Il faut réfléchir à des dépenses plus efficaces, et non à une augmentation des impôts

En Belgique, nos dépenses publiques sont parmi les plus élevées des pays industrialisés, mais nous ne bénéficions certainement pas du meilleur service, en retour. Nos finances publiques pourraient être beaucoup plus efficaces. Tout exercice sérieux de redressement des finances publiques devrait commencer par là, et non par une augmentation des impôts.

Après une nuit de négociations, le gouvernement fédéral a récemment pu conclure l’examen du budget. Il a même consenti un effort budgétaire plus important que prévu, même si un effort de 0,3 % du PIB reste quasi négligeable sur un déficit budgétaire total de plus de 5 % du PIB (les attentes étaient très faibles). Des organisations telles que la Banque nationale, le Bureau du Plan, la Commission européenne ou l’OCDE partent du principe que notre déficit budgétaire restera autour de 5 % dans les années à venir, même en l’absence de nouveaux revers tels qu’une nouvelle récession ou une hausse plus forte que prévu des taux d’intérêt. Selon les nouvelles prévisions du FMI, la Belgique restera dans les années à venir avec le déficit budgétaire le plus élevé parmi les pays industrialisés, à l’exception des États-Unis.

Des efforts beaucoup plus importants seront donc nécessaires dans les années à venir, quoi qu’il en soit. Le vice-premier ministre Dermagne a déjà indiqué que, pour le PS, les prochains efforts devront provenir de recettes fiscales supplémentaires. D’autres partis de gauche sont également sur la même longueur d’onde et lancent rapidement de nouvelles idées d’impôts supplémentaires. L’année dernière, des doctorants gantois ont fait la une des journaux avec une proposition (peu étayée) visant à porter à 68 % le taux le plus élevé de l’impôt sur le revenu des personnes physiques (et ce, sans compter les cotisations sociales). Toutes ces propositions d’impôts supplémentaires semblent très faciles à comprendre (après tout, il s’agit toujours d’impôts supplémentaires sur les « autres », comme les entreprises, les riches…), mais elles ignorent complètement la réalité de nos dépenses publiques actuelles.

Les dépenses publiques les plus élevées d’Europe

La Belgique est aujourd’hui le deuxième pays d’Europe en termes de dépenses publiques, après la France. Et en raison du vieillissement de la population, les dépenses de pensions et de soins augmenteront nettement plus en Belgique qu’en France dans les décennies à venir. Si nous n’agissons pas, nous dépasserons la France en termes de dépenses publiques totales. Selon le FMI, si la politique reste inchangée, les dépenses publiques belges atteindront 57 % du PIB en 2028, soit le taux le plus élevé parmi les pays industrialisés.

« Des dépenses publiques élevées ». Dépenses publiques en termes de % du PIB, projection pour 2028.

Les dépenses publiques élevées ne sont pas nécessairement un problème en soi. Tout dépend de ce que l’on obtient en retour. La Belgique est aujourd’hui le deuxième pays d’Europe en termes de dépenses publiques, mais ce n’est certainement pas pour autant que nous obtenons les deuxièmes meilleurs services et politiques publics en retour. La qualité de ces politiques ne peut pas être mesurée directement. Au Voka (organisation patronale flamande), nous le faisons à l’aide de 57 indicateurs, allant des indicateurs commerciaux aux indicateurs sociaux, en passant par les mesures de la qualité des soins de santé et de l’infrastructure. Sur la base de ces indicateurs, la Belgique ne se classe qu’au 17e rang européen pour la qualité globale de sa politique. En Belgique, nous payons cher pour des politiques publiques médiocres.

Un rapport qualité-prix insuffisant

Pas moins de 15 pays européens offrent des services et des politiques publics d’une qualité identique ou supérieure pour des dépenses publiques inférieures. La qualité des politiques dans les pays scandinaves est nettement supérieure à celle de la Belgique, alors que les dépenses publiques y sont en moyenne inférieures de 5 % du PIB. Au niveau belge, cela correspond à quelque 30 milliards d’euros de dépenses. Cela suggère que dans notre pays aussi, le gouvernement devrait être en mesure d’offrir plus de qualité avec moins de dépenses.

15 pays offrent une qualité supérieure ou identique avec des dépenses inférieures ou identiques.

Dans ce contexte, il est étrange de plaider en faveur d’impôts supplémentaires dans le cadre de l’assainissement des finances publiques. En outre, si nous voulions combler le déficit budgétaire actuel de cette manière, nous nous dirigerions vers la charge fiscale la plus élevée d’Europe, et ce de loin. Cela aurait sans aucun doute des conséquences désastreuses sur notre potentiel économique. Pour assainir les finances publiques, il faut beaucoup plus de personnes qui travaillent et, surtout, un État beaucoup plus efficace. La plupart des autres pays européens parviennent à mener une politique de qualité nettement supérieure tout en dépensant moins. Cela devrait être possible en Belgique également. Par conséquent, tout exercice sérieux visant à remettre nos finances publiques sur les rails doit commencer par les dépenses et non par des impôts supplémentaires. Il est urgent de s’y atteler.


Bart Van Craeynest est économiste en chef chez Voka et auteur du livre Terug naar de feiten (« Retourner aux faits »)

CP

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