et économiques semblent d’autant plus inestimables que le géant chinois des télécoms Huawei se heurte à de grosses difficultés pour imposer son réseau 5G.

Mais par le passé, ce type de soutien n’a pas toujours été payant pour les pays participants, et parfois, cette décision s’est soldée par un très lourd fardeau financier, rappelle le Financial Times.

La Malaisie ne peut pas se permettre le projet, ni son annulation…

Ainsi, cette semaine, on a appris que le Premier ministre de la Malaisie, Mahathir Mohamad, a annoncé qu’il ne pourrait finalement pas dénoncer l’accord conclu avec la Chine portant sur un projet de voie ferrée entre la côte Est et le Sud de la Thaïlande.

L’année dernière, il avait voulu mettre fin à ce contrat, signé par son prédécesseur, estimant que son pays ne pourrait pas rembourser les emprunts correspondants. Mais il s’est avéré que le contrat était assorti d’une clause prévoyant une indemnité de 5,3 milliards de dollars en cas de résiliation.

Et alors que le Premier ministre avait estimé que son pays ne pouvait pas se permettre ce projet d’infrastructure, il a été obligé de se rendre à l’évidence : il ne pouvait pas non plus se permettre de l’annuler… Il est finalement parvenu à un compromis avec le gouvernement chinois, impliquant une baisse d’un tiers de la note finale. Mais ses déboires, similaires à ceux qu’ont rencontrés le Sri Lanka et les Maldives, rappellent que ces projets ambitieux sont parfois assortis de contrats opaques et unilatéraux, et qu’une grande vigilance est de mise.

Des packages globaux

Le journal britannique souligne d’ailleurs que les pays d’Asie ne sont pas les seuls à avoir rencontré de telles difficultés, et que plus près de chez nous, le Monténégro a aussi connu des déconvenues. Le pays a emprunté 1,3 milliard d’euros à la Chine pour construire une autoroute vers Belgrade, là encore dans le cadre du BRI.

Et alors que la rentabilité économique de ce projet était très incertaine, l’emprunt correspondant a fait grimper le taux d’endettement du Monténégro, le faisant passer de 63 % à 80 % du PIB. Pire, le pays a dû mettre des terrains à titre de caution sur une partie du prêt. Deux sociétés de consultance ont exhorté le Monténégro à annuler ce projet, estimant que l’autoroute ne générerait jamais assez de trafic pour couvrir ses coûts.

Les entreprises chinoises qui proposent leurs services dans le cadre de ces projets d’infrastructures sont souvent bien moins chères que leurs homologues locales, et pour les pays dont la situation financière est très délicate, leurs devis peuvent sembler très attractifs.

La Chine a en effet l’habitude de présenter les projets BRI sous forme de solutions globales, incluant la conception, la construction, le financement, et bien sûr, le renforcement des liens diplomatiques. Le problème, c’est que les emprunts proposés pour financer ces projets sont souvent assortis de conditions obscures, et qu’ils impliquent des cautionnements coûteux.

« S’il n’est pas possible d’extraire les éléments utiles de ces packages sans avoir à accepter l’ensemble de manière passive, et plus particulièrement si certains éléments sont mal détaillés et potentiellement unilatéraux, les gouvernements doivent envisager d’y renoncer », conclut le Financial Times.

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