The Times avance que Scholz serait prêt à lâcher le projet d’un nouvel avion européen. Du moins en partenariat avec Paris ; il envisagerait d’aller voir du côté de Londres. Ça équivaudrait à larguer les amarres avec l’autre grande puissance industrielle européenne.
L’Allemagne prête à se retirer du « Système de combat aérien du futur » ? C’est plus compliqué que cela

Pourquoi est-ce important ?
Le SCAF, ou « Système de combat aérien du futur » est un des projets de défense les plus ambitieux de l'Europe. Il s'agit de développer un ensemble de systèmes d'armes aériens interconnectés, avec un nouvel avion de combat et un logiciel commun à tous les appareils de l'UE. Sauf que le projet a bien du mal à décoller.Stop ou encore, à Berlin ?
Dans l’actualité : l’Allemagne serait-elle prête à se retirer de ce projet, dont le budget total est estimé entre 50 et 80 milliards d’euros ? C’est en tout cas ce qu’avance The Times. Le quotidien britannique va d’ailleurs plus loin. Outre un retrait allemand de ce projet mené en commun avec la France et l’Espagne (la Belgique l’a depuis rejoint comme observateur), il annonce que Berlin se rapprocherait de Londres. Le gouvernement allemand voudrait rejoindre à la place le programme GCAP/Tempest.
- Ce Global Combat Air Programme est une autre initiative visant à développer un chasseur de sixième génération. Pour l’instant, elle regroupe le Japon et l’Italie, en plus de la Grande-Bretagne.
- Annoncée seulement l’année passée, la production du GCAP commencerait vers 2030, le premier avion devant être déployé en 2035. Une échéance plus rapide que le SCAF donc, attendu en théorie pour 2040 mais qui a accumulé les faux départs.
Français et Allemands se chamaillent, les Britanniques jubilent
Tentative de prophétie autoréalisatrice de la part des Britanniques ? On peut se poser la question. The Times cite « des sources proches » d’Olaf Scholz, le chancelier allemand. Ce dernier serait inquiet que le projet risque de se transformer en un « éléphant blanc » et de se laisser distancer par les Américains, qui travaillent aussi sur un nouvel avion. De là à tout plaquer, puis recommencer avec une autre équipe ? C’est quand même un pari étrange que nous présente The Times. Pour rejoindre le programme GCAP, Berlin aurait besoin de l’approbation de Tokyo et de Rome en plus de Londres. Ça n’est pas acquis. Et puis pourquoi se présenter comme la cinquième roue du carrosse, quand on est déjà parmi les acteurs principaux d’un autre projet ?
- Toujours selon le quotidien britannique, Scholz ne verrait pas l’intérêt de voir le SCAF concurrencer le GCAP/Tempest et souhaiterait, soit fusionner les deux, soit, à défaut, abandonner le SCAF et rejoindre le GCAP. Cela ferait fort plaisir à Londres en tout cas, où une énième querelle franco-allemande pourrait ramener un partenaire supplémentaire pour porter le coût financier du futur nouvel avion.
- Il est vrai que les relations franco-allemandes ne sont pas au beau fixe, en particulier sur la question des partenariats d’armement. Paris digère mal que Berlin puisse préférer acheter américain. Et tente d’attirer dans l’Hexagone tous les profits industriels du développement d’un nouvel avion.
- Ça serait quand même un coup dur, qui mettrait en péril tous les projets communs de la France et de l’Allemagne. Les deux pays travaillent aussi sur un nouveau char de combat, rien que pour rester dans le domaine de l’armement. Et là aussi, ça n’avance pas très bien.
- Mais Berlin a récemment passé commande de F-35 américains, au grand désarroi des avionneurs français, qui réclament une préférence pour des produits européens – et de chez eux, de préférence.
- C’était un clou supplémentaire dans un projet qui, de toute évidence, n’est pas près de décoller malgré des annonces régulières de grand départ.
- De là à ce que ça vire au divorce, cela reste encore à démontrer. Car il n’y aura pas de retour en arrière. Mais un départ de l’Allemagne pourrait bien mettre au rebut l’ensemble du projet. À voir maintenant si Scholz est prêt à prendre cette responsabilité, ou s’il espère encore renégocier le projet. Car trahir un triumvirat (depuis porté à quatre) pour en rejoindre un autre, ça équivaut à ne pas se présenter comme un nouveau partenaire de confiance.