Avec la menace de manquer de gaz, les projets d’exploitation, jusque-là repoussés ou inexplorés, gagnent de l’intérêt dans de nombreux pays européens. Certains d’entre eux ont en effet des réserves inexploitées sous les pieds. D’autres, cependant, ferment catégoriquement la porte.
Pologne, Bulgarie, Pays-Bas, France, Danemark… la Russie ferme petit à petit le robinet à gaz aux pays européens. Gaz naturel liquéfié des Etats-Unis, du Qatar, relance du charbon, prolongation du nucléaire, prolifération de l’hydrogène et des énergies renouvelables… les pays font feu de tout bois pour ne pas manquer d’approvisionnement en énergie, surtout que d’ici la fin de l’année, l’Europe veut se débarrasser de deux tiers des importations de gaz russe.
Dans cette course aux ressources, un autre élément revient sur le devant de la scène : les réserves de gaz naturel qui se trouvent sous le sol européen. Des projets avaient été laissés de côté, ou jamais vraiment lancés, mais désormais ils renaissent de leurs cendres, selon un coup de sonde d’Euractiv.
Accommodation de la législation
- Dans la mer du Nord, entre l’Allemagne et les Pays-Bas, un projet commun d’exploitation des réserves de gaz est prévu depuis un bout de temps. Mais ce projet a trainé ces dernières années, surtout au niveau de l’obtention de permis environnementaux, que le Land allemand de Basse-Saxe bloquait. Or, la guerre a mis un coup de pied dans la machine administrative et le forage peut à présent commencer en 2024.
- L’Italie aussi est assise sur une importante réserve, estimée à entre 70 et 90 milliards de mètres cube. La République transalpine extrait tous les ans 3,3 milliards de mètres cube, mais ces autres réserves sont protégées par la loi. Le Premier ministre Draghi et le ministre de la Transition écologique Cingolani ont en tout cas déjà laissé entendre le souhait d’augmenter les activités d’extraction.
- La Roumanie, comme nous l’écrivions, a de très importantes réserves de gaz en mer Noire (150 à 200 milliards de mètres cubes), qui sont pour l’heure intouchées. Le gouvernement a récemment levé les interdictions d’exploiter ces réserves. Mais cela prendra des années avant leur exploitation.
- La Norvège est déjà un grand producteur de gaz et a aussi d’importantes réserves (les deuxièmes du continent après la Roumanie). Le royaume s’est engagé à aider l’Europe à remplacer une part du gaz russe et le gouvernement a donné les autorisations pour forer davantage.
- En Slovaquie, une réserve de gaz a été découverte il y a quelques années, qui pourrait couvrir 10% de la consommation annuelle du pays (cinq milliards de mètres cubes). Les projets d’exploitation ont toujours été repoussés, notamment par les activistes du climat, mais ils gagnent dernièrement beaucoup d’intérêt. Le forage pourrait commencer dans deux ans, d’après les estimations.
- L’Albanie a également des réserves, jusque-là inexploitées. Le pays ne consomme actuellement pas ou très peu de gaz (une grande partie de son électricité provient de ses barrages), mais le gouvernement aimerait accroître la part du gaz dans le mix énergétique. Des projets d’exploitation seront ainsi lancés bientôt. Le pays veut également se doter d’un terminal flottant.
Les réserves qui resteront inexploitées
- Tous les pays ne suivent pas cette course au gaz. La Bulgarie par exemple est assise sur des réserves totales de 480 milliards de mètres cubes de gaz de schiste. Son exploitation est interdite et une autorisation n’est pas en vue.
- En France, même son de cloche. Le pays est doté de réserves en mer et sous terre, mais leur exploitation est interdite, et il n’y a pour le moment pas d’ambitions pour changer les choses.
Les ambitions climatiques au second plan
Dans cette course au gaz, la Commission européenne, à travers sa présidente Ursula Von der Leyen, a déjà rappelé aux pays de ne pas revenir sur leurs engagements climatiques à long terme, qui prévoient la réduction progressive des émissions de gaz à effet de serre et la suppression des énergies fossiles.
Mais dans l’immédiat, ces ambitions climatiques semblent passer au second plan, notamment avec la relance des centrales à charbon, qui sont les plus polluantes. De tels projets d’extraction ont un impact sur l’environnement et sur la biodiversité, et c’est souvent pour cela qu’ils sont repoussés. Pour le gaz de schiste, entre autres, le procédé d’extraction est très polluant.