Des chercheurs ont mis au point une machine dotée d’une intelligence artificielle permettant de percer les secrets de l’attractivité. D’abord, l’ordinateur parvient à déceler les personnes qui nous plaisent. Ensuite, il crée de nouveaux visages, censés nous attirer encore davantage. Mais à quoi tout cela peut-il bien servir ?
‘La beauté est dans les yeux de celui qui regarde’, a dit Oscar Wilde. Demander à un ordinateur de concevoir le visage qui correspond au mieux à nos critères de beauté semblait donc s’assimiler à une tâche très ardue. Cette idée, a priori saugrenue, nous est venue de chercheurs en informatique et en psychologie des universités de Helsinki et de Copenhague. Afin de tester les capacités de leur création, ils ont convié 30 participants à une sorte de séance Tinder virtuelle.
Pleine réussite
D’abord, les participants ont regardé un écran, sur lequel défilaient des visages fictifs, générés à partir de 200.000 photos de célébrités. Ils ne devaient pas swiper à droite ou à gauche pour dire si ces faciès leur plaisaient. En réalité, ils portaient un casque muni d’électrodes. Les réactions de leur cerveau étaient alors captées via un encéphalogramme. Ces données ont ensuite été envoyées à une machine dotée d’intelligence artificielle. Cette IA est enfin parvenue à identifier les critères d’attractivité propres à chacun des participants.
La machine a ensuite élaboré de nouveaux visages. Certains ont été conçus pour plaire spécifiquement à chaque participant, d’autres pas. Les participants ont ensuite été mis face à ces autres visages créés. Et, là encore, la machine a calculé, via les mesures d’électroencéphalographie, l’attractivité ressentie par les participants vis-à-vis de chacun de ces visages montés de toutes pièces.
Les résultats sont implacables: la machine sait percer le secret de l’attractivité humaine. Ainsi, les visages conçus « sur mesure » afin de plaire spécifiquement à chacun des participants ont été perçus comme attractifs dans 80% des cas. À l’inverse, les visages créés aléatoirement n’ont été considérés comme attractifs que dans 20% des cas. Conclusion: l’IA parvient à analyser notre activité neuronale pour tirer les préférences les plus intimes de chacun d’entre nous, comme nos critères d’attractivité.
Quelles applications ?
‘Dans nos études précédentes, nous avons conçu des modèles capables d’identifier et de contrôler des caractéristiques simples du portrait, comme la couleur des cheveux et l’émotion. Cependant, les gens sont largement d’accord sur qui est blond et qui sourit. L’attrait est un sujet d’étude plus difficile, car il est associé à des facteurs culturels et psychologiques qui jouent probablement un rôle inconscient dans nos préférences individuelles’, a noté le Michiel Spapé, chercheur au département de psychologie et de logopédie de l’université de Helsinki et coauteur de l’étude.
Les chercheurs ont donc désormais franchi une étape importante: ‘générer des images qui correspondent aux préférences personnelles en connectant un réseau neuronal artificiel aux réponses du cerveau’. ‘Réussir à évaluer l’attractivité est particulièrement important, car il s’agit d’une propriété psychologique poignante des stimuli’, rappelle le chercheur finlandais.
Les auteurs de l’étude espèrent que leur travail va permettre d’améliorer les capacités d’apprentissage et de compréhension des ordinateurs des préférences subjectives des êtres humains. Ils espèrent ainsi pouvoir créer des IA ‘capables d’examiner d’autres fonctions cognitives telles que la perception et la prise de décision’. ‘Potentiellement, nous pourrions orienter le dispositif vers l’identification des stéréotypes ou des préjugés implicites et mieux comprendre les différences individuelles’, conclut Michiel Spapé.
Les résultats ont été publiés dans la revue IEEE Transactions on Affective Computing.