Depuis plusieurs mois, l’Ukraine s’inquiète des rassemblements d’hommes et de matériel russe à ses frontières. Une crainte qui se fait encore plus vive ces dernières semaines. Les Etats-Unis confirment que Kiev a des raisons d’avoir peur… mais en sont-ils indirectement responsables ?
L’Ukraine tremble. Selon elle, la Russie a déployé des dizaines de milliers d’hommes aux frontières. On parle de 90.000 à 150.000 soldats russes entourant l’Ukraine. Prêts à l’attaquer, craint Kiev, qui urge ses alliés otaniens, et surtout américains, de faire quelque chose.
Toutefois, ni les Etats-Unis ni l’OTAN n’ont récemment confirmé être prêts à mener une intervention militaire directe face à la Russie. Bien qu’ils comprennent les inquiétudes ukrainiennes.
Le Chef d’État-Major des armées s’exprime
Face à ces tensions grandissantes, le Chef d’État-Major des armées, le général Mark Milley, a donné son avis sur la question, rapporte Reuters. Il a confirmé que les Etats-Unis surveillaient les agissements russes de très près, sans dévoiler ce qu’ils savaient vraiment. Mais, visiblement, il y a de quoi être inquiet.
« Je ne vais pas vous dire ce que nous suivons et les indicateurs ou les avertissements du point de vue du renseignement, mais nous les suivons tous », a déclaré le général Milley. « Et il y en a suffisamment pour susciter beaucoup d’inquiétude, et nous continuerons à les surveiller. »
A l’image des plus hauts responsables politiques américains, le plus haut gradé a refusé de spéculer sur le type d’options que les États-Unis pourraient envisager en cas d’invasion russe. Il a toutefois souligné l’importance de la souveraineté de l’Ukraine pour Washington et pour l’alliance de l’OTAN.
« Les intérêts de sécurité nationale des États-Unis et des États membres de l’OTAN sont en jeu s’il y avait un acte manifeste d’agression militaire de la part des Russes dans un État-nation indépendant depuis 1991 », a-t-il souligné.
L’Ukraine ne fait pas partie de l’OTAN, mais elle souhaite l’intégrer le plus vite possible. Ce qui a le don se sérieusement irriter Moscou.
Les conséquences du retrait US en Afghanistan ?
Le général Milley a également été interrogé sur une autre question épineuse: les conséquences du retrait des troupes américaines en Afghanistan, ordonné l’été dernier par le président Joe Biden. Ce départ a été considéré par beaucoup comme un aveu de faiblesse de la part des Etats-Unis, qui ont laissé les talibans reprendre les rênes du pays.
La décision de Biden a-t-elle augmenté la confiance de Poutine vis-à-vis d’une potentielle invasion de l’Ukraine ? Le général Milley ne l’a pas reconnu. Mais il ne l’a pas non plus totalement nié.
« Il faut demander à Poutine », a-t-il réagi. « Je pense que ce serait une erreur pour tout pays de tirer une conclusion stratégique générale basée sur le retrait des États-Unis d’Afghanistan et de prendre cet événement et de l’appliquer automatiquement à d’autres situations. »
Le Chef d’État-Major des armées a ensuite cité des exemples historiques de présidents américains qui ont retiré leurs troupes dans certains endroits, mais ont ordonné une action militaire ailleurs. « Les États-Unis sont donc parfois un pays difficile à comprendre pour les autres pays », a-t-il concédé.
Biden et Poutine vont se parler
Jeudi, le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken a à nouveau prévenu la Russie qu’elle n’avait pas intérêt à envahir l’Ukraine. Tout en, encore une fois, évitant d’énoncer clairement quelle pourrait être la réaction américaine, se contentant de dire que « Moscou connaît très bien l’univers de ce qui est possible ».
« J’ai exprimé très clairement nos profondes préoccupations et notre détermination à tenir la Russie responsable de ses actes, y compris notre engagement à travailler avec les alliés européens pour imposer des coûts et des conséquences sévères à la Russie si elle prend de nouvelles mesures agressives contre l’Ukraine », a-t-il déclaré à l’issue d’une réunion avec ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov. Une discussion tenue à Stockholm, qu’il a qualifiée de « franche ».
« Il appartient maintenant à la Russie de désamorcer les tensions actuelles en annulant le récent renforcement des troupes, en ramenant les forces à des positions normales en temps de paix et en s’abstenant de toute nouvelle intimidation et tentative de déstabilisation de l’Ukraine », a ajouté M. Blinken, dans des propos rapportés par Reuters.
Le secrétaire d’Etat américain a annoncé que Biden et Poutine discuteraient « probablement » de la situation dans un « avenir proche ».
De son côté, M. Lavrov a déclaré que Moscou était prêt à dialoguer avec Kiev. « Nous, comme le président Poutine l’a déclaré, ne voulons aucun conflit », a-t-il assuré.