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Des armes iraniennes de contrebande envoyées en Ukraine par les États-Unis : comment tenter de fâcher Téhéran et Moscou

Des armes iraniennes de contrebande envoyées en Ukraine par les États-Unis : comment tenter de fâcher Téhéran et Moscou
Des armes saisies. Photo d’illustration. (Photo by Halil Kahraman/ dia images via Getty Images)

Comment aider l’Ukraine rapidement et à moindres frais, tout en mettant un allié de Moscou en porte-à-faux ? Les USA ont trouvé la solution.

Pourquoi est-ce important ?

L'aide militaire à l'Ukraine devient un sujet de plus en plus brûlant, car les alliés du pays envahi voient la guerre se prolonger sans réel "résultat" à leur investissement. Le gouvernement polonais s'est fâché avec Kiev, le nouveau Premier ministre en Slovaquie veut se limiter à l'aide humanitaire. Et aux États-Unis, la fronde des républicains radicaux et le spectre d'une réélection de Trump en 2024 font craindre que tout soit remis en question.

Dans l’actualité : Washington a trouvé un moyen légal de livrer des tonnes d’armes supplémentaires à Kiev, et ce, à très courte échéance. Ces armes viennent en fait d’Iran, révèle CNN. Elles ont été saisies par l’armée américaine et ses alliées lors de manœuvres entre le Golfe persique et le Golfe d’Aden.

Un immense arsenal iranien de contrebande

  • Ces armes étaient acheminées vers les rebelles houthis du Yémen, soutenus par la République islamique, quand elles ont été saisies. Washington évoque en particulier le voilier apatride MARWAN 1. Il a été intercepté le 9 décembre 2022 sous le coup de la résolution 2216 du Conseil de sécurité des Nations Unies. À la mi-janvier, un autre navire a été intercepté lors d’une opération franco-américaine. À bord : 3.000 fusils d’assaut et 23 missiles guidés antichars.
  • Ces armes sont depuis entreposées dans les locaux du United States Central Command (CENTCOM), l’état-major américain responsable des opérations au Moyen-Orient. On ne parle pas d’un arsenal anecdotique : au total, Washington évoque « Plus de 9.000 fusils, 284 mitrailleuses, environ 194 lance-roquettes, plus de 70 missiles guidés antichars et plus de 700.000 projectiles. » Et ce ne sont que les prises que la Justice voulait confisquer en juillet.

L’enjeu était maintenant de trouver un terrain légal pour verser cette contrebande à Kiev. C’est chose faite, grâce à la collaboration entre le département de la Défense avec celui de la Justice. « Le gouvernement a obtenu la propriété de ces munitions le 20 juillet 2023, par le biais des revendications de confiscation civile du Département de la justice contre le Corps des gardiens de la révolution islamique (IRGC) d’Iran », annonce le CENTCOM dans un communiqué.

« En fin de compte, l’Ukraine a besoin de diverses fournitures pour l’effort de guerre, et même si cela ne répond pas à tous les besoins militaires de l’Ukraine, cela fournira un soutien essentiel. »

Jonathan Lord, chercheur principal et directeur du programme de sécurité au Moyen-Orient au Center for a New American Security

« Une justice poétique »

  • L’arsenal saisi a été transféré ce lundi, faisant de ces armes iraniennes une propriété américaine. Une partie serait déjà en route pour l’Ukraine.
  • Or celle-ci en a bien besoin, alors que les combats font rage, mais que l’armée russe tient toujours face à la contre-offensive. C’est un immense bras de fer, entre des Ukrainiens qui usent leur précieux arsenal occidental, et des Russes qui ne veulent pas lâcher de terrain. Plus l’effort ukrainien peut se maintenir, plus l’armée russe risque de craquer. Du moins tant que la météo rend les opérations possibles.
  • À Washington, on espère aussi que les Iraniens prennent assez mal que leurs armes servent finalement aux USA pour aider l’Ukraine à moindres frais. D’autant qu’à Téhéran, les alliés de Moscou semblent assez dubitatifs devant l’engrenage dans lequel ils ont mis un doigt. L’Iran « tente de se dissocier de la fourniture d’armes à la Russie », estiment les Ukrainiens, et n’arrive de toute façon plus à suivre la demande, moins d’un an après le début de ce partenariat.

« Pendant plus d’un an, les drones iraniens aux mains de l’armée russe ont été utilisés pour attaquer et tuer des civils ukrainiens. Il y a une justice poétique dans le fait que l’Ukraine utilise des armes iraniennes saisies pour défendre son peuple contre l’invasion criminelle de la Russie et ses abus. De plus, cette politique pourrait exercer une plus grande pression sur la relation naissante entre Moscou et Téhéran. »

Jonathan Lord
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