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L’aide militaire belge et européenne à l’Ukraine est-elle un don sans contrepartie ?

L’aide militaire belge et européenne à l’Ukraine est-elle un don sans contrepartie ?
Getty Images / Fotojet

Après 10 mois de conflit, les pays de l’UE n’ont pas laissé tomber l’Ukraine : ils continuent à lui envoyer ce qu’ils peuvent pour soutenir son effort de guerre. Une aide qui se chiffre en millions, selon les capacités de chaque pays. Mais il ne s’agit pas là de dilapider de l’argent public en période de crise.

Pourquoi est-ce important ?

L'Ukraine dépend toujours de l'aide occidentale pour résister à l'invasion russe, mais la crise énergétique s'éternise et les dettes publiques se creusent dans de nombreux pays. Au risque de nourrir une certaine lassitude des populations, et de voir certains camps politiques remettre ces dons en question. Ce qui serait du pain bénit pour Poutine.

Une aide déductible

L’Union européenne à la rescousse : face à l’investissement sans précédent que représente l’aide humanitaire et militaire à l’Ukraine, l’UE a mis en place le fonds de la Facilité européenne pour la paix, qui couvrira toutes ses actions extérieures ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense et relevant de la politique étrangère et de sécurité commune.

  • Mis en place en avril 2021, le fonds dispose d’un plafond de 5 milliards d’euros (au cours de 2018) pour la période 2021-2027, avec un plafond annuel allant de 420 millions d’euros en 2021 à 1,132 milliard d’euros en 2027. Une somme destinée à rembourser en partie les montants engagés par les gouvernements des États membres dans le soutien d’opérations de maintien de la paix, ou en renforçant la capacité de forces armées, y compris hors de l’UE.
  • Un organisme qui a donc été pensé avant le contexte du conflit actuel en Ukraine, et qui étend la capacité européenne d’assistance militaire, jusqu’ici limitée à des opérations dirigées par l’Union africaine ou des organisations régionales du continent africain.
  • Le remboursement par le FEP ne se fait que lorsque l’aide a effectivement été livrée à l’Ukraine nous précise le ministère de la Défense de notre pays. En septembre dernier, la valeur totale de l’aide militaire belge à l’Ukraine était estimée à 51 millions d’euros.

« La Défense introduit des demandes de remboursement pour tout le matériel qui est mis à disposition. À ce jour, la Belgique a eu confirmation qu’un montant de 4,5 millions d’euros pour l’appui militaire sera remboursé. Presque un million d’euros a déjà été versé.

Ludivine Dedonder (PS), ministre belge de la Défense

Pas d’intérêts sur la solidarité

Pas de dette envers l’UE pour l’Ukraine. Le système de remboursement mis en place ne concerne que l’UE ; le gouvernement ukrainien n’est pas sous le coup d’une sorte de prêt-bail vis-à-vis des pays qui lui fournissent armes et équipements. L’aide à l’Ukraine fournie par la Belgique se fait sans compensations conditionnelles ou préalables, insiste le ministère.

« L’aide apportée est plus large que l’appui matériel en armes. Celle-ci comporte également des dimensions d’assistance à la formation notamment dans le domaine du déminage, de la conduite de certaines opérations ainsi que des volets humanitaires. Dans le domaine de l’aide militaire matérielle, il a été décidé initialement de puiser dans les stocks d’armes disponibles pour fournir l’aide la plus immédiate et la plus urgente dans la première phase du conflit, sans exposer notre capacité opérationnelle. »

Ludivine Dedonder, ministre belge de la Défense?

Des difficultés d’un soutien à long terme. Que pouvons-nous encore envoyer aux Ukrainiens pour soutenir leur effort de guerre ? Une question corrélée à l’état de nos propres stocks.

  • Les pays d’Europe occidentale ont généralement réduit leurs investissements dans la défense depuis la fin de la guerre froide. Et même si depuis l’invasion de l’Ukraine ils font machine arrière, les effets doivent encore s’en faire sentir.
  • Notre pays ne dispose ainsi plus de « stock d’attrition » ; ou dit autrement, de matériel supplémentaire immédiatement disponible pour combler les pertes. Tout don de matériel lourd, comme des véhicules blindés, équivaudrait ainsi à puiser dans les capacités de notre propre armée. notre pays s’est d’ailleurs fait remarquer en juin dernier en envisageant de donner des obusiers qui avaient déjà été envoyés à la casse.
  • Il a été envisagé un temps de livrer des véhicules blindés Lynx : notre pays en dispose de 437 depuis 2007, dont 120 retirés du service suite à des problèmes techniques. Mais le ministère a rejeté cette possibilité tant que notre armée n’a pas de quoi les remplacer. Ce qui devrait être fait fin 2023 avec la livraison de 322 véhicules de commandement et de liaison (CLV) neufs, qui s’étaleront jusqu’en 2026.

« Lorsque la Belgique donne du matériel à l’Ukraine, elle le fait à la condition que celui-ci réponde aux besoins exprimés par le gouvernement ukrainien et à condition que celui-ci réponde aux normes de qualités attendues pour un emploi sur un théâtre d’opérations. La Belgique aide l’Ukraine consciencieusement, il ne s’agit pas de nous débarrasser de nos vieilleries pour avoir bonne conscience. »

Ludivine Dedonder, ministre belge de la Défense.
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