Alors que l’OTAN débat de l’augmentation de ses dépenses de défense à 5 pour cent du PIB, la Belgique, membre fondateur de l’alliance, se trouve à la croisée des chemins. Elle ne consacre actuellement que 1,3 pour cent de son PIB à la défense, mais l’augmentation proposée à 5 pour cent – équivalant à 22,13 milliards d’euros supplémentaires sur la base d’une projection de PIB de 598 milliards d’euros en 2025 – représenterait un énorme changement dans les priorités nationales. Bien qu’une telle mesure soit le signe d’un engagement fort envers l’OTAN, elle risque d’alourdir la dette nationale déjà élevée de la Belgique, d’exercer une pression sur les programmes sociaux et de susciter une controverse politique interne.
Principaux renseignements
- Pressions budgétaires et risques d’endettement : L’augmentation des dépenses de défense à 5 pour cent du PIB augmenterait considérablement la dette publique de la Belgique, qui s’élève déjà à 104,7 pour cent du PIB, ce qui pourrait accroître les coûts de financement et rendre la Belgique dépendante des prêts de l’UE ou des ajustements budgétaires, a averti le ministre du Budget, Vincent Van Peteghem.
- L’augmentation des dépenses proposée pourrait conduire à des coupes dans les solides programmes sociaux de la Belgique, qui représentent 29 pour cent du PIB, ce qui entraînerait le mécontentement du public et l’instabilité politique d’un gouvernement de coalition déjà soumis à la pression des divisions régionales.
- L’alignement sur un objectif de défense de l’OTAN de 5 pour cent améliorerait le statut international de la Belgique, mais les avantages économiques sont incertains et le soutien national pourrait s’affaiblir en raison du compromis entre les priorités en matière de protection sociale et de croissance.
La pression financière est forte
Selon Statista, la dette publique de la Belgique, qui s’élevait à 104,7 pour cent du PIB en 2024, atteindra 118,95 pour cent en 2029. L’augmentation des dépenses de défense de 22 milliards d’euros supplémentaires par an accélérerait probablement cette trajectoire, en augmentant les coûts d’emprunt et en creusant les déficits. Les prévisions de la Commission européenne pour mai 2025 soulignent ces inquiétudes en notant que l’augmentation des dépenses, y compris de défense, accroîtra le déficit budgétaire de la Belgique. Le ministre du Budget, Vincent Van Peteghem, a averti en avril 2025 que de telles dépenses pourraient entraîner des coupes dans les programmes d’aide sociale.
Pour financer cette augmentation, la Belgique pourrait recourir à des prêts de l’UE ou à des clauses de sauvegarde budgétaire – des dérogations temporaires aux règles budgétaires européennes accordées dans des circonstances exceptionnelles, telles qu’une crise économique – mais ces mesures pourraient augmenter les coûts d’emprunt à long terme, alourdissant le fardeau d’une économie déjà aux prises avec des niveaux d’endettement élevés. Le défi budgétaire est clair : en l’absence d’augmentations significatives des recettes, la trajectoire vers des dépenses de défense de 5 pour cent pourrait mettre la santé budgétaire de la Belgique au bord de l’effondrement.
Implications économiques
Les conséquences économiques d’une telle augmentation des dépenses sont complexes. Des recherches menées par l’Institut Kiel suggèrent que des dépenses de défense de 3,5 pour cent du PIB pourraient stimuler la croissance économique de 0,9 pour cent à 1,5 pour cent par an si elles étaient axées sur des armements de haute technologie produits dans le pays. Cependant, Goldman Sachs estime que le multiplicateur fiscal est modeste, de l’ordre de 0,5, ce qui signifie que chaque 100 euros dépensés ne génère que 50 euros de croissance du PIB sur deux ans, en particulier si les importations dominent. Pour la Belgique, une petite économie dépendante du commerce, le fait de détourner des ressources de secteurs tels que l’éducation et l’énergie propre – connus pour créer plus d’emplois – pourrait limiter la croissance globale. Le projet « Costs of War » note que les secteurs non liés à la défense génèrent souvent des bénéfices économiques plus importants, ce qui suggère que l’impact économique net de la Belgique pourrait être négatif.
Si les industries liées à la défense pourraient bénéficier d’un coup de pouce, la situation économique générale reste incertaine, les risques commerciaux et la réaffectation des ressources posant des défis importants.
Les programmes sociaux en danger
Les dépenses sociales de la Belgique, qui représentent 29 pour cent du PIB, sont à la base de son solide État-providence, notamment en matière de soins de santé et d’éducation. Selon le cabinet de données Trading Economics, les dépenses publiques totales s’élèvent à 54,5 pour cent du PIB en 2024. L’affectation de 5 pour cent à la défense nécessiterait probablement de réduire ces programmes, ce qui pourrait éroder le soutien de l’opinion publique. Le rapport du FMI de 2023 sur l’assainissement des finances publiques belges a souligné la nécessité de rationaliser les prestations sociales pour maîtriser la dette, et de nouvelles coupes dans la défense pourraient accroître le mécontentement de la population. Dans un pays ayant une forte tradition de sécurité sociale, de telles coupes pourraient déclencher des protestations ou des troubles sociaux, en particulier parmi ceux qui dépendent de ces services.
Les défis politiques à venir
Les conséquences politiques de la priorité donnée à la défense sur les dépenses sociales sont importantes. Dans une interview accordée à Bloomberg en juin 2025, le Premier ministre Bart De Wever a décrit l’objectif de 5 pour cent comme une « pilule amère à avaler », mais nécessaire pour la sécurité. Mais trouver un équilibre entre cet objectif et les priorités nationales pourrait mettre la pression sur le gouvernement de coalition belge, qui est déjà confronté à des tensions entre la Flandre et la Wallonie. Les avertissements du ministre du Budget, Van Peteghem, concernant les réductions de la sécurité sociale soulignent le potentiel d’instabilité politique, car le mécontentement de la population pourrait mettre à l’épreuve la cohésion du gouvernement.
Un rôle plus important pour l’OTAN, mais à quel prix?
Sur le plan international, l’adoption d’un objectif de défense de 5 pour cent du PIB placerait la Belgique en position de leader au sein de l’OTAN, d’autant plus que les tensions avec la Russie augmentent et que les États-Unis font pression pour accroître leurs contributions. Un rapport de Bloomberg du 17 juin 2025 a noté le soutien de la Belgique à l’objectif, bien qu’il ait insisté sur la flexibilité dans la comptabilisation des infrastructures comme dépenses de défense. Cette position pourrait accroître l’influence de la Belgique au sein de l’alliance et encourager d’autres membres à suivre son exemple. Toutefois, le soutien national pourrait s’estomper si les coûts économiques et sociaux devenaient trop importants.
À titre de comparaison, des pays comme Israël (5,7 pour cent du PIB) et l’Arabie saoudite (8,4 pour cent) maintiennent des dépenses de défense élevées en raison de menaces sécuritaires uniques, mais le contexte de la Belgique est différent. Parmi les pays de l’OTAN, les États-Unis (3,28 pour cent) et la Pologne (3,05 pour cent) dépensent beaucoup moins, ce qui souligne le caractère sans précédent d’un objectif de 5 pour cent pour une petite économie comme celle de la Belgique.
Naviguer dans un équilibre délicat
Le passage éventuel de la Belgique à des dépenses de défense de 5 pour cent du PIB reflète l’orientation plus large de l’OTAN en faveur de la sécurité collective, mais s’accompagne de compromis considérables. L’augmentation de la dette, les coupes éventuelles dans les services sociaux et les gains économiques limités pourraient alimenter les troubles intérieurs et l’instabilité politique. Bien que cette décision renforce le statut de la Belgique au sein de l’OTAN, le gouvernement doit soigneusement peser ces coûts par rapport aux avantages d’un plus grand engagement dans l’alliance. Au fur et à mesure des discussions du prochain sommet de l’OTAN, les dirigeants belges seront confrontés à la tâche ardue de trouver un équilibre entre les responsabilités mondiales et les réalités nationales.
Pour l’instant, la voie à suivre reste incertaine, mais les enjeux ne pourraient être plus importants.