Les représailles de Poutine aux entreprises occidentales : pour quitter la Russie, il faudra d’abord passer par la caisse

Le président russe entend bien dissuader les entreprises occidentales de quitter le pays suite à l’invasion de l’Ukraine et aux sanctions, au moyen d’un mode de chantage vieux comme le monde : l’argent.

Pourquoi est-ce important ?

À la suite de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, de nombreuses entreprises occidentales ont clamé haut et fort qu'elles quitteraient le pays. Un an plus tard, la moitié d'entre elles sont encore présentes dans le pays, et leur porte de sortie se rétrécit encore avec une nouvelle taxe imposée par le Kremlin.

Dans l’actu : Les entreprises occidentales qui souhaitent sortir de Russie doivent payer un « don obligatoire » imposé par le Kremlin.

  • Celui-ci s’élève à 5% de la valeur marchande des actifs concernés, selon un document publié lundi par le ministère des Finances.
  • Si l’entreprise cherche à vendre au rabais ses activités en Russie avant de partir, elle devra même payer 10% du produit de la vente au budget russe. Une façon pour Moscou de s’assurer que les entreprises ne cèdent pas leurs filiales pour une bouchée de pain.
  • Les entreprises concernées sont celles provenant de « pays inamicaux », définis comme ceux ayant imposé des sanctions à la Russie à la suite de son invasion de l’Ukraine.
  • Un coup dur pour ces sociétés sur le départ, qui sont déjà contraintes de vendre leurs activités à des prix très réduits, avec d’importantes dépréciations, parfois pour une somme symbolique.
    • En outre, les vendeurs pouvaient auparavant choisir entre verser immédiatement 10% de la valeur totale de la transaction au budget fédéral de la Russie ou échelonner leur paiement sur une période d’un à deux ans. Cette seconde option a été supprimée.

Le détail : Combien d’entreprises sont concernées ?

  • Plus de 1.000 entreprises ont annoncé qu’elles allaient réduire leur présence en Russie deux mois seulement après le début de la guerre en Ukraine en février 2022.
  • Mais selon une étude en cours dirigée par Jeffrey Sonnenfeld, professeur à la Yale School of Management, seules 520 entreprises ont jusqu’à présent réalisé une rupture nette avec le pays.
  • 550 entreprises étrangères y sont encore largement actives, provenant par exemple des États-Unis, de France, d’Allemagne ou d’Italie.
  • On retrouve également une entreprise basée en Belgique, Deep in Russia, une agence de voyages pour partir au ski qui continue à proposer des excursions en Russie.
  • Selon le Financial Times, plus de 2.000 entreprises souhaitent actuellement quitter le marché russe.

Bloquées en Russie

Les conséquences : à cause de cette « taxe de sortie », comme l’appelle le journal Les Echos, les entreprises concernées ont bien du mal à quitter le pays.

  • Les filiales d’entreprises étrangères « ont généralement de nombreuses obligations contractuelles et légales auxquelles elles ne peuvent pas simplement se soustraire », écrivent Saul Estrin et Klaus Meyer, professeurs à la London School of Economics et à l’Ivey Business School.
  • « Un retrait soudain est susceptible d’entraîner des poursuites judiciaires de la part des partenaires commerciaux ou des autorités », ajoutent-ils.
  • En outre, le processus de sortie est considérablement ralenti, car l’autorité chargée de traiter ces demandes ne se réunit que trois fois par mois et examine jusqu’à sept demandes à chaque réunion, pointe le Financial Times.

Un cercle vicieux : en choisissant de quitter la Russie et donc de payer cette taxe, les entreprises étrangères contribuent à renflouer les caisses de l’État russe, l’aidant à financer sa guerre en Ukraine tout en réduisant les conséquences des sanctions occidentales sur l’économie russe. Le même reproche peut leur être attribué si elles choisissent de rester. Il n’y a donc pas de solution idéale, et c’est au final toujours Vladimir Poutine qui se frotte les mains.

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