Angela Merkel défend son bilan sur la Russie : « Je n’ai rien à me reprocher »

L’ex-chancelière allemande Angela Merkel a livré ce mardi sa première interview depuis qu’elle s’est retirée de la vie publique, en décembre dernier.

Sans surprise, les principales raisons de cette sortie sont l’invasion russe de l’Ukraine, ainsi que les relations diplomatiques entre le Reichstag et le Kremlin durant l’ère de la chancelière. Celle-ci considère qu’elle n’a « rien à se reprocher » dans les relations qu’elle a entretenues avec Vladimir Poutine durant toutes ces années.

Le « changement par le commerce »

« La diplomatie n’est pas mauvaise simplement parce qu’elle ne réussit pas », avance-t-elle. « Je ne vois donc pas pourquoi je devrais dire que c’était mal, et je ne m’en excuserai pas », évoquant la politique qualifiée de « Wandel durch Handel » – le « changement par le commerce » traduit le Financial Times. Un terme qui désigne la volonté d’orienter un pays vers un fonctionnement plus démocratique en tissant des liens diplomatiques et commerciaux avec lui, ce que l’Allemagne a activement pratiqué avec la Russie. Avec pour conséquence de se retrouver maintenant fort dépendante de Moscou pour son approvisionnement énergétique.

Mme Merkel a déclaré qu’elle n’avait jamais cru à « l’illusion » que Poutine pouvait être changé par le commerce. Selon elle, s’il ne peut y avoir de relations politiques étroites entre l’Europe et la Russie, « il serait au moins logique d’avoir des relations commerciales, car on ne peut pas s’ignorer complètement. […] La Russie est la deuxième plus grande puissance nucléaire du monde. Je ne peux pas prétendre qu’elle n’existe tout simplement pas. »

2008 : calmer l’ire de Moscou

Avec le recul, je suis heureuse de ne pas pouvoir m’accuser d’avoir trop peu essayé d’empêcher un tel événement de se produire », a déclaré Mme Merkel au sujet de la guerre en cours. Une manière polie de rappeler qu’elle a effectivement agi, mais en tentant de calmer le jeu, et surtout l’ire de Moscou.

En 2008 elle s’est ainsi opposée à l’entame d’une procédure d’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN, ce que le président Zelensky a présenté encore récemment comme une grosse erreur de jugement. Mme Merkel a fait valoir qu’à l’époque, l’Ukraine souffrait de corruption et ne disposait pas d’un gouvernement démocratique stable, admettant aussi toutefois qu’elle ne voulait pas provoquer la Russie.

Mme Merkel a également défendu le rôle de l’Allemagne dans la négociation des accords de Minsk de 2014 et 2015, qui ont ouvert un dialogue sur l’autonomie de deux régions de l’est de l’Ukraine aux mains des séparatistes soutenus par Moscou ; des accords intolérables pour l’Ukraine, qui a quitté la table des négociations.

Pas d’excuses, peu de regrets

Mme Merkel a admis que les sanctions contre la Russie après l’annexion de la péninsule ukrainienne de Crimée en 2014 « auraient pu être plus dures », mais a déclaré qu’il n’y avait pas de soutien fort pour de telles mesures à l’époque. Elle maintient qu’elle ne s’excuserait pas pour ces mesures, tout en concédant qu’elle n’avait pas réussi à construire une « architecture de sécurité » pour empêcher l’invasion. Angela Merkel a ajouté que l’invasion de l’Ukraine était « une grosse erreur de la part de la Russie. »

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