Cela ressemblait plus à un « skypéro » qu’à une réunion de crise. Mais lors de cette récente visioconférence dédiée à la communauté Vitae, des proches des responsables arrêtés en Belgique ont tenté de totalement rassurer les troupes. En substance, un gigantesque quiproquo : l’entreprise est irréprochable et les enquêteurs belges ne comprennent rien à son fonctionnement. Ambiance.
Dimanche 4 juillet. Quelque 500 participants venus d’Europe, d’Afrique et d’Asie rejoignent une nouvelle visioconférence Vitae. La maîtresse de cérémonie, une Vietnamienne au large sourire, les accueille et introduit rapidement le premier intervenant. Nous le surnommerons Pieter. Un account manager indépendant de la région d’Anvers. C’est un proche des directeurs de Vitae arrêtés par la police deux semaines auparavant. Il est là pour tenter de dissiper les craintes et partager le peu de nouvelles dont il dispose.
« Je remercie tout le monde pour son soutien envers Mendy (le directeur commercial de Vitae, ndlr), Shrage (le directeur opérationnel) et les autres personnes emprisonnées », entame sereinement ce membre belge du projet incriminé. « Ils sont bien conscients de tout ce que vous faites, de la pétition, des vidéos, ça leur procure beaucoup d’énergie. Ils sont vraiment optimistes et ça leur donne plus de force pour se battre. Car ce que font les autorités est mal. »
Prenant soin d’insister sur le fait qu’il ne soit qu’un membre comme tous ceux qui participent à la conférence, Pieter explique toutefois qu’il connaît bien les responsables anversois qui ont été arrêtés et qu’il a pu glaner quelques informations. De maigres infos qui lui permettent d’assurer que « les avocats de Vitae travaillent dur ».
De accusations infondées et « inconnues »
Après l’intervention des forces de l’ordre et les actions coordonnées avec le soutien d’Europol en Suisse où siège l’entreprise, Vitae n’en est toujours pas au stade de procès. Les suspects, pour la plupart en détention préventive, auraient été auditionnés ce mardi par le juge d’instruction. Mais, selon les dires de leur proche, les responsables de Vitae ne savent toujours pas de quoi ils sont accusés.
« Jusqu’ici, la police et la justice pensent qu’ils ont une affaire. Nous savons tous que Vitae n’est pas simple à comprendre. Rappelons-nous la première fois que nous avons entendu parler de Vitae, nous n’avions pas cerné toute la puissance de Vitae, à quel point c’est un système unique, sans précédent », remet en contexte Pieter.
Le conférencier improvisé en appelle donc à poursuivre les efforts, pour afficher tout le soutien international à Vitae AG.
« Continuons nos actions pour montrer au juge et à la police qu’ils ont tort. Ils pensent qu’ils ont découvert une énorme fraude de type Ponzi. Vitae n’est pas un système de Ponzi. Sur Vitae, vous rejoignez la communauté gratuitement. C’est un nouveau genre de réseau social qui ne ressemble à aucun autre gros média social où la gratuité n’est qu’un mensonge : c’est gratuit en échange de vos données, de votre vie privée », plaide le membre belge.
Un projet crypto-social menacé par la Belgique
Demeurant jusque-là calme et relativement mesuré dans ses propos, Pieter essaie de démontrer que la justice belge commet une erreur lorsqu’elle pense avoir démantelé une fraude pyramidale. Il affirme que contrairement à ce genre de fraude où ce sont « les gens au sommet qui gagnent le plus d’argent », Vitae récompense les membres les plus actifs. Comme ceux de la communauté vietnamienne, donne-t-il en exemple, « qui ramènent toujours plus de nouveaux membres ».
Il explique que les autorités belges ne saisissent pas le principe de Vitae qui est un projet de réseau social où règne la liberté d’expression. Et qui n’est pas une plateforme d’investissement, la crypto Vitae n’étant qu’un utility token. Petite parenthèse technique, des entreprises recourent à ces « jetons d’utilité » afin de créer de l’intérêt pour leurs produits et permettre aux utilisateurs d’accéder à des services dans des écosystèmes blockchain.
Puis Pieter en vient à condamner le rôle de son pays.
« La justice belge dit que des centaines et des milliers de personnes ont perdu leur argent à cause de cette fraude à la Ponzi, à cause d’abus de confiance. Ce n’est pas la vérité. La vérité est que les détenteurs de tokens Vitae perdent de l’argent en ce moment à cause de la fermeture de notre plateforme sociale. C’est à cause de la justice, de la police, du gouvernement belge. Ils essaient de voler notre argent, de voler notre boulot, de voler notre espoir », affirme le membre belge, exhortant ses « frères et sœurs » à exprimer leur volonté de récupérer leur média social pour « offrir la prospérité à tout le monde. »
« Un merdier créé par les enquêteurs »
Une autre personnalité de Vitae prend alors la parole depuis le Royaume-Uni. Active dans le marketing de réseau, cette femme au prénom scandinave est vraisemblablement l’auteure de la pétition en ligne dont le compteur s’affole. Nous l’appellerons Sigbritt. Elle n’intervient que pour appuyer sur un seul point, la totale respectabilité de l’entreprise.
« Je ne veux vraiment pas en dire trop et dois me limiter aux faits. Vitae AG, l’entreprise, est 100% légitime. Nous ne voulons pas être démoralisés par toutes ces choses négatives que raconte la presse et certaines personnes. Nous avons la certitude que c’est une entreprise tout-à-fait légale. La preuve, tout le monde a été payé et est encore rémunéré dans la communauté », soutient Sigbritt, répétant que la situation est à aborder avec optimisme et que tous les membres doivent aider les fondateurs à récupérer le réseau social Vitae.
Un troisième membre intervient ensuite dans la discussion depuis Bruxelles. Un ancien journaliste néerlandophone qu’on baptisera Johan ici. Pour lui, cette affaire judiciaire relève d’un surréaliste cercle vicieux.
« Les enquêteurs ne comprennent pas Vitae. Et le problème est qu’ils ne savent pas comment sortir de ce merdier qu’ils ont créé. En effet, c’est compliqué, ça prend du temps pour savoir comment Vitae fonctionne. Pour devenir médecin, on étudie. Pour Vitae, c’est la même chose, il faut aussi étudier beaucoup. Les enquêteurs découvrent à peine Vitae », estime Johan, sous-entendant qu’il faudra du temps à la justice belge pour s’en démêler et que la situation requiert dès lors de la patience…
Pour mot de la fin, Pieter, le membre le plus proche des directeurs inquiétés par la justice, conclut que « les responsables de Vitae ne sont pas des criminels mais portent juste un complexe et ambitieux projet. »
Pour aller plus loin:
- Affaire Vitae: étrange mobilisation mondiale, près de 30.000 personnes blâment la justice belge
- Affaire Vitae: choqués par la justice belge, des milliers de signataires réclament la réouverture de la plateforme
- Escroquerie Vitae: la CEO de l’entreprise crypto est une ancienne avocate de Crédit Suisse, diplômée d’Harvard
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