Si cela dépendait du PS, la sortie du nucléaire serait suivie par la sortie de l’e-commerce

À la fin de cette semaine, le gouvernement fédéral se réunira pour discuter des réformes du marché du travail. Le travail de nuit dans l’e-commerce doit notamment être assoupli, mais le président du PS Paul Magnette pense le contraire. Il plaide dans Humo pour une sortie complète de l’e-commerce. Il ne s’inquiète pas trop des pertes d’emplois.

Dans une double interview approfondie de Paul Magnette et de son fidèle lieutenant Thomas Dermine, secrétaire d’Etat à la Relance, le président du PS indique que la Belgique devrait être un saumon qui nage à contre-courant.

« Je ne pense pas que l’e-commerce soit un progrès, mais une dégradation sociale et environnementale », dit-il. « Pourquoi devons-nous faire travailler les ouvriers dans ces entrepôts la nuit ? Parce que les gens veulent acheter à toute heure et ramener leurs colis chez eux dans les 24 heures. »

Transition verte

En outre, Magnette mentionne également que son idée s’inscrit dans le cadre de la transition écologique. « N’est-il pas dommageable que chaque jour, des milliers de camionnettes de livraison circulent pour apporter aux gens cinq paires de chaussures le plus rapidement possible, dont ils peuvent ensuite en retourner quatre gratuitement ? Quel gaspillage de carton, de carburant et d’énergie ! »

Les déclarations du président du PS provoquent déjà des tensions auprès des partenaires de la Vivaldi, du côté de la famille libérale. Le président du MR, Georges-Louis Bouchez, dont le parti est désigné par Magnette comme le gros problème au sein de la coalition Vivaldi, entre autres, a déjà réagi via Twitter :

Les économistes sont critiques

Outre les conditions de travail et l’impact écologique du commerce électronique, les plans de Magnette visant à mettre fin à l’e-commerce en Belgique suscitent également l’inquiétude de divers économistes. Ils mettent surtout en avant la perte d’emplois : les entreprises internationales de commerce électronique placent déjà leurs centres de distribution juste de l’autre côté de la frontière, en France, aux Pays-Bas ou en Allemagne, car ces pays ont des règles et des conditions salariales beaucoup moins strictes que la Belgique.

Les centres de distribution autour de la frontière. crédit : Comeos

Magnette lui-même ne voit pas cela comme un problème : « Le gros problème n’est pas le chômage, mais les malades de longue durée. Et ce secteur va exacerber ce problème. C’est pourquoi je voudrais réaliser l’étape du commerce électronique après l’activité principale. Faisons de la Belgique un pays sans e-commerce, avec de vrais commerces et des villes vivantes. »

Mais Stijn Baert, professeur d’économie du travail à l’université de Gand, est également critique à l’égard des déclarations de M. Magnette. « Celui qui attend encore des choses sérieuses de Vivaldi, devrait lire ceci. Réformer les retraites ou le marché du travail, Paul Magnette et Thomas Dermine disent que ce n’est pas nécessaire. Ce qu’ils veulent eux-mêmes (comme une pension minimale plus élevée), ils l’ont déjà obtenu. Hallucinant », dit Baert sur Twitter.

Bart Van Craeynest, économiste en chef de Voka, se concentre sur le chômage en Wallonie : une personne sur trois entre 20 et 64 ans en Wallonie est déjà au chômage. La suppression du commerce électronique semble ne faire que pousser ce chiffre encore plus haut.

Soutien des Verts?

Ce matin, nous écrivions que le PS pestait qu’il n’avait jamais le soutien des Verts. Les propos de Magnette sur l’e-commerce ne semblent alors pas être tombés dans l’oreille d’une sourde : Zakia Khattabi, ministre fédérale du Climat et de l’Environnement, en profite pour demander de « renforcer l’inspection du e-commerce ». Le député Gilles Vanden Burre est plus sévère et demande au président du PS de ne pas confondre Amazon et les petits commerçants faisant appel à l’e-commerce.

En tout cas, les propos de Paul Magnette font fortement réagir. A voir si sa vision des choses survivra à la réunion pour la réforme du marché du travail, ou si elle ne fera qu’ajouter de la tension à la réunion. Pour l’heure, elle a déjà tout d’un faux accord de plus pour la Vivaldi.

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