Le prochain métier de l’IA : animateur radio

Un système d’IA, avec une voix et une capacité de composer un texte lui-même, est prêt pour conquérir les chaînes radio. Animer des émissions, présenter les infos et la météo, choisir la musique, mais aussi écrire des articles à partir d’émissions et partager des extraits vidéo sur les réseaux sociaux – il pourrait tout faire.

Pourquoi est-ce important ?

Depuis la création de ChatGPT, les modèles d'intelligence artificielle de ce type se sont essayés à de nombreux métiers. ChatGPt a par exemple réussi les examens du MBA et pour devenir médecin. Une IA, fonctionnant avec le système GPT va maintenant débarquer sur des chaînes radios, aux États-Unis. Ce qui ne va pas sans poser question au niveau de la déontologie et du risque de propagation de fake news.

Dans l’actu : un nouveau système d’IA a vu le jour.

  • Il s’agit de RadioGPT. Le système a été développé par la société tech et médiatique américaine Futuri.
  • Le fera son début sur les antennes de plusieurs radios en Amérique du Nord à la mi-avril, rapporte Axios.

De quoi est-il capable ?

L’essentiel : une IA à tout faire.

  • D’abord, pour la radio même. Le bot, doté d’une voix, peut présenter la météo et les infos, et faire de l’animation entre les chansons. Il sert aussi de DJ et sélectionne la musique qui passe à l’antenne.
    • Il ne faut d’ailleurs pas lui donner les infos à présenter : il les recherche lui-même. C’est via TopicPulse, une autre IA de Futuri, qu’il repère les sujets d’actualité dans les médias et sur les réseaux sociaux. Ensuite, il formule des textes avec la technologie GPT-4 et les lit à l’antenne.
  • Ensuite, les tâches autour de la radio. Il peut rédiger des articles écrits à partir d’émissions et les mettre sur le site du média, créer des passages de vidéos (si les stations utilisent des caméras, par exemple) et les publier sur les réseaux sociaux ou transformer des émissions en podcasts et les mettre en ligne.
  • Une version démo est d’ailleurs déjà accessible.

Le détail : réduire les coûts et faire plus de contenu.

  • Selon les dires du CEO de Futuri, Daniel Anstandig, l’idée est d’enrichir les stations et de leur donner plus de contenu « direct ». Par exemple durant les heures où il n’y a personne à l’antenne et où du contenu pré-enregistré et programmé est diffusé (7/10e du temps dans le monde, selon Futuri). « Ce que nous cherchons à faire, c’est augmenter la capacité d’une station à remplir sa programmation avec plus de contenu local et en direct », explique-t-il à Axios. « Sauver la radio, et ne pas être en compétition avec », serrait le leitmotiv.
  • L’utilisation d’un tel bot peut aussi permettre de réduire les coûts, peut-on imaginer. Il faut engager moins de monde, notamment pour les tâches pratiques comme des retranscriptions d’émissions, les réseaux sociaux et l’édition de vidéos, voir pour programmer des émissions. Des fonds pourraient alors être alloués à d’autres missions.

Et la déontologie ?

Le risque : la pertinence, la qualité et la véracité des informations, un enjeu de la démocratie.

  • Il n’est pas clair si le bot, lorsqu’il présentera les infos, produira un journal parlé entier ou plutôt un flash info. Mais toujours est-il que le fait qu’il sélectionne lui-même les informations qui seront diffusées peut poser question.
  • Comment savoir s’il choisit les informations pertinentes ? S’il se base sur les réseaux sociaux, il peut aussi trouver et relayer des fausses informations, par exemple. ChatGPT a notamment inclus des fausses informations dans les articles qu’on lui a demandé de rédiger.
    • Pour présenter les informations dans un journal parlé ou même un flash info, il faut aussi savoir choisir celles qui sont importantes, savoir les hiérarchiser, connaître le contexte et pouvoir les analyser, les vérifier, et savoir distinguer la propagande de l’information, entre autres. Il s’agit de questions déontologiques et, au-delà, d’enjeux démocratiques. Il y a un engagement des médias à raconter la vérité, via lequel les auditeurs et les lecteurs donnent leur confiance aux journalistes.
    • Pareil pour les tâches pratiques. Comment être sûr qu’un tel bot retranscrive correctement les interviews par exemple, sélectionne les extraits pertinents, et ne fasse pas dire n’importe quoi aux personnes interrogées ? Cela compte également pour les vidéos.
  • Il en va aussi de la personnalité de l’animateur, d’une émission ou d’une radio dans son ensemble : si des personnes apprécient une émission, c’est grâce à l’animateur qui la porte. Une intelligence artificielle pourrait attirer moins de monde. « On ne pourra jamais remplacer entièrement » ces personnalités, estime John Gorman, ancien directeur de plusieurs radios locales, cité par Axios.

Bref, l’IA est vouée à prendre de plus en plus de place dans les médias. Les patrons de grands groupes médiatiques, comme l’Allemand Mathias Döpfner (CEO d’Axel Springer, à qui appartiennent Welt, le Spiegel et Politico, entre autres), le savent. L’IA a sans aucun doute ses avantages – mais son déploiement dans la presse devra être bien réfléchi et encadré.

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